antagonisme?

Questions philosophiques diverses sans rapport direct avec Spinoza. (Note pour les élèves de terminale : on ne fait pas ici vos dissertations).

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Messagepar hokousai » 09 janv. 2008, 22:32

L'homme est un mode parmi les autres, mû par le désir d'augmenter sa puissance. Cela veut dire qu'au début de sa vie, sa puissance n'est pas encore très grande.
.

......et à la fin non plus

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Messagepar sescho » 09 janv. 2008, 22:35

Louisa a écrit :PS à Serge: si pour toi le spinozisme pourrait tout de même être "la seule vraie philosophie", que fais-tu des philosophies du XVIIIe siècle jusqu'à présent?

Pour moi, il n'y a qu'une Philosophie (mais qui n'existe vraiment qu'en tant que vécue, et là elle est potentiellement remise en cause en permanence, mais pas dans l'absolu.) Je pense que tout avait déjà été dit bien avant Spinoza, par exemple dans le platonisme, le stoïcisme, l'aristotélisme (pour le raisonnement), le bouddhisme. Mais la Philosophie doit renaître en permanence dans les faits, comme dit. Et alors là, pour Spinoza, chapeau ! "Lumières radicales", le mot n'est pas trop fort... Et avec un pourcentage de pertinence essentielle qui me semble exceptionnel, et ce dans un corpus finalement assez réduit.

Il y a entre tout cela une trame persistante (la "Tradition"), mais certains points qui peuvent être plus ou moins pertinents et pérennes à la marge.

J'apprécie au même titre, ceux qui, jusqu'à aujourd'hui, ont élevé et élèvent la réalité de la Philosophie (vécue, donc) en élevant les esprits, en traitant des mêmes sujets sous des éclairages divers, fonction de l'air du temps (dans l'approche, pas dans le fond, donc.)

Comme déjà dit, ce qui m'intéresse essentiellement, c'est la Philosophie morale (et tout ce qui la soutient, comme par exemple la perception claire de Dieu - la substance unique - la Nature.) Je ne la distingue donc pas de la Psychologie des profondeurs, qui EST une science, introspective (qui n'est pas sans risque d'erreur ; comme la Physique d'ailleurs, qui est très loin dans sa réalité d'ensemble d'avoir le pouvoir de conviction totalement contraignant de la Mathématique, et est bien plus "molle" en réalité qu'on ne le dit - a fortiori la Chimie, essentiellement expérimentale.)

La science de la psyché, ses lois éternelles. C'est cela l'œuvre de Spinoza dans l'Ethique, et rien d'autre ("automate spirituel".)


Amicalement


Serge
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Messagepar sescho » 09 janv. 2008, 23:21

hokousai a écrit :Cher Serge
Evidemment que nous percevons des corps en acte . L’idée de corps est intuitive . Spinoza dit seulement que la connaissance intuitive en est confuses .( imagination )

Comme il me semblait que vous l'aviez dit vous-même, je vois une différence entre percevoir un corps en acte (autrement dit comme mode étendu fini, point, comme n'importe quel autre corps) - ce qui est adéquat - et percevoir un corps particulier adéquatement dans sa forme, ou essence - ce qui est inadéquat.

hokousai a écrit :Ce que fait le bouddhisme ( par exemple, mais j’ y tiens ) est tout à fait le contraire . A partir d’une intuition des corps comme existants relativement limités et stables il passe à une connaissance qu’ii prétend supérieure celle de la vacuité .
La thèse de la vacuité de tombe pas du ciel elle est ancrée tout autant que la thèse de Spinoza dans une connaissance confuse des corps.

Personnellement je ne fais pas grosse différence entre la "vacuité d'existence propre" du bouddhisme et la "modalité" de Spinoza (si ce n'est que la notion de Nature ne me semble pas affirmée par le bouddhisme, si je ne me trompe.) Spinoza dit bien à de multiples reprises 1) Que les choses particulières ne doivent pas êtres conçues en elles-mêmes mais en Dieu. 2) Qu'elles ne peuvent être conçues sans les autres choses singulières (dans le même attribut) étant avec elles en inévitable interaction et donc affectation, ce qui est tout-à-fait clairement poser l'interdépendance et l'impermanence (la non-permanence absolue, plus exactement ; elles-mêmes impliquent la vacuité.) La différence la plus nette que je vois, c'est la notion d'"individu qui maintient sa nature", qui me semble difficilement assimilable au bouddhisme (mais bon, qu'un individu soit peu impermanent dans le fait que son corps est "comme régénéré" par l'absorption d'aliments - et donc l'échange de certaines de ses parties contre d'autres de même nature - ne devrait pas choquer outre mesure un bouddhiste (normalement ouvert, sinon ce n'en est pas un vrai.) De "l'autre côté", Spinoza fait peut-être plus référence à la nature "en gros" - Homme, Cheval, ... - qu'à la nature dans son moindre détail.)

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Messagepar hokousai » 10 janv. 2008, 00:14

"""""""""c'est la notion d'"individu qui maintient sa nature", qui me semble difficilement assimilable au bouddhisme """""""""""""

certainement

mais chez Spinoza il y a cette histoire du poète espagnol aveugle ....Spinoza , comme parfois , laisse en suspens ...

