Couple et relation Pensée-Étendue : état des lieux ?

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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Couple et relation Pensée-Étendue : état des lieux ?

Messagepar sescho » 10 juin 2013, 15:55

J’ouvre un fil spécifique à cette question monumentale, et pourtant non résolue a priori, qui est (entre autres) apparue dans le fil Le MOI, et qui – outre d’être un monument à elle-seule, donc – s’écarte quelque peu (mais il y a évidemment un lien) du thème de ce fil.

Pour lancer la chose, juste quelques renvois ici (outre au fil cité en vue d’en prendre éventuellement la suite par citation) :

wikipedia :

Philosophie de l'esprit

Problème corps-esprit

Dualisme (philosophie de l'esprit)

Le fil est réputé pouvoir sortir du strict modèle de Spinoza, étant accordé (c’était là l’état dans le fil cité), au moins comme hypothèse, que ce modèle est logiquement contestable au niveau des attributs de la substance mêmes (dualisme persistant malgré les valeureux efforts de Spinoza pour redresser le modèle de Descartes ; étant évidemment entendu que personne n’est tenu de le contester ici, mais juste invité à argumenter logiquement.)


Sur Spinoza et nous (non exhaustif a priori) :

Le « parallélisme » : une erreur de Spinoza ? et renvois contenus en première page.

En complément :

questions

Peut-on être un spinoziste modéré, ou spinoziste athée ?

la question du corps (+)

Indirectement :

D'une Substance, deux physiques?
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Messagepar sescho » 18 juin 2013, 10:09

L’idée de base est que l’on fait une erreur dès que l’on sépare Pensée et Matière même au sein du Monisme, soit dans les 3 cas de figure suivants : 1) Spiritualisme : il n’y a que de Pensée. 2) Matérialisme : il n’y a que Matière. 3) Parallélisme : il y a distinction absolue, et en même temps aucune distinction (ce paradoxe indiquant déjà qu’il y a un problème) entre Pensée et Matière (ou Étendue.) Cette dernière option, de Spinoza, est considérée comme supérieure entre toutes, sans alternative meilleure connue, a priori.

Concernant la 3), la contestation devient subtile : c’est une erreur de mettre la distinction au niveau de la Substance, mais il se pourrait bien qu’elle soit irréductible au niveau de l’Homme. Et c’est pourtant ce même Homme qui a conscience de la Substance unique, en amont de tout…

- Et c’est aussi ce même Homme qui a conscience de Matière... La question subséquente vient immédiatement : Est-il raisonnable de déconnecter Matière de la conscience qui la révèle ?

Réponse : a priori, non : on ne peut pas déconnecter l’observation de Matière de l’observation en général, soit Pensée. Une autre façon de le dire est qu’il y a Sujet – qui est Pensée – et Objet – qui est Matière – mais que le couple Sujet-Objet ne PEUT PAS être dissocié…

… mais quand-même être distingué…

- On se trouverait donc dans un modèle du type suivant, grossièrement esquissé (très proche de celui de Spinoza, aux attributs près) – pas un mot qui ne soit piégeux… :

Il n’y a que « Enairgie » (ce n’est pas une faute d’orthographe ; on aurait pu prendre alternativement « Matiaire », ou « PenMat », etc.), autrement dit une « substance à un seul attribut (par définition substantiel, pas humain) » en paraphrasant Spinoza. Mais comme « un seul attribut » détruit la pertinence d’introduire la notion d’attribut : il n’y a que la substance « Enairgie. » – autrement dit Dieu, sans attributs au sens spinozien.

Au sein de cette unique substance, une relation particulière s’établit entre différentes de ses « parties », qui se traduit par un « point de vue subjectif » ou « conscience » d’une partie qui « révèle à elle-même » – dans cette relation même – les autres parties en relation, dites « corps, » (« étendues » en référence à la vision stéréoscopique ; « objectives » en relation avec « le point de vue subjectif » précédent.) En seconde approche – elle est bien seconde seulement du « point de vue subjectif » ou « conscience » précédent – « conscience » apparaît liée elle-même à une manifestation de type « corps » particulière (qui apparaît donc secondairement s’étendre à tout.)

Pour autant, le « point de vue subjectif de la partie » est irréductiblement subjectif, quand-bien même associée à un corps particulier, et donc absolument non assimilable au « vu par la partie, » savoir les corps, irréductiblement objectifs. Toutefois, malgré cet « absolument », la distinction ne peut être extrapolée à l’unité de la Substance, mais doit rester au-dessous…

Note : Il est bien clair par ailleurs que l’Homme n’est qu’un animal d’un type particulier, un singe nu, et qu’il n’y a aucune raison pour qu’il soit l’ « aboutissement ultime » de la Nature. De même qu’il ne concède pas au Bonobo la puissance de penser de l’Homme, il ne peut se l’accorder à lui-même. En outre, de n’être qu’une partie d’un Tout unique qu’il perçoit lui interdit d’emblée, intuitivement, d’égaler ce Tout par la conscience que lui confère précisément son état de partie…
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Messagepar sescho » 25 juil. 2013, 22:34

Apports : Schopenhauer

Schopenhauer (qui commente régulièrement Spinoza) m’est apparu une référence majeure sur le sujet. Toutefois, je n’ai, loin s’en faut, pas lu tout Schopenhauer (je possède, outre quelques opuscules, De la quadruple racine du principe de raison suffisante et Les deux problèmes fondamentaux de l’éthique) et je dois bien avouer qu’attaquer les quelques 2 500 pages du Monde comme volonté et comme représentation me rebute quelque peu… ; aussi si quelqu’un a des connaissances de fond étendues sur Schopenhauer en association avec le sujet, elles seront les bienvenues…

En relation directe au sujet qui nous occupe chez Spinoza :

Schopenhauer a écrit :De la quadruple racine du principe de raison suffisante, Chap. 4 :

Spinoza qui n'avait pas tiré la chose au clair et qui n'était donc pas encore parvenu à des notions distinctes à ce sujet, avait cependant très bien compris que la relation nécessaire entre le sujet et l'objet leur est tellement essentielle qu'elle est la condition absolue de leur conception possible ; c'est pourquoi il l'a présentée comme une identité du principe connaissant et du principe étendu, dans la substance qui seule existe.

