Essendi et esse
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Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.
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Hokusaï, vous êtes un thomiste déguisé en boudhiste. C'est pourquoi à l'encontre du texte spinozien, vous avez affirmé ailleurs dans notre précédente discussion que la substance était antérieure à ses attributs, comme l'écrit Aristote en Métaphysique G. Toute votre "lecture" (si l'on peut dire) cherche à torturer le texte spinozien pour l'intégrer à l'interprétation thomiste d'Aristote. Par ailleurs de ce que vous venez d'écrire (conforme à Thomas en ce que vous asimmilez l'être et l'existence, quitte à exclure ce que Spinoza appelle un être ou un étant) tout lecteur de Spinoza en perçoit l'absurdité. Comme à votre habitude, vous avancez des choses sans aucune justification autre que votre imagination délirante. Vous gagnez le ponpon soit de la mauvaise foi, soit de la bêtise. A vous de choisir.
- hokousai
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à miam
Je n’ai jamais dit que la substance était antérieure aux attribut mais que dans l’ éthique (dans le texte )Spinoza en parle avant les attributs . Autant dire que Spinoza a écrit sans ordre .
Ce n'est pas mon opinion , mais il est vrai que l’ordre ce n’est pas votre point fort .
Thomas n’assimile pas l’ être à l’existence .Il parle d’esse et pas d’exsistentia (la distinction semble advenir peu après Thomas chez Gilles de Rome )
Spinoza ne pense pas l’étant tel que la scolastique pense les étants ie comme substantiellement distincts et séparés, c’est à dire comme choses distinctes dans la réalité , intelligées en idées séparées par l’abstraction .Il ne peut le faire puisque seule la substance est cause de soi .
"""Et c’est pourquoi je n’ai pas dit qu’ appartient à l’essence d’une chose ce sans quoi la chose ne peut ni être ni se concevoir """" finalement qu’importe l’essence au sens de l’ intellection ou de l’être puisque c’est sans Dieu ( qui n’appartient pas à leur essence ) qu ‘elle ne peuvent ni être ni se concevoir. Qu’importe l’essence ( le couple esse / essentia )
Spinoza garde le vocabulaire (chose , étant ) mais aucune chose particulière ne peut être séparée , elle ne peut donc Etre comme identique à elle même .Elle existe mais n’est pas , pas au sens ou les choses sont dans l’univers mental médiéval .
Dans le scolie de la prop 10/2 de l’essence de la chose .
Il est question d’un procès (poser et supprimer ) le procès processus) bien évidemment sans la chose ( perçue ) ne peut être compris ni être. Mais quel est l’être d’un procès ?.
L’être de ce poser et de ce supprimer ?
Il n’est pas un être stable (identique à lui même ) car il n’est jamais dit que les modifications soient jamais identiques ni à elles mêmes ni à d’autres .
L’abstraction « mode »( ou manière ) est un être de raison pas un être réel et on est dans le fantasme en pensant un être des modes .
Pas plus la chose particulière que les modes ne sont identiques à eux mêmes .
Vous voulez conserver du stable et du fini dans un système instable et infini . ce n’est pas moi l’aristotélicien . C’est vous .
PS
Au principe du thomisme Dieu est ( il a l’esse ) il est donc distinct de sa création .
Au principe du spinozisme Dieu existe .(le principe c’est la première définition, il n ‘y est pas dit que la causa sui EST mais qu’elle ne peut se concevoir qu ‘existante .)
Le Dieu du thomisme EST il n’est pas existant , s’ il crée il ne sort pas de lui même a fortiori il n’est pas lui même sa création .Ce sont des choses particulières que Gilles de Rome a pu dire qu’ elles étaient existantes
Le Dieu de Thomas :
Il ESt le premier moteur immobile ,
la première cause efficiente ,
nécessaire pas soi même, souverainement vrai,
souverainement bon, souverainement noble, et par conséquent aussi souverainement être,
être intelligent, par lequel toutes choses naturelles sont orientées vers leur fin
Je n’ai jamais dit que la substance était antérieure aux attribut mais que dans l’ éthique (dans le texte )Spinoza en parle avant les attributs . Autant dire que Spinoza a écrit sans ordre .
Ce n'est pas mon opinion , mais il est vrai que l’ordre ce n’est pas votre point fort .
Thomas n’assimile pas l’ être à l’existence .Il parle d’esse et pas d’exsistentia (la distinction semble advenir peu après Thomas chez Gilles de Rome )
Spinoza ne pense pas l’étant tel que la scolastique pense les étants ie comme substantiellement distincts et séparés, c’est à dire comme choses distinctes dans la réalité , intelligées en idées séparées par l’abstraction .Il ne peut le faire puisque seule la substance est cause de soi .
"""Et c’est pourquoi je n’ai pas dit qu’ appartient à l’essence d’une chose ce sans quoi la chose ne peut ni être ni se concevoir """" finalement qu’importe l’essence au sens de l’ intellection ou de l’être puisque c’est sans Dieu ( qui n’appartient pas à leur essence ) qu ‘elle ne peuvent ni être ni se concevoir. Qu’importe l’essence ( le couple esse / essentia )
Spinoza garde le vocabulaire (chose , étant ) mais aucune chose particulière ne peut être séparée , elle ne peut donc Etre comme identique à elle même .Elle existe mais n’est pas , pas au sens ou les choses sont dans l’univers mental médiéval .
Dans le scolie de la prop 10/2 de l’essence de la chose .
Il est question d’un procès (poser et supprimer ) le procès processus) bien évidemment sans la chose ( perçue ) ne peut être compris ni être. Mais quel est l’être d’un procès ?.
L’être de ce poser et de ce supprimer ?