"""""car aucune raison ne me force à penser que le corps ne meurt que s'il est changé en cadavre """ scol pro 39/4

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Messagepar Louisa » 10 janv. 2008, 02:03

Serge a écrit :Pour moi, il n'y a qu'une Philosophie (mais qui n'existe vraiment qu'en tant que vécue, et là elle est potentiellement remise en cause en permanence, mais pas dans l'absolu.) Je pense que tout avait déjà été dit bien avant Spinoza, par exemple dans le platonisme, le stoïcisme, l'aristotélisme (pour le raisonnement), le bouddhisme. Mais la Philosophie doit renaître en permanence dans les faits, comme dit. Et alors là, pour Spinoza, chapeau ! "Lumières radicales", le mot n'est pas trop fort... Et avec un pourcentage de pertinence essentielle qui me semble exceptionnel, et ce dans un corpus finalement assez réduit.

Il y a entre tout cela une trame persistante (la "Tradition"), mais certains points qui peuvent être plus ou moins pertinents et pérennes à la marge.

(...)

Comme déjà dit, ce qui m'intéresse essentiellement, c'est la Philosophie morale (et tout ce qui la soutient, comme par exemple la perception claire de Dieu - la substance unique - la Nature.)


ce que nous avons en commun, c'est de ne pas croire en la philosophie comme "exercice théorique", et de donner le plus de valeur à la recherche du Bien. Or ce qu'y ajoutait Platon et à mon sens aussi Spinoza, c'est que pour connaître ce bien, nous avons besoin d'un savoir vrai. C'est précisément la raison pour laquelle je suis très étonnée de lire que pour toi, tout est toujours déjà dit, tout est toujours déjà connu ... comme si le fait d'avoir mis le pied sur la lune n'était plus un "a giant leap for mankind", mais que l'on savait non seulement dès le début que c'était possible, mais même déjà comment s'y prendre. Comme si on n'a pas eu besoin de siècles de travail intensif et créateur avant de pouvoir y arriver. Comme si la vérité était toujours déjà acquis, avant d'aller la chercher (ou dès que le premier homme un peu intelligent s'y est mis).

Serge a écrit :Je ne la distingue donc pas de la Psychologie des profondeurs, qui EST une science


pourquoi l'appeler science et non pas mythe (sachant que les mythes ne sont pas de simples illusions mais des créations humaines fort utiles dans la vie pratique)?

Serge a écrit :introspective (qui n'est pas sans risque d'erreur ; comme la Physique d'ailleurs, qui est très loin dans sa réalité d'ensemble d'avoir le pouvoir de conviction totalement contraignant de la Mathématique, et est bien plus "molle" en réalité qu'on ne le dit - a fortiori la Chimie, essentiellement expérimentale.)


oui d'accord, c'est ce qui fait dire à Christian Houzel par rapport aux nombres qu'on "est là devant une réalité certainement aussi réelle que le monde qui nous entoure et d'une certaine façon pour nous plus réelle parce que quand même on y accède avec une plus grande clarté. Quand on a obtenu un résultat mathématique, ce résultat est absolument indéniable et complètement compréhensible. Alors que quand on a obtenu un résultat sur telle galaxie, telle particule élémentaire, tel fait biologique, ce résultat reste soumis à discussion, à interprétation". Ainsi la suite des nombres premiers, par exemple, a pour lui une réalité plus stable que la réalité matérielle qui nous entoure, "plus stable certainement, car ce qu'on en connaît, on le connaît, de façon tout à fait certaine. Alors que dans les sciences expérimentales il y a inéluctablement quelque chose d'un peu instable." Mais il y ajoute immédiatement (toujours par rapport au monde des nombres premiers): "c'est une réalité qui n'appartient pas au monde sensible. ce n'est pas le monde matériel. Il n'y a pas de lien avec les cinq sens".

Mais donc justement, il me semble que tu transfères cette certitude/stabilité quasi absolue ("quasi", car finalement Houzel admet que nous ne savons toujours pas ce que c'est qu'un nombre) à un tout autre domaine, qui est celui de la philosophie. Disons encore que la philosophie est en réalité de la Psychologie (ce avec quoi je ne suis pas vraiment d'accord (understatement)), science de l'âme.

Alors de deux choses l'une: ou bien la psychologie est une science expérimentale comme une autre, et dans ce cas le fait même qu'on y manque de la stabilité et de la certitude le rend impossible de la concevoir comme une discipline où "tout a déjà été dit" (en physique les paradigmes se succèdent, les "révolutions" se produisent régulièrement, changeant de fond en comble ce qui y est dit). Ou bien on la considère (comme tu sembles le faire implicitement) comme une espèce de mathématique, où la stabilité et la certitude durant les siècles est maximale, comparée à toutes nos autres sciences. Or comment dire cela de la philosophie, qui n'a pas DU TOUT la même rigueur que les mathématiques, qui ne véhicule pas du tout le même type de certitudes (si certitude il y a), et, qui plus est, a déjà connu des oppositions radicales (James - Spinoza, les exemples sont innombrables)?

Si les mathématiques sont maximalement certaines, c'est précisément parce qu'elles n'ont pas à voir avec les cinq sens et la matière. Tu dirais la même chose de la psychologie: rien à voir avec la matière? Si oui: que fais-tu de la proposition où Spinoza dit que pour connaître l'esprit, il faut D'ABORD connaître le corps?
Amitiés,
louisa

PS: une réponse à Hokousai et à ton avant dernier message arrive sous peu.

