cher Hokousai,
pour la notion de volonté: il vaut peut-être mieux que j'y revienne dans le forum où je dois encore répondre à votre dernier message cc le libre arbitre.
Hokousai a écrit :Sur Wittgenstein !! dans quel sens ? et bien dans le sens de la méthode de Wittgenstein .
ma question était peut-être un peu trop courte pour être claire ... . Je voulais dire: ce qui m'intéresse, c'est de savoir en quoi consiste cette méthode pour vous (donc c'était une question purement informative). Mais encore une fois, ceci ne concerne que le sujet de la méthode. Il nous faut peut-être le réserver pour une nouvelle discussion centrée explicitement là-dessus.
Hokousai a écrit :……………………………….
Citation:
mais en revanche, je n'ai pas vraiment l'impression que ce que vous ne comprenez pas chez Spinoza, personne ne le comprend (et inversement, bien sûr) ...
La somme des gloses sur Spinoza est impressionnante et diversifiée , chacun donnant son avis avec l’ aplomb qu’il convient (y compris vous même) et chacun de s’insurger que l’autre ne comprenne pas tel qu on l’ a compris .
Il est bien évident qu’ on croit ( chacun ) à la compréhension qu’on en a sinon......on en changerait .
Et tous de vouloir me convertir, l’ un au catholicisme , l’autre à l’islam , encore un autre à Kant ou Aristote et la dernière à son spinozisme .
Moi qui n ai raison en rien et qui n’aime pas avoir raison , je vous dis que je ne suis pas du tout certain d’en avoir compris quelque chose .Ce qui présente au moins l ‘avantage de me garder mobilisé (ou mobile si vous voulez ).
il s'agit d'un malentendu. La citation de moi ci-dessus était une réponse à une phrase à vous (que je cite; voir mon message précédent), phrase qui disait à mes yeux que vous trouvez que ce que vous avez compris de Spinoza, tout le monde l'a compris, et inversement. Or si ce n'était pas cela ce que vous vouliez dire, ma réponse n'a bien sûr plus de sens non plus.
Sinon il est clair qu'il existe un tas d'interprétations et donc de compréhensions différentes de Spinoza. Et en principe en effet, aussi longtemps que l'on en défend une, on y croit. Mais en ce qui me concerne, il s'agit tout de même d'une croyance assez différente de celle que l'on associe à la conversion ou au désir de convertir les autres.
La différence entre la philosophie et la religion (idealiter) me semble précisément consister dans le fait que la philosophie ne veut pas convertir mais convaincre. C'est très différent. Moi-même pe j'ai l'impression que certaines méthodes de lire un texte philosophique ne permettent pas d'avoir accès à ce que le philosophe prétend avoir inventé. Mais cela n'est aucunement une question de croyance, c'est une question qui se discute, tout simplement. Et qui dit discuter, dit accepter a priori qu'à la fin de la discussion, la conclusion logique peut être qu'on a tort soi-même.
Un prêtre qui veut convertir les infidèles jamais ne se met en route en supposant qu'après avoir discuté avec eux, il puisse constater qu'il s'est trompé lui-même! Au contraire, ce serait la grande catastrophe. Il prie chaque jour de ne pas être 'séduit' par les 'démons'! En philosophie, c'est exactement le contraire: ce qui compte, c'est la solidité des arguments et la nécessité des conclusions. Trouver, pour un sujet x, une série d'arguments qui mènent nécessairement à une conclusion, voilà à mon avis le désir du philosophe (enfin, voilà un des aspects de son désir, peut-être).
L'avantage d'une discussion, c'est que l'on est minimum à deux pour tester la validité d'arguments. On peut donc plus facilement écarter ceux qui s'avèrent ne pas être valides. Mais on ne sait pas à l'avance quelle opinion des interlocuteurs sera la mieux 'fondée'. La victoire, en philosophie, ne consiste pas à AVOIR RAISON, c'est-à-dire à convertir l'interlocuteur. Elle consiste à CREER UNE RAISON, je veux dire, à créer une argumentation d'où la conclusion découle nécessairement. Réussir cela, voilà la victoire philosophique. Désirer avoir raison peut être tout à fait intéressant dans des discussion au café, mais je n'en vois pas l'utilité en philosophie.
Donc bon, je dirais qu'en philosophie, le rapport à la vérité est tout autre que celui propre à la religion. Si dans les deux cas il y a croyance, au niveau philosophique la croyance n'est fondée que sur la conviction argumentée qui aboutit à une certitude, et exige de pouvoir être mise en doute à chaque moment; tandis qu'au niveau religieux, la croyance est fondée sur une décision personnelle liée fondamentalement à une incertitude, pas à une vérité prouvée, incertitude que l'on assume telle quelle, et le doute y est précisément l'ennemi contre lequel il faut se battre.
En pratique, je sais bien qu'il existe pas mal de diplômés en philosophies qui font de la philosophie comme s'il s'agissait d'une religion. Mais à mes yeux, ce ne serait pas un jugement correcte que de mettre 'l'essence de la philosophie' dans le même sac. Or comme ceci prétend être une tentative de discussion philosophique: tout contre-argument m'intéresse, bien sûr.
Hokousai a écrit :
En dehors de leurs écrits peaufinés je soupçonne fort les philosophes d’avoir eu comme tout un chacun la tentation de bricoler leur bonheur de vivre . Je crains qu’ils aient du mal à s’y abaisser .
la dernière phrase de mon message était formulée de manière un peu maladroite, j'en conviens. Je n'ai aucun mépris pour ce que vous appelez le 'bricolage'. Et je ne voulais pas parler de la vie personnelle des grands philosophes non plus. Si leur tâche, c'est de construire des remèdes aux affects, pe, on ne peut pas leur demander d'inventer une nouvelle construction et de déjà l'avoir appliquée entièrement eux-mêmes. L'invention en tant que telle me semble déjà être un grand exploit. Si donc dans la vie personnelle, les philosophes bricolent autant que les 'vulgaires', pour moi cela n'entrave quasiment rien à leurs écrits. C'est donc cela que je voulais dire par la dernière phrase de mon message: n'avez-vous jamais eu l'expérience, pendant la lecture d'un philosophe, de découvrir quelque chose dont vous avez l'impression que l'appliquer ne peut que vous rendre plus heureux? Ou dont même la seule découverte vous rend déjà plus heureuse? C'est-à-dire vous donne un outil en plus dans le bricolage qu'est la vie quotidienne de tout homme, philosophe ou non?
Moi-même en tout cas cela m'arrive régulièrement. Si donc vous me répondez qu'à vous non, j'aurais tendance à penser que c'est peut-être lié à votre méthode de lecture, vu qu'elle semble être assez différente de la mienne. Mais cela ne me donne aucunement le désir de vous 'convertir' à la mienne. Cela m'inspire seulement d'essayer de vous convaincre d'expérimenter la mienne. Sinon, si vous avez déjà eu de telles expériences en lisant de la philosophie, alors ne faudrait-il pas en conclure que non pas les philosophes mais leurs écrits sont tout de même des produits d'un genre d'ingénieurs du Bonheur ... ?
Louisa