Ma réflexion s'appuie sur les lectures de Lettre à Ménécée des Maximes d'Epicure et du Manuel d'Epictète. Je voudrais exposer ma vision de ces deux thèses à propos du bonheur. N'ayant pas lu Spinoza et étant bien conscient qu'une confrontation au texte est la meilleure solution, je souhaiterais, aussi, que certains d'entres vous puissent confronter la thèse spinoziste aux auteurs cités plus haut. Je tenterais moi aussi de le faire grâce à mes maigres connaissances sur l'auteur.
Tout d'abord, je crois que le but premier de ces philosophies grecques est de permettre aux hommes "d'obtenir" le bonheur. Epicure pense, d'ailleurs, que c'est le rôle de la philosophie.
Chez Epictète, le bonheur consiste en l'évaluation de ce qui dépend de nous et de ce qui n'y dépend pas. C'est en considérant et en agissant uniquement en fonction de ce qui dépend de nous que nous atteignons le bonheur (cf. Manuel premier paragraphe) :
Mais si tu penses que seul dépend de toi ce qui dépend de toi, que dépend d'autrui ce qui réellement dépend d'autrui [...] aucun malheur ne pourra t'atteindre.
C'est alors que comme l'auteur le dit dans le même paragraphe il ne faut pas tenir compte des honneurs de la richesse ou même de la santé car ce sont des choses qui ne dépendent pas de nous. Ici, je vois un rapprochement possible à la philosophie spinoziste. En effet, parceque toutes ces choses sont limitées dans le temps car appellées à disparaître un jour, l'homme ne doit pas s'y attacher. Le malheur n'en serait que plus grand.
D'autres part, le stoïcisme d'Epictète est très largement fataliste, il me semble. J'en veut pour preuve le paragraphe 8 du Manuel :
Il ne faut pas demander que les événements arrivent comme tu le veux, mais il faut les vouloirs comme ils arrivent ; ainsi ta vie sera heureuse.
L'Homme ne peut avoir prise sur le "dehors" (comme le suggère sa vision sur ce qui dépend et ne dépend pas de nous) car il doit s'éfforcer d'apprécier la vie et non d'agir sur elle. Au contraire, chez Spinoza, la raison permet d'augmenter son pouvoir d'exister par la compréhension des déterminations extérieures. L'Homme peut de cette façon s'affirmer pleinement ; il se place dans l'action alors qu'Epictète positionne l'Homme dans la soumission aux "événements".
Pensez-vous que cette opposition soit valable ?
Epicure quand à lui prône la connaissance du monde à travers notamment la physique. De par ce savoir, l'homme comprend que ce n'est pas la seule volonté de Zeus qui déclenche les éclairs mais bien des interactions entre différentes particules de matière. Cette compréhension du monde permet une absence de trouble (ataraxie), à propos de ces éclairs tout du moins. Je pense que cette thèse est, plus ou moins, proche de celle de Spinoza.
De plus, Epictète affirme que c'est la pensée et le sujet qui déterminent le bien et le mal -ces deux termes étant utilisés du point de vue du bonheur.
Manuel paragraphe 20 :
Souviens toi que l'outrage ne vient pas de l'homme qui insulte ou qui frappe, mais de l'idée qu'on se fait en se croyant outragé
Manuel paragraphe 16 :
L'orsque tu verras quelqu'un pleurer, souffrir, soit parce que son fils est au loin, soit parce qu'il a perdu ses biens, veille à ne pas te laisser dominer par l'idée fausse qu'il est dans le malheur [...] ce qui accable cet homme, ce n'est pas ce qui lui est arrivé (un autre en effet n'en est pas troublé), mais l'idée qu'il s'en fait.
C'est alors que le bonheur ne peut se concevoir a priori. L'homme heureux est celui qui prend les événements comme des biens, bien que ces événements ne sont pas nécéssairement des biens en soi.
En espérant être assez clairs dans mes propos, j'attend quelques réponses de vôtre part!! Je répete que je ne n'ai qu'une connaissance aproximative des auteurs cités. C'est pourquoi je profite de ce forum pour pouvoir éclairer et comprendre plus précisement ces thèses.
Merci d'avance