Extrait déjà cité, important, qui fonde la conscience (con-science ; con-naissance) en même temps que la relation sujet-objet :

Schopenhauer a écrit :(DU PRIMAT DE LA VOLONTÉ DANS LA CONSCIENCE DE SOI, Chapitre XIX des Suppléments au Monde comme volonté et comme représentation) :

I. — Tout comme la conscience d'autre chose, c'est-à-dire la perception du monde extérieur, la conscience de nous mêmes contient, ainsi qu'il est dit ci-dessus, un élément connaissant et un élément connu sans quoi ce ne serait plus une conscience. Car la conscience consiste dans la connaissance : or la connaissance implique un sujet qui connaît et un objet qui est connu c'est pourquoi la conscience de nous-mêmes serait impossible, sans cette opposition de la partie qui connaît et d'une autre partie essentiellement distincte, qui est connue. De même qu'il n'y a pas d'objet sans sujet, de même il n'y a pas de sujet sans objet, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de connaissance, sans quelque chose qui diffère du sujet qui le connaît. Une conscience donc, qui ne serait qu'intelligence, est impossible.

Complément :

Schopenhauer a écrit :De la quadruple racine du principe de raison suffisante, revu par l’auteur, Chap. 7 :

La dernière classe d'objets pour la faculté de représentation qui nous reste à considérer est d'une nature toute spéciale, mais très importante : elle ne comporte, pour chacun, qu'un seul objet ; c'est l'objet immédiat du sens interne, le sujet de la volition qui est objet pour le sujet connaissant et qui n'est d'ailleurs donné qu'au sens interne ; pour cette raison, il n'apparaît pas dans l'espace, mais seulement dans le temps, et là même, nous le verrons, avec une restriction d'importance.

SUJET DE LA CONNAISSANCE ET OBJET

Toute connaissance suppose forcément un sujet et un objet. C'est pourquoi même la conscience de soi n'est pas absolument simple ; elle se divise, comme celle du monde extérieur (c'est-à-dire de la faculté d'intuition), en quelque chose qui connaît et quelque chose qui est connu. Ici, ce qui est connu se présente entièrement et exclusivement comme volonté.
Le sujet ne se connaît, par conséquent, que comme sujet voulant, mais pas comme sujet connaissant. Car le moi qui se représente, le sujet de la connaissance ne peut jamais devenir lui-même représentation ou objet, parce que, comme corrélat nécessaire de toutes les représentations, il est leur condition même ; c'est à lui que s'appliquent les belles paroles du livre sacré des Upanishads : « Il ne peut être vu : il voit tout ; il ne peut être entendu : il entend tout ; il ne peut être su : il sait tout ; il ne peut être connu : il connaît tout. En dehors de cet être qui voit, qui sait, qui entend et qui connaît, il n'existe aucun autre être » (Oupnekhat, vol.I, p. 202.)
C'est pourquoi il n'existe pas de connaissance de la connaissance, car il faudrait pour cela que le sujet se distingue de la connaissance et puisse quand même connaître la connaissance, ce qui est impossible.
A l'objection : « non seulement je connais, mais je sais aussi que je connais », je répondrais que ces deux expressions « je sais que je connais » et « je connais » ne diffèrent que dans les mots. « Je sais que je connais » signifie la même chose que « je connais » sans détermination plus précise, ne dit rien d'autre que « moi ». Si votre connaissance et le savoir que vous en avez sont deux choses distinctes, essayez donc une fois de les avoir chacune séparément, c'est-à-dire de connaître à un certain moment sans en avoir conscience, puis une autre fois de savoir que vous connaissez sans que ce « savoir » soit en même temps le « connaître ». On peut bien faire abstraction de toute connaissance particulière et arriver ainsi à la proposition « je connais » qui est la dernière abstraction dont nous soyons capables ; mais cette proposition est identique avec celle-ci : « il existe des objets pour moi » et cette dernière est identique avec cette autre : « je suis sujet » qui ne renferme autre chose que le simple « moi ».



SUJET DE LA VOLITION

D'après ce qui précède, le sujet connaissant ne peut donc jamais être connu, être objet ou représentation. Toutefois, comme nous n'avons pas seulement une connaissance du monde extérieur (par l'intuition sensible), mais une connaissance intime de nous-mêmes et qu'il est de l'essence de toute connaissance de supposer un objet connu et un sujet connaissant, ce que nous connaissons en nous comme objet de connaissance, ce n'est donc pas le sujet connaissant, mais le sujet voulant, le sujet de la volition, la volonté. En partant de la connaissance, on peut dire que la proposition « je connais » est une proposition analytique. En revanche, « je veux » est une proposition synthétique, précisément : a posteriori donnée par l'expérience, ici l'expérience interne (c'est-à-dire seulement dans le temps). C'est en ce sens que le sujet de la volonté pourrait être pour nous un objet. Quand nous regardons en nous, nous nous trouvons toujours voulant. Mais la volonté a un grand nombre de degrés, allant du plus faible désir jusqu'à la passion ; et j'ai souvent expliqué, entre autres dans les Problèmes fondamentaux de l'éthique (p. 11) et ailleurs encore, que non seulement toutes les émotions, mais aussi tous les mouvements intérieurs qui sont compris dans le concept large de sentiment sont des états de la volonté.
Mais l'identité du sujet de la volition avec le sujet connaissant qui fait (nécessairement même) que le mot « moi » les renferme et les désigne tous les deux (nécessairement), constitue le nœud de l'univers et elle est, en conséquence, inintelligible. Seuls les rapports entre les objets, en effet, nous sont compréhensibles ; et deux objets ne peuvent en former un seul que s'ils sont des parties d'un tout. Mais ici, où il s'agit du sujet, les règles de la connaissance des objets ne sont plus valables et une identité réelle de ce qui connaît avec ce qui est connu comme voulant, c'est-à-dire du sujet avec l'objet, est directement donnée. Qui se représentera à quel point cette identité est inexplicable sera d'accord avec moi pour l'appeler le miracle par excellence.
De même que l'entendement correspond dans le sujet à la première classe de représentations, la raison à la seconde et la sensibilité pure à la troisième, nous trouvons maintenant pour cette quatrième classe le sens interne ou, de façon générale, la conscience de soi.