Il n’est pas un être stable (identique à lui même ) car il n’est jamais dit que les modifications soient jamais identiques ni à elles mêmes ni à d’autres .
L’abstraction « mode »( ou manière ) est un être de raison pas un être réel et on est dans le fantasme en pensant un être des modes .
Pas plus la chose particulière que les modes ne sont identiques à eux mêmes .
Vous voulez conserver du stable et du fini dans un système instable et infini . ce n’est pas moi l’aristotélicien . C’est vous .
PS
Au principe du thomisme Dieu est ( il a l’esse ) il est donc distinct de sa création .
Au principe du spinozisme Dieu existe .(le principe c’est la première définition, il n ‘y est pas dit que la causa sui EST mais qu’elle ne peut se concevoir qu ‘existante .)
Le Dieu du thomisme EST il n’est pas existant , s’ il crée il ne sort pas de lui même a fortiori il n’est pas lui même sa création .Ce sont des choses particulières que Gilles de Rome a pu dire qu’ elles étaient existantes
Le Dieu de Thomas :
Il ESt le premier moteur immobile ,
la première cause efficiente ,
nécessaire pas soi même, souverainement vrai,
souverainement bon, souverainement noble, et par conséquent aussi souverainement être,
être intelligent, par lequel toutes choses naturelles sont orientées vers leur fin
"Je n’ai jamais dit que la substance était antérieure aux attribut"
Si. Dans la section "être objectif vs chose ...". Vous ne savez pas ce que vous dites.
"mais que dans l’ éthique (dans le texte )Spinoza en parle avant les attributs . Autant dire que Spinoza a écrit sans ordre ."
Stupide
"l’ordre ce n’est pas votre point fort"
Culotté
"Thomas n’assimile pas l’ être à l’existence .Il parle d’esse et pas d’exsistentia (la distinction semble advenir peu après Thomas chez Gilles de Rome )"
Contradictoire.
"comme choses distinctes dans la réalité , intelligées en idées séparées par l’abstraction "
Aucune abstraction chez Spinoza. Cela, c'est encore du thomisme.
"Elle existe mais n’est pas , pas au sens ou les choses sont dans l’univers mental médiéval ."
Par conséquent Hokusaï n'est pas plus qu'un cheval volant.
"Pas plus la chose particulière que les modes ne sont identiques à eux mêmes"
Pardon : Hokusaï n'est pas même un cheval volant. Il n'est pas identique à lui-même donc il n'a pas d'essence. Hokusaï est un cercle-carré.
" « mode »( ou manière ) est un être de raison"
Hokusaï est un être de raison.
"ce n’est pas moi l’aristotélicien . C’est vous ."
Sans doute, car Thomas est bien plus loin d'Aristote que ne l'est Spinoza.
Si. Dans la section "être objectif vs chose ...". Vous ne savez pas ce que vous dites.
"mais que dans l’ éthique (dans le texte )Spinoza en parle avant les attributs . Autant dire que Spinoza a écrit sans ordre ."
Stupide
"l’ordre ce n’est pas votre point fort"
Culotté
"Thomas n’assimile pas l’ être à l’existence .Il parle d’esse et pas d’exsistentia (la distinction semble advenir peu après Thomas chez Gilles de Rome )"
Contradictoire.
"comme choses distinctes dans la réalité , intelligées en idées séparées par l’abstraction "
Aucune abstraction chez Spinoza. Cela, c'est encore du thomisme.
"Elle existe mais n’est pas , pas au sens ou les choses sont dans l’univers mental médiéval ."
Par conséquent Hokusaï n'est pas plus qu'un cheval volant.
"Pas plus la chose particulière que les modes ne sont identiques à eux mêmes"
Pardon : Hokusaï n'est pas même un cheval volant. Il n'est pas identique à lui-même donc il n'a pas d'essence. Hokusaï est un cercle-carré.
" « mode »( ou manière ) est un être de raison"
Hokusaï est un être de raison.
"ce n’est pas moi l’aristotélicien . C’est vous ."
Sans doute, car Thomas est bien plus loin d'Aristote que ne l'est Spinoza.
- hokousai
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à miam
Quant à la substance relativement aux attributs .
L’idée de substance infinie ne peut être déduite des attributs , elle est intellectuellement pensée en soi ( en elle même ) et non déduite .
Il ne s’agit pas d’ antériorité dans une temporalité .
Je veux signifier que l’idée d’infinitude de la substance ne se déduit pas de l’idée d’infinité de l’étendue ou de la pensée ( infinitude moins évidente d' ailleurs que celle de l’étendue ou du temps ) . L’idée de perfection comme infinitude ne se déduit pas des attributs , c’est une intuition par soi . Une substance n’aurait- elle aucun attribut qu ‘elle serait ( esse) parfaite à l’esprit de certain , mais pas à l’esprit de Spinoza .
Spinoza intellige la substance comme consistant en une infinité d’ attribut .
Et pourquoi donc cette substance est -elle plus parfaite qu’une substance sans attribut ?
Réponse ( à mon avis )…. il y a un incontournable et la substance "à attribut" rend compte de cet incontournable :
En effet il n’y a dans la nature rien de plus clair que le fait que chaque étant doit se concevoir sous quelque attribut .
Il n y a rien de plus clair !
A ce moment la substance est spécifiée comme devant avoir un ou plusieurs attribut et sous la condition d’ avoir la plus grande réalité , d ‘avoir une infinité d’ attributs .
Spinoza dit "" il est loin d être absurde d’ attribuer plusieurs attributs à une même substance""
s’il tient à préciser cela c’est sans doute que cela devait sembler absurde ou pas si évident à certain .
(voilà ce que je sais que je dis )…
…………………………………..