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Messagepar sescho » 10 janv. 2008, 21:10

Louisa a écrit :... je suis très étonnée de lire que pour toi, tout est toujours déjà dit, tout est toujours déjà connu ...

Non. Je dis simplement que tout avait été écrit bien avant Spinoza, c'est juste un constat, pas que tout était écrit à l'instant (voire avant) où le mutant proto-homo sapiens sapiens a vu le jour... Mais ceci sous quelques conditions ; par exemple : 1) Tout n'avait pas été dit par le même (quoique le stoïcisme en dit beaucoup.) 2) Ceci est plus une vue de l'esprit qu'une réalité, en fait, car la seule réalité c'est ce que vit chaque individu en l'instant, d'où un renouvèlement permanent de la Philosophie réelle. Et évidemment, en totale conformité avec Spinoza : 3) Que les lois qu'il s'agit de voir clairement, autant que possible, sont les mêmes pour tous les homo sapiens et éternelles (mais leur action réelle a dû changer, comme changeait l'environnement, en particulier la concentration humaine et sa complexification hiérarchique. Comme je l'ai dit quelque part, celui qui prétendait courir plus vite que le tigre à dent de sabre n'ennuyait pas son monde longtemps ; tandis qu'aujourd'hui...)

Louisa a écrit :... il me semble que tu transfères cette certitude/stabilité quasi absolue ("quasi", car finalement Houzel admet que nous ne savons toujours pas ce que c'est qu'un nombre) à un tout autre domaine, qui est celui de la philosophie. Disons encore que la philosophie est en réalité de la Psychologie (ce avec quoi je ne suis pas vraiment d'accord (understatement)), science de l'âme.

Non. J'ai dit que la Mathématique n'est pas une science mais une propriété de l'esprit humain (qui se trouve partiellement en corrélation, cependant, avec les lois de la Nature) et que la Psychologie des profondeurs est, elle, une science (soumise à quelque incertitude, donc, au même titre que la Physique.) Mais les démonstrations de Spinoza sont de la Mathématique, comme il en est en Physique. L'alpha et l'omega sont néanmoins d'un autre ordre : la science intuitive. "En amont" les notions communes, "en aval" la connaissance du troisième genre (des lois en actions dans les choses particulières.) En outre la quantification numérique (arithmétique) n'a pas grand sens en Psychologie des profondeurs.

Louisa a écrit :... ou bien la psychologie est une science expérimentale comme une autre, et dans ce cas le fait même qu'on y manque de la stabilité et de la certitude le rend impossible de la concevoir comme une discipline où "tout a déjà été dit" (en physique les paradigmes se succèdent, les "révolutions" se produisent régulièrement, changeant de fond en comble ce qui y est dit). ...

Oui d'accord. Pour moi c'est juste une nuance. Comme je l'ai dit au début, c'est un simple constat, pas une affirmation d'une connaissance éternelle et qui ne peut progresser (mais je ne vois pas beaucoup de progrès encore à faire vis-à-vis des écrits ; dans les faits c'est tout autre chose et ce pour chacun à chaque instant.) La seule chose éternelle - outre les attributs, le mouvement, la modalité, ... - ce sont les lois, comme en Physique. En passant, la Mathématique aussi progresse, quoique contraignante (librement contraignante : un bel exemple de la liberté dans la détermination) et à mon avis les hommes du Néolithique avaient une meilleure connaissance de la Physique (intuitive) que de la Mathématique... En fait la seule chose intuitive immédiate ce sont les lois de base de la Logique ; le reste est développement de ces lois, sur la base de prémisses non démontrables.

La démarche de Spinoza est typiquement scientifique. Ce qu'il y a à mettre au clair, ce sont les lois éternelles de la Nature. Et d'avoir jusqu'à aujourd'hui été la science de l'Esprit n'est pas la moindre lettre de noblesse de la Philosophie...


Amicalement


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Messagepar hokousai » 10 janv. 2008, 23:43

cher Serge

Vous ne pouvez pas établir de liens entre les vérités éternelles et les vérités transitoires .On a donc deux mondes hétérogènes.
Car la question de l’existence qui se pose pour des choses qui peuvent exister ou ne pas exister , pour les vérités éternelles la question de leur existence est un non sens .

Pour quelles choses la question se pose-t elle ?La question de savoir le comment, la cause et le sens de l’existence de ces choses.
Les vérités éternelles en sont exclues .

Il faut admettre que les deux mondes sont hétérogènes et ne relèvent pas des mêmes questions (et savoir quelles questions vous vous poseriez sur les vérités éternelles ) .

Il fait alors savoir si le monde des vérités transitoires intéresse encore la philosophie ou pas .

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Messagepar Louisa » 11 janv. 2008, 13:44

Louisa a écrit:
... je suis très étonnée de lire que pour toi, tout est toujours déjà dit, tout est toujours déjà connu ...