A noter que lorsque Schopenhauer dit que « je sais que je connais » est compris dans la connaissance même, ceci constitue le sujet comme sujet, et de la manière la plus immédiate qui puisse être ; donc sans égard pour la volonté en premier examen (« ne dit rien d’autre que « moi » » est d’ailleurs très clair à ce sujet ; il n’y a sur ce point aucune différence avec Stephen Jourdain – qui sera interrogé par la suite... En revanche foin ici de « sujet pur » - et d’ « objet pur » de même, bien sûr.) On doit donc en déduire que si le sujet ne peut pas par nature se connaître en tant qu’objet connaissant, il se connaît connaissant (immédiatement, dans un seul et même mouvement, sans retour (?)…) Ce point est évidemment d’une portée éthique majeure : toute objectivation du sujet, sur ce plan tout au moins, relève immédiatement de l’aberration : le sujet est sujet, et jamais objet … Toutefois, nous dit Schopenhauer, en tant qu’expression de la volonté (« force vitale » ; « énergie cosmique »…) le « sujet » est objectivable (quoique cette expression pose déjà problème, car si c’est objectivable ce n’est déjà plus à proprement parler le sujet…)

Accessoirement, sur le fait même de la quadruple racine (terme pris comme « origine ») du principe de raison suffisante, je suis plutôt perplexe… Quatre c’est beaucoup trop… Seul « un » ne l’est pas, en fait… Il semble que Schopenhauer parte du couple sujet-objet en « oubliant » quelque peu (partiellement, puisqu’il accouple bien, sans séparation possible, sujet et objet) que la base première de ce couple, la plus générale, c’est son unité…

Le principe général :

Par Leibniz : « En vertu du principe de la raison suffisante, nous considérons qu’aucun fait ne saurait se trouver vrai ou existant, aucune énonciation véritable, sans qu’il y ait une raison suffisante pourquoi il en soit ainsi et non pas autrement. »

Par Wolff (retenu en première approximation par Schopenhauer comme la définition la plus générale) : « Rien n’est sans une raison qui fait que cela soit plutôt que cela ne soit pas. »

Schopenhauer a écrit :De la quadruple racine du principe de raison suffisante :

Notre conscience connaissante, qui se présente comme sensibilité externe et interne (réceptivité), entendement et raison, se décompose en sujet et objet et ne contient rien d'autre. Être objet pour le sujet ou être notre représentation, c'est la même chose. Toutes nos représentations sont des objets du sujet, et tous les objets du sujet sont nos représentations. Mais il se trouve que toutes nos représentations sont entre elles dans une liaison soumise à une règle et dont la forme est a priori déterminable, liaison telle que rien de subsistant pour soi, rien d'indépendant, rien qui soit isolé et détaché ne peut être objet pour nous. C'est cette liaison qu'exprime, dans sa généralité, le principe de raison suffisante. Or, quoique cette liaison, comme nous pouvons le conclure de ce qui a été dit jusqu'ici, prenne des formes diverses, selon les espèces d'objets pour la désignation desquelles le principe de raison change à son tour d'expression, elle conserve cependant toujours l'élément commun à toutes ces formes qu'affirme notre principe pris dans son sens général et abstrait. Ce sont donc les rapports qui sont à son fondement, rapports que j'exposerai par la suite avec davantage de détails, que j'ai appelés les racines du principe de raison suffisante. Or, à examiner les choses de plus près et suivant les lois de l'homogénéité et de la spécification, ces rapports se divisent en classes déterminées, très différentes les unes des autres, qui peuvent être ramenées à quatre, en se réglant sur les quatre classes dans lesquelles se répartit tout ce qui peut devenir objet pour nous, c'est-à-dire toutes nos représentations. Ces classes seront exposées et traitées dans les quatre chapitres qui suivent. Nous verrons le principe de raison suffisante se présenter différemment dans chacune de ces classes, mais se faire connaître en même temps partout comme le même et comme issu de la racine que l'on vient d'indiquer en ce qu'il autorise partout la formule donnée ci-dessus.

[En rapport avec la nécessité, vers la fin de l’ouvrage :]

… Il existe donc une quadruple nécessité, correspondant aux quatre formes du principe de la raison : 1°) la nécessité logique, en vertu du principe de connaissance qui fait que si l'on a admis les prémisses, on ne peut refuser d'accorder la conclusion ; 2°) la nécessité physique, correspondant à la loi de causalité, et en vertu de laquelle dès que la cause s'est présentée, l'effet ne peut manquer ; 3°) la nécessité mathématique, correspondant au principe de la raison d'être, et, en vertu de laquelle tout rapport énoncé par un théorème géométrique vrai est tel que celui-ci l'expose et tout calcul exact est irréfutable ; 4°) la nécessité morale, en vertu de laquelle tout homme, tout animal, quand le motif se présente, est contraint d'accomplir l'action qui, seule, convient à son caractère inné et immuable, et qui doit aussi inévitablement se produire que tout autre effet d'une cause, bien que cet effet soit moins facile à prédire que les autres, vu la difficulté de scruter et de bien connaître le caractère empirique individuel et la sphère intellectuelle qui l'accompagne ...

