KORTO a écrit :"Si le devenir est passage du non-être à l'être, puis de l'être au néant, il est clair qu'il n'y a en Dieu aucun devenir puisqu'il est affirmation absolue de l'être. Dieu est éternel : en lui, tout ce qui pour nous "a existé" ou "n'existe pas encore" est toujours ou déjà, de toute éternité. Tant que nous ne nous élevons pas assez attentivement à l'idée de la totalité infinie que constitue Dieu, nous objectivons notre impression de devenir, un peu comme le soleil paraît objectivement tourner autour de la terre pour un observateur terrestre tant qu'il ne s'est pas élevé à la pensée globale du système solaire." H.D.
Significatif comme certains spinozistes postulent et imposent l'éternité, l'infini et la toute puissance à Dieu pour mieux lui refuser le devenir et la transcendance et pour mieux le réduire à la matière et à la nature.
Il ne s'agissait pas dans le propos cité d'argumenter l'éternité de Dieu en tant que telle mais d'expliquer l'absence de devenir que cela implique, pas si évidente que cela pour nombre d'auteurs qui admettent pourtant l'éternité divine. Je supposais que vous admettiez par principe l'éternité divine. On peut discuter de la démonstration qu'en fait Spinoza si vous voulez.
Quant à inclure le devenir dans la toute puissance divine, je vous ai pourtant cité des arguments forts d'un des Pères de l'Eglise, qu'en faites vous ? Expliquez nous comment "ne pas être" (ne plus être ou ne pas être encore comme l'implique le devenir) peut être une puissance. La puissance c'est ne pas être empêché d'être. Comment un être en devenir ne serait-il pas limité dans sa puissance puisque n'étant plus, il lui est impossible d'être au présent ce qu'il a été par le passé et qu'il ne peut plus par définition être - puisque nous sommes, par hypothèse, dans le devenir.
Plus d'hypocrisie alors : reconnaissons l'immanentisme radical et l'athéisme de Spinoza et un monde de rapports de forces mécaniques sans valeurs, sans idéal et sans espoir.
Immanentisme radical, ce n'est pas moi qui vous dirai le contraire. Athéisme, j'ai déjà donné un certain nombre d'arguments contre cette appellation chez Spinoza, que je considère plutôt comme "déiste" au sens où il y a bel et bien admission d'une existence infiniment supérieure à celle de l'homme (cf. notamment la deuxième démonstration de E1P11), mais cette supériorité n'est effectivement pas transcendante, exclusive, verticale mais immanente, inclusive, horizontale.
Quant à faire le déçu parce qu'il n'y aurait pas onto-théologiquement d'espoir chez Spinoza, vous êtes formidable, l'appendice de la première partie ne vous permettait plus d'avoir aucune illusion à ce sujet.
Mais cela ne fait pas de la philosophie de la nécessité universelle, une philosophie de la nécessité aveugle : l'intellect infini de Dieu est la conscience de tout ce qui existe. Et les valeurs ou l'idéal se déduisent rationnellement, donc éternellement du conatus humain, pour le conatus humain (Ethique IV), sans que cela donne à croire à je ne sais quelle garantie providentielle onto-théologique, mais tout de même, on est loin de la philosophie sadique du "faites n'importe quoi tant que vous pouvez le faire" que vous avez l'air de vouloir dénoncer avec des accents qui font penser à un Albert Burgh.
Tristes tautologies de la nature naturante et d'un conatus vide de sens. Vulgate hédoniste onfraysienne, athéologie pour les nuls. Ce Spinoza-là, alibi de nos libertaires, anarchistes, anticléricaux et négativistes de tout poil, serait bien décevant...
Vous vous égarez de plus en plus, à mesure que vous vous donnez de moins en moins la peine de justifier ce que vous avancez.
A mon humble niveau, je suis souvent en désaccord avec Onfray, mais la haine que vous semblez lui manifester montre à quel point les Lumières ne sont plus une évidence aujourd'hui... et m'engage à me ranger volontiers du côté des athées.
Dieu-univers-nature immuable et parfait ?
Et bien non. Du point de vue de l'Être, c'est à dire de ce qui s'oppose à la multitude absolue, au néant-multitude,
Un peu de logique ! Ce qui est plusieurs, n'est pas rien, de même d'ailleurs que le devenir. L'un est certes ce qui est le plus pleinement, mais de là à faire de cet intermédiaire supposé un néant, c'est abusif. Entre l'être et le néant, l'un ou le rien, il y a peut-être le multiple ou le devenir, mais de là à confondre le milieu et un des deux extrêmes...
l'Univers-Dieu est en concentration régulière, en complexification, en progrès vers l'être. Et cette complexification incontestable (matière-vie-homme-conscience-Christ-noosphère) suppose un point omega de convergence, parfait et transcendant.
Ce n'est pas de complexification que vous nous parlez, mais de hiérarchisation anthropocentrée de certains phénomènes naturels connus et d'autres inconnus. En conséquence, c'est fort contestable.
La puissance de Dieu suppose, d'autre part sa non-toute puissance, la puissance ne pouvant s'exercer absolument, à vide, mais se réalisant-contre.
Affirmation contradictoire encore une fois. Un balle de ping pong lancée dans un espace vide par hypothèse continuerait indéfiniment sur sa lancée, principe d'inertie. Pourquoi ce qu'une balle de ping pong peut faire, Dieu ne le pourrait pas ?
Dieu et son ombre, donc. La pensée et l'étendue. L'Être et la multitude en évolution. Pluie de matière et montée de vie. L'Être et néant simultanément, par le devenir. L'immanence vers la transcendance, par la liberté.
Pour avoir une ombre, il faut une source de lumière, un corps extérieur à cette lumière sur laquelle elle se réfléchit et un troisième corps sur lequel, l'ombre se projette, comme privation de lumière. Supposons, puisque vous proposez d'élever ce phénomène naturel au rang de vérité ontologique, que Dieu est la source de lumière, mais en même temps il se fait de l'ombre à lui-même et cette ombre se projette donc sur un autre être, que vous appelez l'étendue... Au delà des contradictions internes à une telle représentation, cela suppose qu'il existerait quelque chose hors de Dieu, sur quoi son ombre pourrait se projeter. Donc ce quelque chose bornerait l'essence comme l'existence de Dieu. Donc Dieu serait limité, et non absolument infini. Eh bien moi je vous dis que je conçois sans difficulté un Dieu bien plus grand que le vôtre.