Serge:
Non. Je dis simplement que tout avait été écrit bien avant Spinoza, c'est juste un constat, pas que tout était écrit à l'instant (voire avant) où le mutant proto-homo sapiens sapiens a vu le jour...


j'avoue que je ne vois pas très bien la différence entre ce qui m'étonne et ce que tu écris ... . Ok, tu reconnais le fait que pour obtenir des données scientifiques, il faut du travail humain, elles ne tombent pas du ciel. Et donc cela prend du temps. Mais ce qui pour moi est essentiel dans ce que tu dis, c'est que néanmoins en une vingtaine-trentaine de siècles l'homme aurait été capable de découvrir l'essentiel sur le monde, et cela même sans aucune réelle science expérimentale (qui n'existe que depuis quelques siècles), donc AVANT l'invention de la science moderne. Or comment savoir que la réalité est plus conforme à une science chimique qu'à une science phlogistique, par exemple, AVANT de l'avoir démontré?

Bref, à mes yeux tu sous-estimes sérieusement l'incertitude propre aux controverses scientifiques si tu crois qu'avant que ceux-ci aient trouvé les preuves qui permettent d'adhérer à une théorie et de laisser tomber une autre, qui la contredit, "on" (mais qui alors???) le savait déjà.

Serge a écrit : Mais ceci sous quelques conditions ; par exemple : 1) Tout n'avait pas été dit par le même (quoique le stoïcisme en dit beaucoup.)


mais justement, Spinoza et le Stoa s'opposent (Spinoza ne croyant pas que l'homme est un empire dans un empire, les stoïciens oui; Spinoza ne croyant pas en l'harmonie du monde, les stoïciens oui, et ainsi de suite). Tu diras peut-être qu'il ne s'agit que d'oppositions "superficielles", et qu'au fond, Spinoza ne fait rien d'autre que de donner un nouvel habit à la vieille théorie stoïcienne. Le problème c'est qu'il n'y a pas seulement le Stoa. Si l'on compare Spinoza avec n'importe quel autre philosophe, il y a d'AUTRES contradictions, et je crains qu'en enlevant toutes ces contradictions du spinozisme, il ne restera plus grand-chose, comme "fond commun". Et alors nous ne parlons même pas encore des conceptions animistes (pour qui, contrairement à ce que pose Spinoza, il y a une science de l'invisible, chose qui ne relève que de la "superstition" pour Spinoza)...

Serge a écrit :2) Ceci est plus une vue de l'esprit qu'une réalité, en fait, car la seule réalité c'est ce que vit chaque individu en l'instant, d'où un renouvèlement permanent de la Philosophie réelle. Et évidemment, en totale conformité avec Spinoza


disons que ce qui pour toi semble être évident, l'est moins pour moi. Bien sûr, SI l'on adopte le point de vue spinoziste, on PEUT regarder la réalité d'une telle façon. Mais pourquoi serait-ce "évident" d'adopter CETTE vue de l'esprit et pas une autre, puisqu'un tas d'alternatives circulent, certaines d'entre eux relevant des sciences expérimentales, et donc fournissant des informations sur le réel qui sont moins stables mais certes plus "informatives" que de la pure science "mathématique".

Serge a écrit :: 3) Que les lois qu'il s'agit de voir clairement, autant que possible, sont les mêmes pour tous les homo sapiens et éternelles (mais leur action réelle a dû changer, comme changeait l'environnement, en particulier la concentration humaine et sa complexification hiérarchique. Comme je l'ai dit quelque part, celui qui prétendait courir plus vite que le tigre à dent de sabre n'ennuyait pas son monde longtemps ; tandis qu'aujourd'hui...)


c'est en effet la "vue d'esprit" que la doctrine dominante en Occident a longtemps considérée comme étant évidente. Mais voici que Prigogine a démontré qu'il est bien possible qu'en réalité, en dehors de NOS vues d'esprit, il n'y a PAS de lois éternelles. Les lois sont alors, comme tout être réel, susceptible de génération et de corruption. Pas d'éternel retour donc, pas de Dieu qui est le garant de ces lois éternelles ... . Bien sûr, son hypothèse n'est pas encore tout à fait prouvé, mais cela n'empêche qu'il a reçu le prix Nobel de chimie précisément parce que ses premières expériences sont TRES prometteur. Ce n'est donc pas un hasard s'il a intitulé un de ces livres La fin des certitudes.

Or si pour des scientifiques éminents de notre époque, je cite Prigogine, la "question de l'avenir de la science est souvent posée. Nous n'en sommes qu'au début de l'aventure", comment croire que déjà au XVIIe, tout était dit ... ????

Prigogine concernant les lois de la nature:

Prigogine a écrit :La prise en compte de ces concepts mène à une nouvelle formulation des lois de la nature, une formulation qui, comme je l'ai déjà mentionné, n'est plus assise sur des certitudes, comme les lois déterministes, mais s'avance sur des possibilités. De plus, cette formulation probabiliste détruit la symétrie temporelle et permet donc au caractère évolutif de l'univers de s'exprimer dans la structure des lois fondamentales de la physique.