Les 4 racines sont présentées antérieurement comme (dans l’ordre d’exposition) :

1 - Principe de raison suffisante du devenir : loi de causalité (transitive : succession dans le temps), ayant trait aux changements dans le monde matériel, dans le temps et espace comme conditions a priori de la sensibilité.
2 - Principe de raison suffisante de la connaissance : logique, raison, des prémisses vers la conséquence. Ne produit que de la conviction. Tout concept sans exception doit être validé par l’intuition.
3 - Principe de raison suffisante de l’être : intuitions des êtres mathématiques (arithmétique, géométrie) et de leurs propriétés.
4 - Principe de raison suffisante de l’action : loi de motivation (du sujet lui-même.)

Pour moi, il n’y a bien qu’un seul principe à la base, tel que donné en tête (plutôt la version de Leibniz, d'ailleurs), et différentes traductions ensuite (même si le cas de la Mathématique se place assez mal) : « ce qui est EST » (et ne peut être qu’à la condition d’être déterminé tel et pas autrement, sinon c’est le pur chaos, inintelligible) ou identiquement « Dieu est » (« Je suis ce qui est » ; comme substance en soi et par soi nécessairement immuable, éternel), ou encore « rien ne vient de rien » (et donc tout ce qui est est éternel.) La logique (racine 2) c’est à la base le principe d’identité (« ce qui est EST ») ; la causalité transitive (racine 1) est imaginaire : une représentation beaucoup plus juste se tient dans les lois (propositions de l’Éthique, par exemple), qui renvoie à la causalité immanente, ou raison (la transition inverse est opérée par Spinoza par E1P28), rejoignant le libellé de la racine 4. Ne reste donc plus comme exotique que la racine 3… ; autrement dit : « de l’être de la Mathématique… » qui ne tiendrait pas dans la racine 2…
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Messagepar hokousai » 30 juil. 2013, 23:44

Parallélisme : il y a distinction absolue, et en même temps aucune distinction (ce paradoxe indiquant déjà qu’il y a un problème) entre Pensée et Matière (ou Étendue.) Cette dernière option, de Spinoza, est considérée comme supérieure entre toutes, sans alternative meilleure connue, a priori.
Je ne pense pas qu'il y ait de distinction absolue. Spinoza subit les conséquences de sa systématicité.
Si nous partons des affects et de l' union esprit/ corps. Est- ce qu' avoir mal aux dents c' est de la pensée ? C' est à dire absolument de la pensée ?

Je pense que Spinoza subit la pensée de l'époque et du contexte dualiste occidental antérieur ( esprit /matière ) amendée en substance pensante et étendue par Descartes.
Il tente de résister et de poser une autre manière de penser ce qui se voit dans maints passages sur l' union, les affects, la corporéité. Ainsi s' explique l'absence de causalité entre deux prétendus domaines ou substances qui sont de son point de vue la même chose ( entrevue sous deux aspects ).

C' est donc la manière de voir sous deux aspects qui est suspecte et qui pourrait être réformée. Malheureusement cette vision sous deux aspects semble à Spinoza difficilement contournable. C' est ainsi que nous imaginons.

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Messagepar sescho » 31 juil. 2013, 17:15

hokousai a écrit :Je pense que Spinoza subit la pensée de l'époque et du contexte dualiste occidental antérieur ( esprit /matière ) amendée en substance pensante et étendue par Descartes.

...

C' est donc la manière de voir sous deux aspects qui est suspecte et qui pourrait être réformée. Malheureusement cette vision sous deux aspects semble à Spinoza difficilement contournable. C' est ainsi que nous imaginons.

Entendez-vous qu'aujourd'hui nous aurions la solution ?

Parce que vu de chez moi, ce n'est pas que pour Spinoza que le problème s'est posé : il se pose toujours...

Non seulement l'Homme - a fortiori un système de pensée qui n'en est qu'un sous-ensemble comme la Physique - n'atteindra jamais l'extension de Dieu-Nature, n'en étant qu'une partie, mais avant tout de nulle façon l'objectif ne peut "expliquer" le subjectif...

Or la pensée, en première instance au moins, c'est le sujet ; la matière, c'est l'objet (les corps - leur surface en relief plus exactement - sont représentés au premier niveau de pensée)... et il n'y a pas d'objet sans sujet : c'est un couple...

En passant, un examen détaillé de ce que nous appelons "pensée" en général me semble requis... ; entre la sensation pure et le maniement de concepts abstraits et autres imaginations basées sur la mémoire à long terme plus ou moins structurée...