Sur l’identité à soi
Effectivement vous êtes dans le droit fil d’une métaphysique de l ‘être . Vous polémiquez contre l’onto- théologie alors que vous persistez dans l’identité à soi des choses particulières , laquelle identité ne peut qu’être projetée sur la substance .
Or une substance qui s’exprime en une infinité de modifications ne peut être identique à elle même .
Déjà intrinsèquement puisque les modifications infinies introduisent à une infinité de différences .
Mais extrinsèquement ?
Un élément A (quel que soi cet élément A) n’est identique à lui même que s’il est quelque part limité .C’est cette limite qui permet l’identité . Si A est A il est nécessaire que A ne soit pas non- A )
A est A (l’identité )sans l’ altérité contre laquelle elle se pose (comme l’ impossibilité d être non A) n ‘a aucun sens ..il n y a aucun sens à affirmer l’identité à soi d’une chose pour laquelle la négation est absente .
Or la substance spinoziste n’a pas d’ altérité , elle n’a pas de non substance , elle ne peut pas ""ne pas être sa négation "".
Donc elle n’est pas identique à elle même .
hokousai
Quant à la substance relativement aux attributs .
L’idée de substance infinie ne peut être déduite des attributs , elle est intellectuellement pensée en soi ( en elle même ) et non déduite .
Il ne s’agit pas d’ antériorité dans une temporalité .
Je veux signifier que l’idée d’infinitude de la substance ne se déduit pas de l’idée d’infinité de l’étendue ou de la pensée ( infinitude moins évidente d' ailleurs que celle de l’étendue ou du temps ) . L’idée de perfection comme infinitude ne se déduit pas des attributs , c’est une intuition par soi . Une substance n’aurait- elle aucun attribut qu ‘elle serait ( esse) parfaite à l’esprit de certain , mais pas à l’esprit de Spinoza .
Spinoza intellige la substance comme consistant en une infinité d’ attribut .
Et pourquoi donc cette substance est -elle plus parfaite qu’une substance sans attribut ?
Réponse ( à mon avis )…. il y a un incontournable et la substance "à attribut" rend compte de cet incontournable :
En effet il n’y a dans la nature rien de plus clair que le fait que chaque étant doit se concevoir sous quelque attribut .
Il n y a rien de plus clair !
A ce moment la substance est spécifiée comme devant avoir un ou plusieurs attribut et sous la condition d’ avoir la plus grande réalité , d ‘avoir une infinité d’ attributs .
Spinoza dit "" il est loin d être absurde d’ attribuer plusieurs attributs à une même substance""
s’il tient à préciser cela c’est sans doute que cela devait sembler absurde ou pas si évident à certain .
(voilà ce que je sais que je dis )…
…………………………………..
Sur l’identité à soi
Effectivement vous êtes dans le droit fil d’une métaphysique de l ‘être . Vous polémiquez contre l’onto- théologie alors que vous persistez dans l’identité à soi des choses particulières , laquelle identité ne peut qu’être projetée sur la substance .
Or une substance qui s’exprime en une infinité de modifications ne peut être identique à elle même .
Déjà intrinsèquement puisque les modifications infinies introduisent à une infinité de différences .
Mais extrinsèquement ?
Un élément A (quel que soi cet élément A) n’est identique à lui même que s’il est quelque part limité .C’est cette limite qui permet l’identité . Si A est A il est nécessaire que A ne soit pas non- A )
A est A (l’identité )sans l’ altérité contre laquelle elle se pose (comme l’ impossibilité d être non A) n ‘a aucun sens ..il n y a aucun sens à affirmer l’identité à soi d’une chose pour laquelle la négation est absente .
Or la substance spinoziste n’a pas d’ altérité , elle n’a pas de non substance , elle ne peut pas ""ne pas être sa négation "".
Donc elle n’est pas identique à elle même .
hokousai
"Or une substance qui s’exprime en une infinité de modifications ne peut être identique à elle même .
Déjà intrinsèquement puisque les modifications infinies introduisent à une infinité de différences .
Mais extrinsèquement ?
Un élément A (quel que soi cet élément A) n’est identique à lui même que s’il est quelque part limité .C’est cette limite qui permet l’identité . Si A est A il est nécessaire que A ne soit pas non- A )
A est A (l’identité )sans l’ altérité contre laquelle elle se pose (comme l’ impossibilité d être non A) n ‘a aucun sens ..il n y a aucun sens à affirmer l’identité à soi d’une chose pour laquelle la négation est absente .
Or la substance spinoziste n’a pas d’ altérité , elle n’a pas de non substance , elle ne peut pas ""ne pas être sa négation "".
Donc elle n’est pas identique à elle même ."
Cela mérite vraiment d'être développé pour être défendu. Ca manque très sérieusement de citations de texte et ça n'a aucune consistance. Vraiment désolé, mais la pensée dichotomique sur laquelle tu te fondes, Hokousai, me semble à mille lieux de Spinoza...
Déjà intrinsèquement puisque les modifications infinies introduisent à une infinité de différences .
Mais extrinsèquement ?
Un élément A (quel que soi cet élément A) n’est identique à lui même que s’il est quelque part limité .C’est cette limite qui permet l’identité . Si A est A il est nécessaire que A ne soit pas non- A )
A est A (l’identité )sans l’ altérité contre laquelle elle se pose (comme l’ impossibilité d être non A) n ‘a aucun sens ..il n y a aucun sens à affirmer l’identité à soi d’une chose pour laquelle la négation est absente .
Or la substance spinoziste n’a pas d’ altérité , elle n’a pas de non substance , elle ne peut pas ""ne pas être sa négation "".
Donc elle n’est pas identique à elle même ."
Cela mérite vraiment d'être développé pour être défendu. Ca manque très sérieusement de citations de texte et ça n'a aucune consistance. Vraiment désolé, mais la pensée dichotomique sur laquelle tu te fondes, Hokousai, me semble à mille lieux de Spinoza...