Bref, c'est la science la plus fiable dont nous disposons (quand il s'agit de connaître l'attribut de l'Etendue) qui est en train d'EVOLUER vers une conception du monde où ce n'est que d'un point de vue tout à fait simplifié que nous pouvons parler de lois déterministes. Dès que nous tenons davantage compte de la complexité du monde, on constate que l'éternité et le déterminisme ... disparaissent. Le temps, dans cette optique, n'est pas du tout "imaginaire" ou lié à notre esprit et notre sensibilité, comme l'ont proposé d'autres philosophes, en contraste avec l'éternité du monde et de ce qui est "vraiment" réel. Le temps fait partie de l'univers. Non seulement l'univers évolue, mais aussi les LOIS qui le fondent ... cela nous oblige de commencer à penser TOUT autrement que ce qu'on a fait depuis des siècles. Au lieu de prendre le type de vérité propre aux mathématiques (certitude absolue, en effet, ou "évidence", comme tu le dis) comme critère de toute vérité (ce que propose aussi Spinoza), il faudra inventer un tout nouveau concept de vérité, si la philosophie veut continuer à tenir compte des résultats des sciences. Bref, aujourd'hui même, nous nous trouvons sur un énième point de bifurcation dans nos conceptions scientifiques du monde. Ces bifurcations à mes yeux ne montrent pas seulement que la science est réellement inventive, et que jamais "tout" ne sera dit (voir qu'il aurait déjà été dit il y a des siècles), mais également que l'idée même de cette stabilité éternelle pourrait bien n'être qu'un trait des phénomènes à notre échelle (et encore ..), mais pas à l'échelle de LA réalité.

Louisa:
... il me semble que tu transfères cette certitude/stabilité quasi absolue ("quasi", car finalement Houzel admet que nous ne savons toujours pas ce que c'est qu'un nombre) à un tout autre domaine, qui est celui de la philosophie. Disons encore que la philosophie est en réalité de la Psychologie (ce avec quoi je ne suis pas vraiment d'accord (understatement)), science de l'âme.

Serge:
Non. J'ai dit que la Mathématique n'est pas une science mais une propriété de l'esprit humain (qui se trouve partiellement en corrélation, cependant, avec les lois de la Nature) et que la Psychologie des profondeurs est, elle, une science (soumise à quelque incertitude, donc, au même titre que la Physique.)


dans ce cas, qu'appelles-tu une science?

Serge a écrit : Mais les démonstrations de Spinoza sont de la Mathématique, comme il en est en Physique.


Il ne suffit pas de démontrer quelque chose "selon l'ordre géométrique" pour déjà faire de la mathématique ... . Il faut aussi que les objets dont traite la démonstration ont tous les caractères d'objets mathématiques. Ce n'est pas du tout le cas dans l'Ethique ... .

Serge a écrit :L'alpha et l'omega sont néanmoins d'un autre ordre : la science intuitive. "En amont" les notions communes, "en aval" la connaissance du troisième genre (des lois en actions dans les choses particulières.) En outre la quantification numérique (arithmétique) n'a pas grand sens en Psychologie des profondeurs.


j'avoue que j'ai l'impression que tu rabats le troisième genre de connaissance sur le deuxième. Les deux traitent selon toi des lois de la nature (donc de ce que les choses ont en commun), seulement la méthode diffère: le deuxième le fait par le biais de la raison, le troisième fait exactement la même chose, mais intuitivement. Il s'agit là à mon sens d'un contresens assez absolu par rapport à ce qu'écrit Spinoza. Comme si les lois de la nature sont là, VISIBLES pour tout un chacun qui a acquis le sens "intuitif". Comme si l'expérimentation, en science physique, est superflue, seulement nécessaire pour ceux qui sont "aveugle" au niveau intuitif (tandis que dans le TIE, il dit littéralement que les expérimentations sont nécessaires pour acquérir le savoir vrai). Puis cela a surtout comme implication, il me semble, que nous n'avons plus d'accès possible aux essences des choses singulières, essences qui pourtant existent, puisque Spinoza dit que chaque chose est un degré de puissance, un effort pour persévérer dans SON être etc. (j'ai entre-temps pu lire vos échanges à ce sujet dans le fil dont tu as mis le lien (merci!) ... pour l'instant je suis plutôt convaincue des idées qu'y défend Bardamu ... mais j'espère trouver bientôt un peu de temps pour y réfléchir un peu plus sérieusement).

Louisa:
... ou bien la psychologie est une science expérimentale comme une autre, et dans ce cas le fait même qu'on y manque de la stabilité et de la certitude le rend impossible de la concevoir comme une discipline où "tout a déjà été dit" (en physique les paradigmes se succèdent, les "révolutions" se produisent régulièrement, changeant de fond en comble ce qui y est dit). ...

Serge:
Oui d'accord. Pour moi c'est juste une nuance. Comme je l'ai dit au début, c'est un simple constat, pas une affirmation d'une connaissance éternelle et qui ne peut progresser (mais je ne vois pas beaucoup de progrès encore à faire vis-à-vis des écrits ; dans les faits c'est tout autre chose et ce pour chacun à chaque instant.)


pour moi c'est étonnant de voir que tu parles de "simple constat" là où des scientifiques assez importants semblent "constater" exactement l'inverse, ou plutôt travailler sur des hypothèses inverses et déjà trouver quelques preuves.

Puis une thèse sur l'éventuel "progrès" des sciences, ne fait-elle pas PARTIE de nos pratiques scientifiques? Je veux dire: comment, quand il s'agit d'une question qui relève de l'histoire des sciences, faire des "simples constats"? Ne faut-il pas plutôt dire qu'en science, et encore plus en histoire, les thèses se discutent et doivent être prouvés, que personne ne peut s'y contenter de ce qu'il semble "constater"? Les historiens des sciences trouvent en tout cas qu'ils doivent appuyer leur hypothèses sur l'histoire des sciences sur de matériel concret. C'est ce qu'a fait Thomas Kuhn, qui a étudié la "structure des révolutions scientifiques". Pour lui (et il le montre d'une façon très détaillée), l'histoire des sciences est faite de ruptures radicales, de véritables changements de "paradigme" c'est-à-dire des conceptions fondamentales du monde. Pas de science sans révolution scientifique donc.