Schopenhauer encore, dans le Monde comme Volonté et comme Représentation (tiré de http://fr.wikisource.org/wiki/Le_Monde_comme_volont%C3%A9_et_comme_repr%C3%A9sentation/I/7 ; j'ai finalement commandé une traduction plus récente, mais elle ne m'est pas encore parvenue) :

Schopenhauer a écrit :Aux précédentes considérations peut-être convient-il d’ajouter la suivante : jusqu’ici notre point de départ n’a été pris ni dans l’objet ni dans le sujet, mais dans la représentation, phénomène où ces deux termes sont déjà contenus et impliqués ; le dédoublement en objet et sujet est, en effet, la forme primitive essentielle et commune à toute représentation. C’est uniquement cette dernière que nous avons envisagée ; ensuite, renvoyant pour le fond des idées à notre précédente étude, introduction naturelle de ce livre, nous avons passé en revue les autres formes, temps, espace et causalité, qui dépendent de la première : ces formes appartiennent proprement à l’objet en tant qu’objet ; mais celui-ci, à son tour, est essentiel au sujet en tant que sujet ; il en résulte que le temps, l’espace et la causalité peuvent aussi bien être dérivés du sujet et connus a priori : à ce point de vue, ils représentent la limite commune du sujet et de l’objet. Toutes ces formes se laissent d’ailleurs ramener à une commune expression, le principe de raison, ainsi que je l’ai exposé en détail dans ma dissertation, préambule nécessaire du présent ouvrage. C’est par cette conception nouvelle que mes vues diffèrent absolument des doctrines philosophiques émises jusqu’ici : ces doctrines, partant toujours soit de l’objet, soit du sujet, s’efforçaient ensuite d’expliquer l’un par l’autre, au nom du principe de raison ; pour moi, au contraire, je soustrais à la juridiction de ce principe le rapport du sujet et de l’objet, et ne lui laisse que l’objet.

On pourrait croire que cette répartition des systèmes en deux catégories opposées laisse échapper la philosophie qui a paru de nos jours sous le nom de philosophie de l’identité ; celle-ci, en effet, ne prend, à vrai dire, son point de départ ni dans l’objet, ni dans le sujet, mais dans un troisième principe, l’absolu, révélé par une intuition rationnelle, principe qui n’est ni objet ni sujet, mais identité des deux. Certes je n’oserai me permettre d’avoir un avis ni sur cette auguste identité, ni sur l’absolu lui-même, dépourvu que je suis de toute intuition rationnelle ; je hasarderai pourtant un jugement qui m’est suggéré par les propres déclarations des partisans de cette intuition rationnelle (car ce sont là choses accessibles même aux profanes) : je prétends que la dite philosophie n’est pas affranchie de la double erreur signalée dans la précédente opposition. Cette identité prétendue du sujet et de l’objet, identité qui, se dérobant à la connaissance, est découverte seulement par une intuition intellectuelle, ou par une absorption dans le sujet-objet, n’empêche pas la philosophie en question d’être frappée de la double erreur signalée plus haut, qu’elle présente sous les deux formes opposées. Elle se divise, en effet, elle-même en deux écoles : l’une, l’idéalisme transcendantal ou doctrine du moi de Fichte, qui, au nom du principe de raison, tire l’objet du sujet, comme un fil qu’on déviderait peu à peu ; l’autre, qui est la philosophie de la nature, fait sortir par degrés le sujet de l’objet par une méthode dite de construction ; si je juge de cette construction, où j’avoue ne pas voir très clair, par le peu que j’en saisis, elle me paraît être une marche progressive réglée sous des formes diverses par le principe de raison. Je renonce d’ailleurs à pénétrer la science profonde que contient cette philosophie ; dépourvu que je suis de toute intuition rationnelle, toute doctrine qui suppose une telle intuition est pour moi un livre scellé des sept sceaux ; et cette incapacité va si loin, que (chose plaisante à avouer) ces enseignements d’une si grande profondeur me font toujours l’effet d’énormes gasconnades, terriblement assommantes par-dessus le marché.

Les systèmes qui prennent dans l’objet leur point de départ traitent, en général, le problème du monde et de ses lois, d’après les données de l’intuition ; toutefois, la base de leurs spéculations n’est pas toujours ce monde lui-même, ou son principe premier, la matière. Il vaut mieux, je crois, pour cette raison, répartir ces systèmes dans les quatre classes que j’ai distinguées dans ma Dissertation. À la première, adoptant comme principe le monde réel, appartiendraient Thalès et les Ioniens, Démocrite, Épicure, Giordano Bruno et les matérialistes français. À la seconde, qui prend pour point de départ la notion tout abstraite de substance, réalisée seulement dans la définition qu’on en donne, se rattacheraient Spinoza et, avant lui, les Éléates. La troisième classe, qui choisit comme donnée première le temps ou le nombre, comprendrait les pythagoriciens et la philosophie chinoise du Y-King. Enfin, dans la quatrième, pour laquelle le premier principe est un acte libre motivé par l’entendement, viendraient se ranger les scolastiques qui professent la doctrine d’une création ex nihilo résultant de la volonté d’un être personnel distinct du monde.

La philosophie objective, lorsqu’elle se présente sous la forme du matérialisme pur, est, au point de vue de la méthode, la plus conséquente de toutes, celle dont le développement peut être le plus complet. Ce système pose d’abord l’existence absolue de la matière, et par suite celle de l’espace et du temps, supprimant ainsi le rapport de la matière avec le sujet, rapport où cependant la matière puise son unique réalité. Puis, appuyé sur la loi de causalité, qu’il prend pour un ordre de choses en soi, pour une veritas æterna, il poursuit sa marche, sautant encore par-dessus l’entendement, dans lequel et par lequel seul la causalité existe.

Cela fait, il cherche à découvrir un état primitif et élémentaire de la matière, dont il puisse tirer par un développement progressif tous les autres états, depuis les propriétés mécaniques et chimiques, jusqu’à la polarité, la vie végétative et enfin l’animalité. Si l’on suppose l’entreprise couronnée de succès, le dernier anneau de la chaîne sera la sensibilité animale, ou la connaissance, qui apparaîtra ainsi comme une simple modification de la matière, modification produite en vertu de la causalité.