- hokousai
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à Benbarka
C'est une thèse contraire que vous devez me montrer . Je développe une thèse qui logiquement est déduite de la substance chez Spinoza laquelle à mes yeux n’est pas la substance aristotélicienne ou scolastique. Démontrer moi que pour Spinoza la substance est identique à elle- même et je ferai amende honorable de l’incompatibilité de ma thèse avec la pensée de Spinoza . En l'absence de démonstration de votre part , je persiste à penser une compatibilité .
Je persisterai néanmoins à conserver une thèse qui s’il est démontré qu’elle n’est pas Spinoziste me convient à titre personnel .
A cet effet je rappelle à miam et à vous même que ce qui m’intéresse n’est pas la revendication d’appartenance à une communauté( assez fantasmée d’ailleurs ,le spinozisme en l’occurrence ) mais ma propre démarche .
Si les divergences entre ce que je dis et ce que pense Spinoza vous sont évidentes , faites en le cas qui vous semble utile .
A vous de savoir si cela vous est utile de montrez , démontrez , expliquez ces divergences . A vous de savoir quels sont les motifs de votre mobilisation . Ce que je dis rejoint ou rappelle au problème politique abordé il y a quelques mois .
hokousai
C'est une thèse contraire que vous devez me montrer . Je développe une thèse qui logiquement est déduite de la substance chez Spinoza laquelle à mes yeux n’est pas la substance aristotélicienne ou scolastique. Démontrer moi que pour Spinoza la substance est identique à elle- même et je ferai amende honorable de l’incompatibilité de ma thèse avec la pensée de Spinoza . En l'absence de démonstration de votre part , je persiste à penser une compatibilité .
Je persisterai néanmoins à conserver une thèse qui s’il est démontré qu’elle n’est pas Spinoziste me convient à titre personnel .
A cet effet je rappelle à miam et à vous même que ce qui m’intéresse n’est pas la revendication d’appartenance à une communauté( assez fantasmée d’ailleurs ,le spinozisme en l’occurrence ) mais ma propre démarche .
Si les divergences entre ce que je dis et ce que pense Spinoza vous sont évidentes , faites en le cas qui vous semble utile .
A vous de savoir si cela vous est utile de montrez , démontrez , expliquez ces divergences . A vous de savoir quels sont les motifs de votre mobilisation . Ce que je dis rejoint ou rappelle au problème politique abordé il y a quelques mois .
hokousai
A Miam:
merci de tes précisions supplémentaires, j'y réfléchis.
A Hokousai:
en ce qui me concerne l'idée que vous lancez cc la notion d'identité est assez intéressante, ne fût-ce déjà pour essayer de mieux expliciter cette notion.
Alors si je vous ai bien compris, vous proposez une définition de l'identité à soi-même qui se base sur deux critères et une condition nécessaire :
- critère 1: est identique à soi ce qui ne subit aucun changement
- critère 2: est identique à soi ce qui est la négation de la négation de soi
- condition sine qua non : peut être identique à soi seulement ce qui est composé d'un nombre fini d'éléments (condition formulée de manière arithmétique) ou ce qui est délimité dans l'espace (condition formulée de manière géométrique).
Il me semble que l'on peut en effet démontrer que cette définition ne peut pas être celle de Spinoza (ce qui, effectivement, n'enlève rien à l'intérêt d'une telle définition en soi).
Prenons pe le premier critère: il implique que ce qui subit un changement n'est plus identique à soi. Mais ne faudrait-il pas specifier le lieu du changement avant que l'on puisse l'appliquer au spinozisme? Car en théorie une essence peut subir un changement 'essentiel', ou un changement qui n'est qu'une variation ou modification 'accidentelle'. Dans le premier cas, le résultat effectivement ne peut plus être dit 'le même', mais dans le deuxième cas, il me semble qu'encore longtemps après le XVIIe, on a considéré qu'alors l'essence reste la même.
Les Lemmes de l'Ethique en sont une bonne illustration: ils spécifient quand Spinoza veut appeler une entité composée identique à soi-même et quand on l'appelle 'transformée' en autre chose, qui n'est plus identique à ce qu'elle était avant la transformation. Ils explicitent les règles selon lesquelles pour Spinoza des Individus peuvent subir des modifications "sans changement de forme" et "en gardant sa nature d'avant".
A mon avis, cela montre clairement et littéralement que chez Spinoza, la notion d'identité ne comporte pas le premier critère ci-dessus, et que donc forcément il utilise un autre concept d'identité que celui que vous venez de proposer.
Regardons le deuxième critère. Là à mon sens vous confondez le principe d'identité avec le principe de non contradiction. Le principe de non contradiction dit que si A est vrai, non A doit être faux, sinon il y a contradiction. Cela a effectivement comme conséquence que si A est vrai, non non A doit également être vrai.
Le principe d'identité, pour autant que je sache, s'articule autour des notions de 'mêmeté' et d'unité. Si donc Spinoza dit que la nature entière est un seul Individu (dernier lemme), il y dit qu'il s'agit d'une seule unité ou union. L'essence de Dieu reste toujours la même. Voir pe le corollaire II de la prop. I.20: "Il suit que Dieu, autrement dit tous les attributs de Dieu sont immuables. Car, s'ils changeaient sous le rapport de l'existence, ils devraient également changer sous le rapport de l'essence, c'est-à-dire (comme il va de soi) de vrais devenir faux, ce qui est absurde".