Or tu sembles dire exactement l'inverse: au fond, rien ne change, tous sont toujours d'accord sur l'essentiel. Mais ce serait quoi alors, cet "fond essentiel"? Et si l'on le connaissait déjà à l'époque de Platon ... pourquoi appeler toutes les inventions scientifiques depuis lors "non essentielles", tandis que justement, ce sont bel et bien elles qui sont capables d'augmenter énormément la qualité et la longueur de vie? Comme le dit Spinoza: si la fin est d'acquérir un bonheur constant, "puisque la santé n'est pas un petit moyen pour arriver à poursuivre cette fin, il faut composer une Médecine entière" (TIE B15). Comment adhérer à cette idée et en même temps déclarer non essentielles les avancements en Médecine ces derniers 100 ans, par exemple ... ?

Serge a écrit : La seule chose éternelle - outre les attributs, le mouvement, la modalité, ... - ce sont les lois, comme en Physique. En passant, la Mathématique aussi progresse, quoique contraignante (librement contraignante : un bel exemple de la liberté dans la détermination) et à mon avis les hommes du Néolithique avaient une meilleure connaissance de la Physique (intuitive) que de la Mathématique... En fait la seule chose intuitive immédiate ce sont les lois de base de la Logique ; le reste est développement de ces lois, sur la base de prémisses non démontrables.


mais si la seule chose "immédiatement" intuitive ce sont les lois de base de la logique, pourquoi croire que la découverte des lois de la nature (donc de tout l'univers, de tout ce qui dépasse de loin notre esprit à nous) est une affaire "intuitive" elle aussi? Tandis qu'en réalité, la science physique n'est pas peuplé de "visionnaires" qui ne font que regarder les lois de la logique et les développent, les yeux fermés, de façon rationnelle ... les scientifiques EXPERIMENTENT (c'est-à-dire interagissent) avec le réel. Sans ces expériences, comment arriver à une quelconque connaissance vraie des lois de la nature ... ? Et qui dit expériences, dit dispositif expérimental, donc technologie. C'est bien parce que la technologie actuellement est infiniment plus puissante que celle du Néolithique qu'à mon sens les gens qui vivaient à l'époque ne pourraient avoir AUCUNE intuition de ce que ces instruments nous permettent de découvrir aujourd'hui. Déjà il y a quelques siècles, on était convaincu (intuitivement, intuition que les sciences à l'époque confirmaient) que la terre était plate et non pas une sphère, qu'elle était au centre de l'univers, etc. Comment dire alors qu'avant Spinoza déjà, les lois de la nature étaient connues ou "intuitionnées" ... ?

Serge a écrit :La démarche de Spinoza est typiquement scientifique. Ce qu'il y a à mettre au clair, ce sont les lois éternelles de la Nature. Et d'avoir jusqu'à aujourd'hui été la science de l'Esprit n'est pas la moindre lettre de noblesse de la Philosophie...


qu'appelles-tu "scientifique", en fait?
Amitiés,
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Modifié en dernier par Louisa le 11 janv. 2008, 15:10, modifié 2 fois.

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Messagepar Louisa » 11 janv. 2008, 14:01

Hokousai a écrit :Vous ne pouvez pas établir de liens entre les vérités éternelles et les vérités transitoires .On a donc deux mondes hétérogènes.
Car la question de l’existence qui se pose pour des choses qui peuvent exister ou ne pas exister , pour les vérités éternelles la question de leur existence est un non sens .

Pour quelles choses la question se pose-t elle ?La question de savoir le comment, la cause et le sens de l’existence de ces choses.
Les vérités éternelles en sont exclues .

Il faut admettre que les deux mondes sont hétérogènes et ne relèvent pas des mêmes questions (et savoir quelles questions vous vous poseriez sur les vérités éternelles ) .

Il fait alors savoir si le monde des vérités transitoires intéresse encore la philosophie ou pas .


je crois qu'en effet, la distinction que vous introduisez ici est importante.

Ce que prétend Prigogine (si je l'ai bien compris), c'est que justement, longtemps (jusqu'à présent, en fait), la science ne s'intéressait qu'à ce que l'on peut appeler des vérités éternelles. Ou plutôt: elle supposait qu'en étudiant les phénomènes de la nature par la recherche de lois déterministes, elle était en train d'étudier les lois éternelles de cette nature, et donc en train de créer/trouver des vérités éternelles.

Mais donc là, il y avait toujours déjà un lien entre l'existence des choses et ces vérités, ne fût-ce que parce que les scientifiques étaient bien obligés d'en passer par les premiers pour pouvoir découvrir les deuxièmes.

Or voici que Prigogine annonce la "fin" de la recherche des vérités éternelles en physique (toujours même livre que celui cité ci-dessus):

"Le point de vue présenté dans ce livre est différent. Les lois de la physique, dans leur formulation traditionnelle, décrivent un monde idéalisé, un monde stable et non le monde instable, évolutif, dans lequel nous vivons.