Admettons que nous ayons pu suivre jusqu’au bout et sur la foi des représentations intuitives l’explication matérialiste : une fois arrivés au sommet, ne serions-nous pas pris soudain de ce rire inextinguible des dieux de l’Olympe, lorsque, nous éveillant comme d’un songe, nous ferions tout à coup cette découverte inattendue : que le dernier résultat si péniblement acquis, la connaissance, était déjà implicitement contenu dans la donnée première du système, la simple matière ; ainsi, lorsque nous nous imaginions avec le matérialisme penser la matière, ce que nous pensions en réalité, c’était le sujet qui se la représente, l’œil qui l’aperçoit, la main qui la touche, l’esprit qui la connaît.

Alors se révèle cette étonnante pétition de principe de la doctrine, où le dernier anneau apparaît inopinément comme le point d’attache du premier ; c’est une chaîne sans fin, et le matérialiste ressemble au baron de Munchhausen qui, se débattant dans l’eau, monté sur son cheval, l’enlève avec ses jambes et s’enlève lui-même par la queue de sa perruque ramenée en avant. L’absurdité intrinsèque du matérialisme consiste donc à prendre comme point de départ un élément objectif, qu’il engendre finalement au terme de ses explications. Cet élément objectif, il le voit soit dans la matière considérée in abstracto, comme pure idée, soit dans la matière déjà revêtue de sa forme propre et telle qu’elle est donnée dans l’expérience, par exemple les corps simples de la chimie, avec leurs combinaisons élémentaires. Telle est la réalité qu’il pose comme existant en soi et absolument, pour en faire sortir ensuite l’organisation et à la fin le sujet pensant ; il se flatte d’en donner ainsi une explication aussi complète que possible : la vérité est que toute existence objective est déjà, d’une manière ou de l’autre, conditionnée en tant qu’objet par le sujet et ses formes, qu’elle se trouve toujours contenir implicitement ; elle disparaît donc, si par la pensée on supprime le sujet.

Le matérialisme est un effort pour expliquer par des données médiates ce qui est donné immédiatement. Il considère la réalité objective, étendue, active, en un mot matérielle, comme un fondement si solide, que ses explications ne laissent rien à désirer, du moment qu’elles sont appuyées sur un tel principe, corroboré lui-même par la loi de l’action et de la réaction. Or, cette prétendue réalité objective est une donnée purement médiate et conditionnée ; elle n’a donc qu’une existence toute relative : la chose, en effet, a dû passer tout d’abord par le mécanisme du cerveau et être transformée par lui, entrer ensuite dans les formes de l’entendement, temps, espace, causalité, avant d’apparaître, grâce à cette dernière élaboration, comme étendue dans l’espace et agissant dans le temps. Et c’est par une donnée de cette nature que le matérialisme se flatte d’expliquer la donnée immédiate de la représentation (sans laquelle la première ne saurait exister), que dis-je ? la volonté elle-même, tandis que c’est elle, au contraire, qui rend intelligibles toutes ces forces primitives dont les manifestations sont réglées par la loi de causalité. À cette affirmation, que la pensée est une modification de la matière, il sera toujours permis d’opposer l’affirmation contraire, que la matière est un simple mode du sujet pensant, autrement dit une pure représentation. Il n’en est pas moins vrai que le but réel et la forme idéale de toute science naturelle est une explication matérialiste des choses, poussée aussi loin que possible. Or, de l’inintelligibilité reconnue du matérialisme résulte une autre vérité qui sera l’objet de considérations ultérieures : c’est qu’aucune science, au sens exact du mot (je veux dire un ensemble de connaissances systématisées à l’aide du principe de raison), n’est propre à fournir une solution définitive, ni une explication entière de la réalité ; la science, en effet, ne saurait pénétrer jusqu’à l’essence intime du monde ; jamais elle ne dépasse la simple représentation, et, au fond, elle ne donne que le rapport entre deux représentations.

...
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Messagepar hokousai » 31 juil. 2013, 19:58

Vous proposez de débattre non plus de Spinoza mais de Schopenhauer lequel est très influencé par Kant. Schopenhauer pose les questions comme il l'entend, son idée force de "représentation" est kantienne. L'idéalisme allemand est estimable mais ne me parait pas vraiment compatible avec Spinoza.

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Messagepar sescho » 01 août 2013, 10:15

hokousai a écrit :Vous proposez de débattre non plus de Spinoza mais de Schopenhauer...

Non, ce n'est pas cela : il s'agit de philosopher ("Philosophie" et non plus seulement "Histoire de la Philosophie", comme l'a fait remarquer Henrique.) J'ai pendant des années, jusqu'à il y a peu - sauf quelques incises par-ci par-là -, uniquement cherché à comprendre le fond de Spinoza, et donc à le "restituer" avec la plus grande justesse possible (ce qui implique - ce n'est pas un choix, bien au contraire - en particulier de s'opposer à une masse incroyable d'interprétations, disons, marginalement défendables.) Aujourd'hui, je cherche, entre autres, à aller au-delà des points qui chez Spinoza m'apparaissent poser problème pour voir si une réponse plus appropriée a été dégagée. Le plus fondamental de ces sujets à plusieurs points de vue (base de l'ontologie, amorce de l'Ethique en même temps, ...) est constitué par la notion d'attribut, placée par Spinoza au niveau de la Nature naturante et qui pose très clairement problème selon moi. A cela s'associent évidemment les couples Pensée-Matière, Corps-Esprit et Sujet-Objet (bien connus pour être des sujets majeurs - sinon LE... - de la Philosophie ; Temps, Espace et Causalité (transitive) ne se tiennent pas loin, etc.) Dans mon esprit, la portée éthique potentielle de l'exercice est elle-aussi, conjointement, majeure.

