hokousai a écrit : il me semble que la vie ordinaire est tissée de cela . Une non dualité ordinaire.
Que dans d 'autres moments il y a dualité .( je fais attention à ce que je fais … donc dans l' événement je m'implique ( consciemment ) disons que je sais que j 'y suis.
Qu'à d'autres moment il y a conscience réflexive marquée ( je me vois moi même=cogito ).
Qu'il y a aussi des états méditatifs , spontanés ou provoquées, ce sont ceux que vous décrivez.
Le niveau de ce que Spinoza appellerait " comprendre " c'est encore un autre état de conscience.
Il y a un dilemme .
Une tradition lie la compréhension maximale à l'état méditatif et une autre tradition à l'étal de conscience claire et distincte proche de celui de conscient réflexive ( celle où je sais que c' est moi qui pense )
Et comme un sentiment d' illumination dans les deux cas.
Mais il y a t- il vraiment contradiction?
C'est la question qui m'est venue : pourquoi opposer tout cela ? Il n'y a rien de vrai qui puisse s'opposer sans se compléter, et ceci avec un englobant en même temps (mais le lien peut ne pas être explicitable : c'est ce que j'appelle, avec Diel, "le Mystère" ; c'est même inévitablement le cas, je pense, en particulier sous la forme du lien Pensée/Matière.) Notamment, pourquoi opposer l'idée claire et distincte et la conscience claire non focalisée ? C'est Dieu ET ses modes (le tout s'identifiant nécessairement à la conscience) : la conscience pure ET ses idées, claires et distinctes ou non. Le multiple est DANS l'Un.
Si tu fais une différence entre samsara et nirvana, c'est que tu es prisonnier du samsara !, etc., etc.
Lavelle le dit bien aussi, bien qu'il admette un Moi : seule l'analyse (et non la synthèse) est pertinente, et c'est très clairement et fermement la méthode de Spinoza. La structure réelle est en hiérarchie englobante, et ne peut en aucun cas être une juxtaposition. En revanche, temporellement, il peut y avoir alternance d'états justes et d'autres moins justes. Une oscillation permanente entre l'union et la séparation est en outre très possible à la base.
La conclusion de tout cela elle-aussi doit être claire : intuitive, immédiate, globale (connaître c'est être) et ne peut pas consister à plaquer une notion (que Lavelle distingue du concept, plus ferme et sain) de "bien ultime" sur une collection plus ou moins hétéroclite.
Et il va quand-même falloir vraiment préciser ce qu'on entend par "Moi" ou s'il est indéfinissable (et s'il est indéfinissable, pourquoi lui donner un nom.) Ce que dit Jourdain semble paradoxal à première vue. Il affirme haut et clair et souvent que "Moi = Conscience, = Suis ! (je suis) = Être", mais encore "Je me sais" (ou "Je me fais", car il s'agit d'un geste à la base), associé à "je me sais me sachant ; je me sais me sachant me sachant ; etc.", mais surtout et enfin : il s'agit de "Moi,
personnellement", et il insiste là-dessus... Mais il précise par ailleurs 1) que ce "personnellement" n'a évidemment rien à voir avec ce double mental imaginaire - qui empoisonne tout le monde, à part les rarissimes exceptions -, avec son cortège de "problèmes" (vexation, etc. voir petite liste plus haut, à compléter) et 2) que
le niveau le plus amont (englobant tout) de la conscience est impersonnel, et que c'est le niveau juste au-dessous qui est personnel.
Tous les orientaux, y compris U.G. qui pourtant nous ramène sèchement à la terre, disent qu'il n'y a rien qu'on puisse appeler "Moi". Mais les plus hauts d'entre eux ne pèsent ni plus ni moins lourd que Jourdain.
Il faudrait aussi préciser quand-même dans quelle mesure on a le droit de considérer une chose comme étant "vraiment" - et donc sans être une notion générale, au moins -
au point qu'elle mérite un nom propre. Ne mérite un nom propre que ce qui est intemporel (sinon, cela n'existe tout simplement pas en tant qu'entité), et après on peut se poser la question de savoir s'il faut en plus que cela puisse être conçu par soi.
Note : il me vient que c'est peut-être au moins partiellement une erreur de dire que ce qui se conçoit en Dieu ne se conçoit pas par soi ; et peut-être c'est pourquoi Lavelle n'aime pas le concept de substance... Dieu n'est pas une chose, dans laquelle d'autres choses se trouveraient (ce qui rejoint le problème de la métaphore spatiale...) Passons...
Le sujet et l'Acte : le sujet est forcément Acte et pas donnée ; et comme il n'est pas donnée il n'est en première approche pas connaissable...
Il n'est donc connaissable qu'en deuxième niveau, sans doute lorsqu'il voit quelque effet de l'Acte et est capable de l'y relier (c'est là que la volonté DOIT intervenir, en tant que moteur d'un côté, et objet de l'autre : conscience de l'effort...) Mais c'est là qu'apparaît en retour la question : la conscience de l'effort suppose-t-elle vraiment un donné ?
De mémoire, Lavelle retient 3 sujets, dont le central est purement conceptuel (il dit bien que ce n'est pas une notion, mais un concept) : le Moi phénoménal, le sujet transcendantal, et le Soi impersonnel qui est au-dessus de tout (en hiérarchie englobante.) Cela me semble très convaincant à première vue et est certainement à regarder de près.
Enfin, si on est pris régulièrement dans les "problèmes" du "petit moi" précédents - et la liste est longue, et si familière... - on n'a pas le droit de généraliser quoi que ce soit. Surtout se garder de juger et de conclure globalement ! Dans le temps, toutefois, on peut alterner ; c'est même certain. Mais globaliser, non. Comme dit Prajnanpad : "Chercheur de vérité ? Non-sens ! : chercheur de non-vérité !", à nouveau : "Vous pensez que vous voyez et (en fait) vous ne voyez pas que vous pensez" ou Byron Katie : "j'ai juste cessé de croire mes pensées". Jourdain : "Pure pensée ? Rien !" Là on touche, avec tous, la même "chose", qui ne doit pas être loin de la racine du problème global, en association avec la séparation illusoire : le "péché originel"...
Ajout : Mais on peut voir un autre aspect, cependant :
l'attention. Celle-ci est comme un faisceau de lumière particulièrement brillant
au sein de la conscience : où se porte l'attention, l'énergie vitale suit (c'est peut-être en fait la même chose, à un certain titre au moins.) Probablement, l'attention ne peut pas se porter simultanément sur le Tout indifférencié et sur le mode différentié. Une métaphore qui apparaît régulièrement est celle du zoom : zoom arrière, zoom avant (j'entendais à la radio hier soir un intervenant fort intéressant qui disait que le premier était plutôt féminin, et le second plutôt masculin ; yin et yang encore... Ceci tend à associer global et "passif", et particulier et "actif", aussi.) On peut le prendre aussi comme le degré de concentration / angle solide d'un faisceau lumineux. Focalisation. Alors là, c'est bien plus un tout, effectivement, qu'une juxtaposition. Et la volonté intervient bien, pas seulement la présentation.
Ceci pour autant ne résume pas tout : imagination, mémoire, libre-arbitre, Moi, visionneur/acteur/auteur/juge, etc., doivent être réglés aussi. Alors seulement : attention aigüe dans le calme béatifique ?
Connais-toi toi-même.