Conclusion: la seule chose qui explique le changement (qui effectivement est infini chez Spinoza, vu qu'il existe une infinité d'attributs qui sont affectés d'une infinités de modes), c'est l'affection des différentes parties de la substance entre elles, la substance elle-même restant immuable ou identique (voir la métaphore de Henrique: ce n'est pas parce que votre jambe est affectée d'une telle façon que vous marchez, que ce n'est plus votre corps qui marche, mais celui de quelqu'un d'autre).
Pour le principe de contradiction tel que l'utilise Spinoza : prenons pe 3.10: l'idée qui exclut l'existence de X ne peut se trouver dans l'Esprit de X, mais lui est contraire. Si donc vous voulez penser la Substance via le principe de contradiction, il faudrait définir la Substance en faisant référence à ce qui lui est contraire. Or pour Spinoza, ce qui est contraire à une chose ne peut pas se trouver dans la chose elle-même. Ce qui est contraire à la Substance, doit donc se trouver hors de la Substance. Toutefois, la Substance a précisément été définie par ce qui n'a pas d'extérieur. Il s'en suit que rien ne peut être contraire à la substance. Ce qui fait que l'expression 'non A' où A est la substance n'a pas de sens chez Spinoza. On ne peut donc construire l'expression 'non non A', car celle-ci demande à s'imaginer le contraire de 'non A', or 'non A' n'a pas de sens. Donc 'non non A' non plus.
On pourrait le dire encore autrement: prenons la notion de négation chez Spinoza et voyons dans quelle mesure elle nous permet de penser un 'non non A' où A est la Substance spinoziste.
Dans le scolie de III.3 on voit que l'idée inadéquate n'est inadéquate dans l'Esprit de l'homme que parce que cet Esprit en cela enveloppe négation. Mais ici, négation veut dire privation, donc manque d'idées d'autres choses. Or la Substance ayant été définie par le fait de ne pas avoir d'extérieur, rien ne peut lui être privé, car il n'existe rien en dehors d'elle-même. Elle ne manque donc de rien. Et comme Dieu ne manque de rien, il ne peut pas envelopper négation. On ne pourra donc définir l'essence de Dieu via la notion de négation si l'on prend cette notion dans le sens spinoziste.
Enfin en ce qui concerne votre 'condition sine qua non', le fait de devoir être limité arithmétiquement ou géométriquement avoir de pouvoir être dit identique à soi-même: il me semble que ce que je viens de dire montre déjà en quoi cette condition n'est pas spinoziste. Prenons à nouveau le lemme 7, scolie: "Et, si nous continuons encore ainsi à l'infini, nous concevrons facilement que la nature tout entière est un seul Individu, dont les parties, c'est-à-dire tous les corps, varient d'une infinité de manières sans que change l'Individu tout entier", autrement dit: "Par là donc nous voyons de quelle façon un Individu composé peut être affecté de bien des manières tout en conservant néanmoins sa nature."
Le critère de l'identité chez Spinoza est donc celui de la conservation de sa nature, ou de son essence telle qu'elle s'exprime dans sa définition. Une fois que l'on définit 'A' par une composition infinie (comme c'est la cas pour la Substance, dont l'essence est constituée par une infinité d'attributs), son essence comporte elle-même l'infinité. Et une fois que l'on la définit par des attributs qui sont affectés d'une infinité de manières, le changement de ces affections appartient lui-même également à cette essence.
On pourrait effectivement être tenté d'en conclure que c'est donc le changement infini qui définit l'essence de la Substance, comme vous semblez le faire. Et c'est une définition qui me conviendrait très bien, et qui correspondrait d'ailleurs également très bien avec le fait que les sciences chimico-physiques actuelles se sont vues obligés de situer le temps et donc l'évolution dans la nature même, et non plus seulement dans l'imagination des humains, incapables de voir ce qui reste constant sous les modifications superficielles.
Mais si cette conclusion me semble être tout sauf spinoziste, c'est présicément parce que Spinoza ne prend pas le changement comme critère de la non identité à soi, ni l'infinité. Le critère de non identité à soi, c'est la 'transformation', ou la 'transmutation', c'est-à-dire un devenir autre de l'essence elle-même. Alors si l'essence de A, c'est d'être constitué d'une infinité de choses qui changent constamment d'une infinité de manière, s'imaginer que cette essence deviendrait autre, cela ne peut vouloir dire que deux choses: ou bien elle n'a plus une infinité d'attributs mais seulement un nombre fini d'attribut, ou bien les attributs ne seraient plus affectés d'une infinité de manières, mais d'un nombre fini de manières. Là, l'essence de Dieu ne serait plus identitique à elle-même, dans un sens proprement spinoziste. Mais bon, on sait que cette essence est éternelle, ce qui implique que rien ne peut la détruire, et lui ôter l'infini qui la constitue reviendrait bel et bien à la détruire.
L'infinité de changements que comporte la Substance n'est donc rien d'autre que les différents degrés d'une puissance infinie et leurs variations. Comme il le dit dans la préface à la 4e partie: "Car il faut avant tout remarquer que, quand je dis que quelqu'un passe d'une moindre perfection à une plus grande, et le contraire, je n'entends pas qu'il échange son essence ou forme contre une autre. Car un cheval, pe, n'est pas moins détruit s'il se change en homme que s'il se change en insecte: mais c'est sa puissance d'agir, en tant qu'elle se comprend par l'intermédiaire de sa nature, que nous concevons comme augmentée ou bien diminuée."
Le changement en Dieu est donc une variation de perfection d'un degré de puissance précis et déterminé, à la suite d'une affection. Mais Dieu étant défini par la puissance infinie et la sûprême perfection, l'unité de la Nature en tant que telle ne peut pas devenir plus ou moins parfait. Elle ne change donc pas. Elle est constamment maximale. Ici aussi, on voit en quoi consiste l'immuabilité (immutabilitas) de Dieu: pas de variation de puissance au niveau de la totalité. Et comme l'essence est également définie, chez Spinoza, par un degré de puissance, on constate de nouveau que l'essence de la Substance est définie d'une telle façon qu'aucun changement n'est pensable.