Ceci alors même que je pense a priori qu'il n'y a pas d'issue autre que le Mystère... Encore faut-il bien le positionner là où il est...

J'ajoute que la solution est pour moi forcément très simple et intuitive... ce qui pour autant ne veut pas du tout dire "facile à voir en pleine lumière durablement"... ce qui à son tour suppose d'avoir à travailler, alors même que le résultat ne tient que dans l'"évaporation" (de l'illusion)... Cela étant, la fin ne sera jamais dans une complexité à n'en plus finir, bien au contraire.

Ceci suppose en particulier, par souci d'économie, d'aller chercher comme apport autant que possible les meilleures contributions "extérieures" à Spinoza, et de voir s'il n'y aurait pas là quelque chose qui pourrait être jugé mieux se positionner (ce qui pour moi est une pure hypothèse : je n'affirme pas qu'une position fondamentalement - donc bien au-delà de quelques difficultés du modèle à la marge - supérieure à celle de Spinoza soit possible.)

Dans ce cadre, Schopenhauer (qui tout en s'en réclamant, semble se démarquer nettement de Kant sur pas mal de choses) m'est apparu un auteur (un esprit surtout) à retenir préférentiellement. Je retiens pour après le "Grand Maître sabreur" Stephen Jourdain... Si des intervenants pensent que d'autres ont pu contribuer sur le fond du fond du sujet, il est évidemment a priori fort utile qu'ils en fassent part.

Enfin, le forum "Questions transversales" dans lequel est placé ce fil est précisément là pour confronter la position de Spinoza à celles d'autres auteurs.
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Messagepar hokousai » 01 août 2013, 15:51

Je n 'estime pas que Schopenhauer soit à retenir préférentiellement et ce parce qu'il ne me parait pas du tout de la lignée de Spinoza. A la limite Nietzsche qui vit en Schopenhauer son éducateur mais qui disait de lui qu'il s'était trompé sur tout me paraitrait plus approprié.

Mais vous élisez Schopenhauer .
Probablement parce qu'il pose les questions telles que vous vous les posez.
Schopenhauer je le connais , je pourrais à la limite le critiquer d' un point de vue spinoziste , hélas je ne connais pas vraiment S Jourdain. Comment procéder?

S' il s'agit de résoudre des questions spinozistes on ne le peut en s' abritant derrière des pensées opposées à Spinoza, systématiques et fortement charpentées ( Schopenhauer par exemple ). Car alors on ne résout pas les questions internes au spinozisme, on change de cheval.

Soit on adopte Schopenhauer et on rejette Spinoza ,
soit on on critique Schopenhauer, travail long et pénible qui peut -être permettrait de mieux comprendre Spinoza. Mais pourquoi un tel détour ? Pourquoi partir sur les bases d'un grand écart philosophique? Je le redis avec Nietzsche l' écart est nettement plus réduit ( c'est un exemple ).

Ne peut- on pas,si on veut trouver un appui, essayer de chercher dans la mouvance , dans une lignée? Oui mais il faut savoir identifier quelque chose qui chez Spinoza l' inscrit dans une lignée plutôt qu' une autre.
Si pour ma part je l'inscris dans une lignée de l' union corps /esprit je ne vais pas le confronter à l' idéalisme allemand. Je vais rechercher dans des philosophies de l'incarnation.( concept très général signifiant une immanence de la corporéité)
( par exemple Maine de Biran, Michel henry… ce sont des exemples, mais il n' y a pas foule non plus ).
Je vais chercher dans ce qui n'est pas de la philosophie de la "représentation" (peu ou prou idéaliste ).

De même que je ne pouvais pas suivre Vanleers dans son rapprochement Ignace de Loyola /Spinoza je ne peux vous suivre dans la mise en parallèle Schopenhauer /Spinoza.

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Messagepar sescho » 03 août 2013, 10:47

A Hokousai,

Je ne vois pas tout-à-fait les choses comme vous du point de vue de l'approche globale, mais pour autant cela ne me semble pas un empêchement à progresser :

- Il n'y a pas, pour moi, fondamentalement plusieurs philosophies mais une seule.

- Loin d'être sans issue possible au niveau du fondamental (après dans le détail on peut dériver à l'infini) - à l'encontre de quoi, d'ailleurs, ce ne serait qu'un petit jeu intellectuel, plus ou moins pur de surcroît la plupart du temps, comme un autre - la Philosophie a au contraire son fin mot, lequel inclut le Mystère, comme déjà dit, qu'il s'agit de placer (reconnaître) là où il convient, outre d'être purement intuitif à la base (impérativement : le mot n'est pas la chose.)

- A partir du moment où il y a un problème clair avec la notion d'attribut chez Spinoza, je ne peux me satisfaire de l'option d'en rester là, juste par facilité (sinon, autant aller aux fraises...) Ceci d'autant moins que derrière se tient la question fondamentale : "Dieu" : le début, la fin et le milieu de toutes choses chez Spinoza, dont l'intuition pure et première est exigible par principe premier... in fine... :-)

- Ceci ne signifie nullement pour moi de mettre en cause tout le travail de Spinoza. Bien au contraire, je pressens qu'on ne peut pas faire beaucoup mieux, et qu'il s'agira plutôt juste d'une reformulation éliminant les problèmes secondaires. Mais c'est à constater in fine...

- Par ailleurs, comme déjà dit, il ne s'agit pour moi de se lancer a priori dans l'analyse exhaustive d'autres œuvres que celles de Spinoza, mais seulement d'aller chercher des éléments déjà bien travaillés pour gagner du temps. Il reste cependant, il est vrai : 1) Qu'on ne peut prendre correctement d'un auteur sans l'avoir compris. 2) Qu'on ne philosophe vraiment qu'en se confrontant soi-même au fond du sujet.