Ce point de vue nous force à reconsidérer la validité des lois fondamentales, classiques et quantiques. En tout premier lieu, notre refus de la banalisation de l'irréversibilité est fondé sur le fait que même en physique l'irréversibilité ne peut plus être associée seulement à une augmentation du désordre. Bien au contraire, les développements récents de la physique et de la chimie du non-équilibre montrent que la flèche du temps peut être une source d'ordre. (...) L'irréversibilité mène à la fois au désordre et à l'ordre."

Cela signifie (si je l'ai bien compris) que l'éternité (ici la réversibilité: si les lois sont éternelles, il suffit de les connaître et de connaître l'état d'une chose à un moment x, pour pouvoir et prévoir ce qui s'ensuivra et ce qui précédait, autrement dit on peut se promener sur la ligne du temps dans les deux sens) pourrait bien être ne rien d'autre qu'une IDEALISATION de notre part, une idéalisation de la nature, une simplification à outrance. Ainsi le propre du vrai ne serait plus d'être éternel, mais ... d'être transitoire.
cordialement,
louisa

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Messagepar sescho » 11 janv. 2008, 20:55

Louisa a écrit :... ce qui pour moi est essentiel dans ce que tu dis, c'est que néanmoins en une vingtaine-trentaine de siècles l'homme aurait été capable de découvrir l'essentiel sur le monde, et cela même sans aucune réelle science expérimentale (qui n'existe que depuis quelques siècles)...

D'abord, moi, je ne confonds pas la science de l'Esprit avec la science Physique, et personnellement je m'intéresse ici essentiellement à celle de l'Esprit, c'est-à-dire à la Philosophie. La différence - même si le mot "science", c'est-à-dire "sapience" pour moi, est propre dans les deux cas - est grande de mon point de vue, c'est que l'objet de la science de l'esprit est interne, et donc nécessairement introspectif, et comprend l'idée claire et distincte, la vision intuitive, ce qui est plus discutable s'agissant de la science Physique. Donc, tout ce que tu dis sur la Science physique est hors de propos en ce qui me concerne et je passe tous les passages correspondants.

Sur le "cela a déjà été écrit depuis longtemps" (en science de l'esprit) je veux bien plein de choses (sans renier mon propos, qui ne prétend nullement à l'absolu) : que tout n'a pas été dit à la même façon que Spinoza, avec la même pertinence, avec la même hiérarchie (très importante au-delà des phrases particulières.) On peut voir plutôt l'étendue des convergences ou celle des oppositions, c'est selon... Inutile de préciser que malgré que je pense que beaucoup avait été dit bien avant Spinoza, je le tiens pour un Maître des plus éminents.

Il n'y a strictement aucune raison pour que la science de l'Esprit soit mesurée à l'aune des progrès de la science Physique.

Ce que je veux dire surtout c'est que la problématique de base, correctement exprimée ou non de fait (et il y a bien création sur ce plan), n'est pas conjoncturelle mais éternelle. Il n'y a fondamentalement qu'un seul "problème" fixé de toute éternité à homo sapiens sapiens ; mais effectivement la découverte de ce problème est sujette à progrès (comme à régression d'ailleurs, imaginée comme progrès.)

Louisa a écrit :Mais voici que Prigogine a démontré qu'il est bien possible qu'en réalité, en dehors de NOS vues d'esprit, il n'y a PAS de lois éternelles. ... Bien sûr, son hypothèse n'est pas encore tout à fait prouvé, mais cela n'empêche qu'il a reçu le prix Nobel de chimie précisément parce que ses premières expériences sont TRES prometteur. Ce n'est donc pas un hasard s'il a intitulé un de ces livres La fin des certitudes.

Démontré qu'il est bien possible... M'étonnerais que Prigogine ait reçu le Nobel pour cela... Mais bon, nous avons déjà évoqué Prigogine (dont j'ai lu des passages du livre en question.)

Enfin, pour Spinoza, la cause est entendue.

Louisa a écrit :dans ce cas, qu'appelles-tu une science?

L'identification de Lois de la Nature. Ce n'est pas le cas de la Mathématique qui ne fait que s'exprimer elle-même (si tant est que, selon toi d'après Prigogine, ses lois ne changent pas...) Sa portée est par ailleurs fonction des prémisses, qui ne sont pas de son ordre et en circonscrivent la portée. Je tiens cette conviction d'un ami vraiment très fort en Physique (étant moi-même de formation scientifique, donc quelque peu apte à en juger.)

Louisa a écrit :Il ne suffit pas de démontrer quelque chose "selon l'ordre géométrique" pour déjà faire de la mathématique ... . Il faut aussi que les objets dont traite la démonstration ont tous les caractères d'objets mathématiques. Ce n'est pas du tout le cas dans l'Ethique ...

La Logique c'est la Logique. Les prémisses ne sont pas de son ordre.

Louisa a écrit :... j'avoue que j'ai l'impression que tu rabats le troisième genre de connaissance sur le deuxième. ...

Ecoute, je crois qu'il va falloir que tu te décides à citer Spinoza, et à nous démontrer ta position logiquement à partir de son texte, propositions prises en l'état et démonstrations itou. Parce qu'à affirmer sans rien prouver, nous pouvons y passer des lustres...

Je vais faire un nouvel effort et te proposer de lancer ta démonstration à partir des passages suivants :

Spinoza, Ethique, traduit par E. Saisset, a écrit :E2P25 : L’idée d’une affection quelconque du corps humain n’enveloppe pas la connaissance adéquate du corps extérieur.