Donc voici les raisons pour lesquelles il me semble que l'on ne peut pas dire que pour Spinoza, la Substance n'est pas identique à elle-même.
Ce que l'on peut faire, bien sûr, c'est prendre un concept non spinoziste du principe d'identité, et alors constater que de ce point de vue, le spinozisme travaille avec une Substance non identique à soi-même. Là, vos critères deviennent de nouveau tout à fait pertinents. Il suffit de décider pe que l'on veut définir l'identité sur base de la condition sine qua non d'être un ensemble fini. Dieu est infini, chez Spinoza, donc si l'on précise que l'on ne veut appeler 'identique à soi' que ce qui est fini, alors il n'y a plus aucun problème à désigner la Substance spinoziste comme n'étant pas identique à soi.
Or pourquoi qualifier une doctrine philosophique à partir d'une autre doctrine philosophique, c'est-à-dire en donnant un autre sens aux mêmes mots? Comme je vous l'ai déjà dit, moi-même je trouve ce genre d'exercices assez dangereux car on risque de confondre tout sans inventer réellement une nouvelle philosophie, donc sans gagner quoi que ce soit. J'en profite pour répondre à votre dernier message dans le sujet 'espoir' et qui touchait au même problème: on peut effectivement comparer le philosophe à un coach d'un athlète, si l'on veut, mais là où je ne suis pas d'accord avec vous, c'est quand vous dites que vous n'allez prendre que ce coach qui s'intéresse à votre problème à vous. Il va de soi que prendre un autre pour résoudre votre problème à vous ne sert à rien, mais ce que je prétends, c'est que chaque philosophe INVENTE un nouveau problème. On ne peut donc comprendre l'utilité ou l'efficacité d'une pensée philosophique que si l'on accepte de d'abord essayer de comprendre le problème posé, crée par le philosophe en question. Lui demander de résoudre le problème d'un autre, c'est à mon sens absurde.
Si donc vous préférez un autre concept de l'identité que celui avec lequel travaille Spinoza, il n'y a bien sûr aucun problème. Il y a seulement un problème si:
1) vous voulez affirmer que POUR SPINOZA, la Substance n'est pas identique à elle-même
2) vous voulez juger la cohérence ou l'efficacité pratique du spinozisme sur base d'une notion non spinoziste du concept d'identité (ou de n'importe quel autre concept).
Ou pour utiliser la métaphore du coach d'un athlète que vous venez de proposer dans l'autre fil: le (grand) philosophe est ce coach qui invente lui-même un nouveau sport. Si l'on veut pratiquer un sport qui existe déjà, il ne faut donc pas d'adresser à un coach-philosophe, mais à un coach de natation, de cyclisme, de foot, de tennis, etc. Si par contre vous voulez découvrir un tout nouveau sport, dont vous ne supposiez même pas l'existence, alors le coach-philosophe a tout pour satisfaire vos souhaits ...
.
Cordialement,
Louisa
merci de tes précisions supplémentaires, j'y réfléchis.
A Hokousai:
en ce qui me concerne l'idée que vous lancez cc la notion d'identité est assez intéressante, ne fût-ce déjà pour essayer de mieux expliciter cette notion.
Alors si je vous ai bien compris, vous proposez une définition de l'identité à soi-même qui se base sur deux critères et une condition nécessaire :
- critère 1: est identique à soi ce qui ne subit aucun changement
- critère 2: est identique à soi ce qui est la négation de la négation de soi
- condition sine qua non : peut être identique à soi seulement ce qui est composé d'un nombre fini d'éléments (condition formulée de manière arithmétique) ou ce qui est délimité dans l'espace (condition formulée de manière géométrique).
Il me semble que l'on peut en effet démontrer que cette définition ne peut pas être celle de Spinoza (ce qui, effectivement, n'enlève rien à l'intérêt d'une telle définition en soi).
Prenons pe le premier critère: il implique que ce qui subit un changement n'est plus identique à soi. Mais ne faudrait-il pas specifier le lieu du changement avant que l'on puisse l'appliquer au spinozisme? Car en théorie une essence peut subir un changement 'essentiel', ou un changement qui n'est qu'une variation ou modification 'accidentelle'. Dans le premier cas, le résultat effectivement ne peut plus être dit 'le même', mais dans le deuxième cas, il me semble qu'encore longtemps après le XVIIe, on a considéré qu'alors l'essence reste la même.
Les Lemmes de l'Ethique en sont une bonne illustration: ils spécifient quand Spinoza veut appeler une entité composée identique à soi-même et quand on l'appelle 'transformée' en autre chose, qui n'est plus identique à ce qu'elle était avant la transformation. Ils explicitent les règles selon lesquelles pour Spinoza des Individus peuvent subir des modifications "sans changement de forme" et "en gardant sa nature d'avant".
A mon avis, cela montre clairement et littéralement que chez Spinoza, la notion d'identité ne comporte pas le premier critère ci-dessus, et que donc forcément il utilise un autre concept d'identité que celui que vous venez de proposer.
Regardons le deuxième critère. Là à mon sens vous confondez le principe d'identité avec le principe de non contradiction. Le principe de non contradiction dit que si A est vrai, non A doit être faux, sinon il y a contradiction. Cela a effectivement comme conséquence que si A est vrai, non non A doit également être vrai.
