Hokousai a écrit :louisa a écrit :
Je crois que c'est une erreur de penser que lorsque quelqu'un interprète une proposition autrement qu'on ne le fait soi-même, la raison d'office doit être que l'autre ne l'a pas lue avec suffisamment d'"attention".
effectivement c'est une erreur et je ne pense pas que Guéroult ai lu Spinoza avec moins d’attention que moi-même .(ni avec suffisamment d'"attention).
L attention ne suffit pas dans cette matière .
je dirais que chacun fait toujours attention autant qu'il le peut. Cela signifie que lorsqu'on interprète un passage chez Spinoza différemment, on ne peut rien faire d'autre que de maximalement expliciter les raisons ou arguments pourquoi on croit que c'est bien cela la seule interprétation correcte, quitte à accepter qu'on n'a pas encore trouvé des arguments convaincants lorsque l'autre ne semble pas en être convaincu.
hokousai a écrit :louisa a écrit :Aussi longtemps qu'on s'imagine que l'autre est méchant et nous veut du mal, on n'est que dans l'imagination, c'est-à-dire dans le premier genre de connaissance, celui des idées inadéquates, autrement dit on "pâtit".
Ecoutez là franchement, j’ai bien du mal a entrer dans votre processus .
1. cette idée va à l'encontre du sens commun ou de ce que Bardamu a pu appeler le "langage ordinaire", donc en effet, il faut se faire "un peu de mal" avant de pouvoir en comprendre la pertinence et l'éventuelle vérité ("mal" entendu ici au sens non spinoziste). Je dirais: il faut philosopher un peu.
2. je parlais de Spinoza, et non pas de moi.
Hokousai a écrit :A priori je suis neutre dans ma relation à autrui …..avec néanmoins une petite tendance Larochefoucaldienne .
Sur certains signes apparents et par principe de précaution je préfère m’imaginer que l’autre me veut du mal, il sera toujours temps de rectifier le tir (ie la ligne de défense puisqu’on ne se bat plus en duel en France ).
Si """ la vertu est la puissance même de l'homme, qui se définit par la seule essence de l'homme, c'est-à-dire qui se définit par le seul effort que fait l'homme pour persévérer dans son être """,il y lieu de se soucier de toutes les vertus puis de s’inquiéter du comportement de tous les hommes . Persévérer dans son être ne nous prémunit pas de succomber aux pires tentations .
Je dirais que mieux comprendre autrui me rend plus habile à déjouer ses ruses . Mieux le comprendre induit sûrement autant d appréhensions quant à la suite , que de joie .
Je ne nie pas le vertu de l’amour du prochain quand les conditions conviennent .
chez Spinoza l'Amour du prochain est inconditionnel. Ou plutôt: on n'est "apte" à cet Amour que dans la mesure où l'on a telle ou telle puissance de penser et d'agir, et non pas dans la mesure ou l'autre le "mériterait" (on le mérite tous, d'emblée).
C'est que l'Amour intellectuel de Dieu spinoziste consiste à "comprendre", tout simplement. Or "comprendre" une chose, pour Spinoza c'est comprendre
in fine son essence, et donc, par définition, sa vertu. Cela signifie bien évidemment qu'il faut redéfinir l'essence de tel ou tel homme, puisque désormais tout ce qui concerne ses "vices" n'y appartient plus, ou n'y appartient que de manière inadéquate.
En effet, un vice c'est une Passion, dans le spinozisme. Or toute Passion est une idée inadéquate. Cela signifie, par définition, qu'elle est causée
non pas par l'essence ou la puissance de la personne en question, mais avant tout par une chose extérieure, autrement dit cela signifie que cette personne est en train de subir une influence extérieure négative. C'est bien pourquoi on ne sait réduire une personne à ses Passions: celles-ci ne la définissent
pas de manière adéquate.
Bien sûr, cela n'implique pas qu'il faut nier qu'il existe des Passions, des vices, de la méchanceté etc. Cela implique juste qu'adopter le point de vue spinoziste c'est apprendre à séparer l'essence d'une personne de "ses" vices.
Si c'est cela l'amour du prochain, donc la "vraie règle de vie", je crois que Spinoza a eu raison de dire que c'est le noyau central de toute religion. Ayant moi-même été éduquée dans un monde catholique (pas trop hypocrite), c'est exactement ce que j'ai entendu pendant toute ma jeunesse: apprends à voir ce qui est bon chez chacun, chacun essaie de vivre et de trouver un moyen pour devenir plus heureux, personne ne veut du mal à autrui sans d'abord s'être senti attaqué lui-même, etc.
Bien sûr, Spinoza va un pas plus loin au sens où il tire les conséquences ultimes d'une telle "morale". Et là on rentre vraiment dans la philosophie, c'est-à-dire pour pouvoir comprendre ces conséquences
il faut avoir appris à mettre en question ses propres évidences. Sinon on ne peut que constater que ce qu'on pense tous (que certains gens sont méchants "par nature") ne semble pas correspondre au spinozisme et
que donc ce Spinoza doit avoir été un "drôle d'oiseau" ...
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