E2P26 : L’âme humaine ne perçoit aucun corps comme existant en acte, que par les idées des affections de son corps.

E2P29S : Je dis expressément que l’âme humaine n’a point une connaissance adéquate d’elle-même, ni de son corps, ni des corps extérieurs, mais seulement une connaissance confuse, toutes les fois qu’elle perçoit les choses dans l’ordre commun de la nature ; par où j’entends, toutes les fois qu’elle est déterminée extérieurement par le cours fortuit des choses à apercevoir ceci ou cela, et non pas toutes les fois qu’elle est déterminée intérieurement, c’est-à-dire par l’intuition simultanée de plusieurs choses, à comprendre leurs convenances, leurs différences et leurs oppositions ; car chaque fois qu’elle est ainsi disposée intérieurement de telle et telle façon, elle aperçoit les choses clairement et distinctement, comme je le montrerai tout à l’heure.

E2P37 : Ce qui est commun à toutes choses (voir le Lemme ci-dessus), ce qui est également dans le tout et dans la partie, ne constitue l’essence d’aucune chose particulière.

E2P38 : Ce qui est commun à toutes choses et se trouve également dans le tout et dans la partie, ne se peut concevoir que d’une façon adéquate.

Corollaire : Il suit de là qu’il y a un certain nombre d’idées ou notions communes à tous les hommes. Car (par le Lemme 2) tous les corps se ressemblent en certaines choses, lesquelles (par la Propos. précéd.) doivent être aperçues par tous d’une façon adéquate, c’est-à-dire claire et distincte.

E2P40S2 : Outre ces deux genres de connaissances, on verra par ce qui suit qu’il en existe un troisième, que j’appellerai science intuitive. Celui-ci va de l’idée adéquate de l’essence formelle de certains attributs de Dieu à la connaissance adéquate de l’essence des choses. J’expliquerai cela par un seul exemple. … Soit, par exemple, les trois nombres en question, 1, 2, 3 : il n’y a personne qui ne voie que le quatrième nombre de cette proportion est 6, et cette démonstration est d’une clarté supérieure à toute autre, parce que nous concluons le quatrième terme du rapport qu’une seule intuition nous a montré entre le premier et le second.

E2P46Dm : … ce qui donne la connaissance de l’infinie et éternelle essence de Dieu est commun à toutes choses, et se trouve également dans la partie et dans le tout : d’où il suit (par la Propos. 38, partie 2) que cette connaissance est adéquate. C. Q. F. D.

E2P47S : Nous voyons par là que l’essence infinie de Dieu et son éternité sont choses connues de tous les hommes. Or, comme toutes choses sont en Dieu et se conçoivent par Dieu, il s’ensuit que nous pouvons de cette connaissance en déduire beaucoup d’autres qui sont adéquates de leur nature, et former ainsi ce troisième genre de connaissance dont nous avons parlé (dans le Schol. 2 de la Propos. 40, partie 2), et dont vous aurons à montrer dans la partie cinquième la supériorité et l’utilité. Mais comme tous les hommes n’ont pas une connaissance également claire de Dieu et des notions communes, il arrive qu’ils ne peuvent imaginer Dieu comme ils font les corps, et qu’ils ont uni le nom de Dieu aux images des choses que leurs yeux ont coutume de voir, et c’est là une chose que les hommes ne peuvent guère éviter, parce qu’ils sont continuellement affectés par les corps extérieurs.

E5P12Dm : Les objets que nous concevons clairement et distinctement, ce sont les propriétés générales des choses, ou ce qui se déduit de ces propriétés.

Traduction Pautrat : Les choses que nous comprenons clairement et distinctement, ou bien sont des propriétés communes des choses, ou bien se déduisent d’elles…

E5P23S : Les yeux de l’âme, ces yeux qui lui font voir et observer les choses, ce sont les démonstrations.

E5P23Dm : … les idées qui sont en nous claires et distinctes ou qui se rapportent à la connaissance du troisième genre (voy. le Schol. 2 de la propos. 40, part. 2) ne peuvent résulter des idées mutilées et confuses, lesquelles (par le même Schol.) se rapportent à la connaissance du premier genre, mais bien des idées adéquates, c’est-à-dire (par le même Schol.) de la connaissance du second et du troisième genre. Ainsi donc (par la Déf. 1 des passions) le désir de connaître les choses d’une connaissance du troisième genre ne peut naître de la connaissance du premier genre, mais il peut naître de celle du second. C. Q. F. D.

E5P36CS : … et j’ai pensé qu’il était à propos de faire ici cette remarque, afin de montrer par cet exemple combien la connaissance des choses particulières, que j’ai appelée intuitive ou du troisième genre (voyez le Schol. 2 de la Propos. 40, part. 2), est préférable et supérieure à la connaissance des choses universelles que j’ai appeler du second genre ; car, bien que j’aie montré dans la première partie d’une manière générale que toutes choses (et par conséquent aussi l’âme humaine) dépendent de Dieu dans leur essence et dans leur existence, cette démonstration, si solide et si parfaitement certaine qu’elle soit, frappe cependant notre âme beaucoup moins qu’une preuve tirée de l’essence de chaque chose particulière et aboutissant pour chacune en particulier à la même conclusion.


Serge
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