Le principe d'identité, pour autant que je sache, s'articule autour des notions de 'mêmeté' et d'unité. Si donc Spinoza dit que la nature entière est un seul Individu (dernier lemme), il y dit qu'il s'agit d'une seule unité ou union. L'essence de Dieu reste toujours la même. Voir pe le corollaire II de la prop. I.20: "Il suit que Dieu, autrement dit tous les attributs de Dieu sont immuables. Car, s'ils changeaient sous le rapport de l'existence, ils devraient également changer sous le rapport de l'essence, c'est-à-dire (comme il va de soi) de vrais devenir faux, ce qui est absurde".
Conclusion: la seule chose qui explique le changement (qui effectivement est infini chez Spinoza, vu qu'il existe une infinité d'attributs qui sont affectés d'une infinités de modes), c'est l'affection des différentes parties de la substance entre elles, la substance elle-même restant immuable ou identique (voir la métaphore de Henrique: ce n'est pas parce que votre jambe est affectée d'une telle façon que vous marchez, que ce n'est plus votre corps qui marche, mais celui de quelqu'un d'autre).
Pour le principe de contradiction tel que l'utilise Spinoza : prenons pe 3.10: l'idée qui exclut l'existence de X ne peut se trouver dans l'Esprit de X, mais lui est contraire. Si donc vous voulez penser la Substance via le principe de contradiction, il faudrait définir la Substance en faisant référence à ce qui lui est contraire. Or pour Spinoza, ce qui est contraire à une chose ne peut pas se trouver dans la chose elle-même. Ce qui est contraire à la Substance, doit donc se trouver hors de la Substance. Toutefois, la Substance a précisément été définie par ce qui n'a pas d'extérieur. Il s'en suit que rien ne peut être contraire à la substance. Ce qui fait que l'expression 'non A' où A est la substance n'a pas de sens chez Spinoza. On ne peut donc construire l'expression 'non non A', car celle-ci demande à s'imaginer le contraire de 'non A', or 'non A' n'a pas de sens. Donc 'non non A' non plus.
On pourrait le dire encore autrement: prenons la notion de négation chez Spinoza et voyons dans quelle mesure elle nous permet de penser un 'non non A' où A est la Substance spinoziste.
Dans le scolie de III.3 on voit que l'idée inadéquate n'est inadéquate dans l'Esprit de l'homme que parce que cet Esprit en cela enveloppe négation. Mais ici, négation veut dire privation, donc manque d'idées d'autres choses. Or la Substance ayant été définie par le fait de ne pas avoir d'extérieur, rien ne peut lui être privé, car il n'existe rien en dehors d'elle-même. Elle ne manque donc de rien. Et comme Dieu ne manque de rien, il ne peut pas envelopper négation. On ne pourra donc définir l'essence de Dieu via la notion de négation si l'on prend cette notion dans le sens spinoziste.
Enfin en ce qui concerne votre 'condition sine qua non', le fait de devoir être limité arithmétiquement ou géométriquement avoir de pouvoir être dit identique à soi-même: il me semble que ce que je viens de dire montre déjà en quoi cette condition n'est pas spinoziste. Prenons à nouveau le lemme 7, scolie: "Et, si nous continuons encore ainsi à l'infini, nous concevrons facilement que la nature tout entière est un seul Individu, dont les parties, c'est-à-dire tous les corps, varient d'une infinité de manières sans que change l'Individu tout entier", autrement dit: "Par là donc nous voyons de quelle façon un Individu composé peut être affecté de bien des manières tout en conservant néanmoins sa nature."
Le critère de l'identité chez Spinoza est donc celui de la conservation de sa nature, ou de son essence telle qu'elle s'exprime dans sa définition. Une fois que l'on définit 'A' par une composition infinie (comme c'est la cas pour la Substance, dont l'essence est constituée par une infinité d'attributs), son essence comporte elle-même l'infinité. Et une fois que l'on la définit par des attributs qui sont affectés d'une infinité de manières, le changement de ces affections appartient lui-même également à cette essence.
On pourrait effectivement être tenté d'en conclure que c'est donc le changement infini qui définit l'essence de la Substance, comme vous semblez le faire. Et c'est une définition qui me conviendrait très bien, et qui correspondrait d'ailleurs également très bien avec le fait que les sciences chimico-physiques actuelles se sont vues obligés de situer le temps et donc l'évolution dans la nature même, et non plus seulement dans l'imagination des humains, incapables de voir ce qui reste constant sous les modifications superficielles.
Mais si cette conclusion me semble être tout sauf spinoziste, c'est présicément parce que Spinoza ne prend pas le changement comme critère de la non identité à soi, ni l'infinité. Le critère de non identité à soi, c'est la 'transformation', ou la 'transmutation', c'est-à-dire un devenir autre de l'essence elle-même. Alors si l'essence de A, c'est d'être constitué d'une infinité de choses qui changent constamment d'une infinité de manière, s'imaginer que cette essence deviendrait autre, cela ne peut vouloir dire que deux choses: ou bien elle n'a plus une infinité d'attributs mais seulement un nombre fini d'attribut, ou bien les attributs ne seraient plus affectés d'une infinité de manières, mais d'un nombre fini de manières. Là, l'essence de Dieu ne serait plus identitique à elle-même, dans un sens proprement spinoziste. Mais bon, on sait que cette essence est éternelle, ce qui implique que rien ne peut la détruire, et lui ôter l'infini qui la constitue reviendrait bel et bien à la détruire.
L'infinité de changements que comporte la Substance n'est donc rien d'autre que les différents degrés d'une puissance infinie et leurs variations. Comme il le dit dans la préface à la 4e partie: "Car il faut avant tout remarquer que, quand je dis que quelqu'un passe d'une moindre perfection à une plus grande, et le contraire, je n'entends pas qu'il échange son essence ou forme contre une autre. Car un cheval, pe, n'est pas moins détruit s'il se change en homme que s'il se change en insecte: mais c'est sa puissance d'agir, en tant qu'elle se comprend par l'intermédiaire de sa nature, que nous concevons comme augmentée ou bien diminuée."