- Pour Schopenhauer, j'y suis (re)venu par mots-clefs élémentaires, tout simplement : Pensée-Matière (qui est à l'origine des attributs chez Spinoza), par extension Sujet-Objet, etc.

- Pour Nietzsche (dont j'ai lu à peu près 50% des ouvrages, surtout les derniers, il y a maintenant pas mal d'années), dont j'ai pu apprécier l'extrême vigueur d'esprit mais aussi regretter une approche fortement négative, il n'est pas sorti de même, c'est tout. Le nom de Heidegger non plus ; mais je dois ajouter que, pour une raison qui ne m'est pas claire, je n'y tenais de toute façon pas. En revanche, un nom qui a été presque oublié en quelques décennies (mais apparaît aujourd'hui revenir), qui pourtant pourrait bien être associé à une très grande pertinence sur le sujet est celui de Louis Lavelle... Stephen Jourdain est un OVNI, éveillé à 16 ans et ayant passé des décennies à essayer de décrire la "chose" en utilisant le langage de la Philosophie (entre autres), par un intellect qui ne tolère pas une fraction de seconde l'intellectualisme... Il est pour moi incontournable, mais il vaut mieux être préparé...

- Bref, ce sont des choix personnels, mais guidés par le souci de traiter à fond du couple Pensée-Matière sans en passer par les attributs de la Nature naturante de Spinoza. Le sujet ce n'est pas un auteur autre que Spinoza mais bien cela.

Donc si, sur ce sujet précis, outre de nous faire connaître des travaux d'autres auteurs qui vous semblent majeurs le cas échéant, vous pouviez nous dire - au niveau du sens, bien sûr, car les mots n'ont pas de sens en eux-mêmes -, par exemple :

=> En quoi Schopenhauer s'oppose là à Spinoza.

=> En quoi Nietzsche s'oppose là à Schopenhauer.

=> Etc.

Je pense que ce serait très utile pour sélectionner les meilleurs appuis a priori (même si ce n'est pas incontournable), avant que d'entamer par soi-même le sujet...
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Messagepar hokousai » 04 août 2013, 00:03

cher Sescho

Observez ce que Schopenhauer dit (il cite une fois Spinoza dans le texte que vous proposez.)
À la seconde, qui prend pour point de départ la notion tout abstraite de substance, réalisée seulement dans la définition qu’on en donne, se rattacheraient Spinoza et, avant lui, les Éléates.

Rapprocher Spinoza des Eleates est déjà très problématique. La substance spinoziste est dynamique et en ce sens on peut tout aussi bien rapprocher Spinoza d' Héraclite. Associer Spinoza à l'immobilisme parménidien semble très excessif.
Parler d'un point de départ! Certes il faut bien commencer de partir et Spinoza ne part pas du cogito .
D' où part -il en fait ? Est -ce bien d'une notion toute abstraite ? La notion est simple, mais est -elle abstraite ? La substance est affectée infiniment et éternellement. Les affections ne sont pas rien, elles expriment l' essence de la substance .
Pas de substance sans expression .
L' expression n'a rien d' abstrait , c est bien au contraire d' abord ce à quoi nous avons accès quand l 'intellect perçoit et puis une infinité d' expression que l'intellect conçoit sans les percevoir .
Comment l'intellect perçoit- il ?
la question est là .

L'intellect ,l'intellect humain c' est l'esprit. L esprit qui de l'intérieur, dans une sorte de retrait du sensible, va intelliger par la raison .
Certes , mais pas sur du rien ou bien à partir de rien et ainsi pas de lui même comme le prétendent les idéalistes post Kantiens( Schopenhauer y compris ) c'est à dire a priori .
Pour Spinoza l' esprit est l'idée du corps .( d'abord et puis toujours en fait ) Ce à quoi nous avons accès n'est sans doute que partiel mais n' est pas une re-présentation de ce qui pourrait être présenté intégralement ( comme chose en soi )

Les étants sont réels. Exactement: les affects sont réels .
L'affect comme affection du corps et en même temps l'idée de cette affection. Idées inadéquates, peu importe, elles sont réelles. Elles ne représentent rien , elles sont la présentation même .
Une idée inadéquate à toute sa réalité dans son inadéquation. Et quand nous avons des idées adéquates toute leur réalité est dans leur adéquation.
Spinoza n'est pas dans le régime Schopenhauerien de l'illusion généralisée et universelle . Ce qui est dit être pâtir n'est pas chez Spinoza de l'ordre de l'illusion mais plutôt de l'ordre du partiel . Il faudrait inverser tout Schopenhauer et plutôt dire que je suis un mode de présentation du monde , plutôt que de dire que le monde est ma représentation .
Les parties ( l 'ordre partiel du pâtir ) n'est pas une représentation d' un quelque chose qui serait plus vrai. Puisqu'il est inadéquat il ne peut être adéquat .Mais ce pâtir n'est pas un succédanée faible de l' actif . Le pâtir est aussi parfait et réel … que l' actif . L'inadéquat est réel .
Pour le dire autrement Dieu n'est pas moins réel en tant qu'il constitue l'esprit humain qu 'en tant qu( il contient les esprits d'autres choses .

oui mais le pâtir n'est pas ce qui importe pour accéder à la béatitude .

Cela dit , même si Schopenhauer sut très bien se défendre ses idées, sur le fond je pense qu'il y a incompatibilité entre Spinoza et lui.

Je passe sur la volonté ( volonté infinie! ) thème fort critiqué par Spinoza.

( ma réponse est un peu rapide, tout cela sera à reprendre plus posément. J'aurais espéré avoir plus de temps ce soir ... mais je pars en vacance demain matin )

amicalement
hokousai


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