Le changement en Dieu est donc une variation de perfection d'un degré de puissance précis et déterminé, à la suite d'une affection. Mais Dieu étant défini par la puissance infinie et la sûprême perfection, l'unité de la Nature en tant que telle ne peut pas devenir plus ou moins parfait. Elle ne change donc pas. Elle est constamment maximale. Ici aussi, on voit en quoi consiste l'immuabilité (immutabilitas) de Dieu: pas de variation de puissance au niveau de la totalité. Et comme l'essence est également définie, chez Spinoza, par un degré de puissance, on constate de nouveau que l'essence de la Substance est définie d'une telle façon qu'aucun changement n'est pensable.
Donc voici les raisons pour lesquelles il me semble que l'on ne peut pas dire que pour Spinoza, la Substance n'est pas identique à elle-même.
Ce que l'on peut faire, bien sûr, c'est prendre un concept non spinoziste du principe d'identité, et alors constater que de ce point de vue, le spinozisme travaille avec une Substance non identique à soi-même. Là, vos critères deviennent de nouveau tout à fait pertinents. Il suffit de décider pe que l'on veut définir l'identité sur base de la condition sine qua non d'être un ensemble fini. Dieu est infini, chez Spinoza, donc si l'on précise que l'on ne veut appeler 'identique à soi' que ce qui est fini, alors il n'y a plus aucun problème à désigner la Substance spinoziste comme n'étant pas identique à soi.
Or pourquoi qualifier une doctrine philosophique à partir d'une autre doctrine philosophique, c'est-à-dire en donnant un autre sens aux mêmes mots? Comme je vous l'ai déjà dit, moi-même je trouve ce genre d'exercices assez dangereux car on risque de confondre tout sans inventer réellement une nouvelle philosophie, donc sans gagner quoi que ce soit. J'en profite pour répondre à votre dernier message dans le sujet 'espoir' et qui touchait au même problème: on peut effectivement comparer le philosophe à un coach d'un athlète, si l'on veut, mais là où je ne suis pas d'accord avec vous, c'est quand vous dites que vous n'allez prendre que ce coach qui s'intéresse à votre problème à vous. Il va de soi que prendre un autre pour résoudre votre problème à vous ne sert à rien, mais ce que je prétends, c'est que chaque philosophe INVENTE un nouveau problème. On ne peut donc comprendre l'utilité ou l'efficacité d'une pensée philosophique que si l'on accepte de d'abord essayer de comprendre le problème posé, crée par le philosophe en question. Lui demander de résoudre le problème d'un autre, c'est à mon sens absurde.
Si donc vous préférez un autre concept de l'identité que celui avec lequel travaille Spinoza, il n'y a bien sûr aucun problème. Il y a seulement un problème si:
1) vous voulez affirmer que POUR SPINOZA, la Substance n'est pas identique à elle-même
2) vous voulez juger la cohérence ou l'efficacité pratique du spinozisme sur base d'une notion non spinoziste du concept d'identité (ou de n'importe quel autre concept).
Ou pour utiliser la métaphore du coach d'un athlète que vous venez de proposer dans l'autre fil: le (grand) philosophe est ce coach qui invente lui-même un nouveau sport. Si l'on veut pratiquer un sport qui existe déjà, il ne faut donc pas d'adresser à un coach-philosophe, mais à un coach de natation, de cyclisme, de foot, de tennis, etc. Si par contre vous voulez découvrir un tout nouveau sport, dont vous ne supposiez même pas l'existence, alors le coach-philosophe a tout pour satisfaire vos souhaits ...

Cordialement,
Louisa
PS:
comme je viens de le dire, si vous concevez la limitation comme opposée à l'infinité, vous arrivez à une définition de l'identique à soi qui n'est plus spinoziste car chez Spinoza la Substance a une essence éternelle c'est-à-dire qui ne change pas, qui reste toujours la même, indépendamment du fait d'être composée de manière finie ou infinie.
Mais on pourrait prendre cette limitation également dans un autre sens, celui d'être délimité, ou d'être déterminé (il me semble qu'au XVIIe, les deux significations sont très proches, voire identiques). Dans ce cas vous pouvez même maintenir le critère d'être limité pour définir un concept spinoziste de l'identité à soi, car alors ce ne serait que ce qui est indéterminé qui formerait une entité dont on pourrait difficilement dire qu'elle soit identique à soi-même. Or on sait qu'en Dieu, rien n'est indéterminé. Car une autre façon d'exprimer l'éternité spinoziste, c'est précisément le fait que ce qui est éternel est nécessaire ou déterminé d'agir d'une manière précise. En Dieu, tout est déterminé, tout est nécessaire. Dieu est déterminé d'agir selon la manière précise qui correspond à sa puissance. Celle-ci étant infinie, il est donc déterminé d'agir d'une infinité de manières. Ici aussi, être identique à soi et être infini ne s'oppose pas.
Si donc on comprend par 'être limité' le fait d'être déterminé, l'infinité n'enlève rien à cette détermination. Un ensemble infini mais entièrement déterminé peut toujours être identique à soi. C'est seulement un ensemble infini qui comporte une partie d'indétermination (ou qui serait entièrement indéterminée) qui n'est plus identique à soi, si on veut prendre le critère 'être limité' comme critère d'identité.
Autrement dit: vous semblez exiger un caractère commun à la notion d'identité et la notion d'altérité, celui d'être limité. Or si vous concevez cette limitation dans le sens d'être composé de manière finie, il me semble que ce qui est composé de manière infinie (la Substance spinoziste pe) n'est ni l'un ni l'autre: on ne peut pas dire qu'elle est identique à soi, mais on ne peut pas dire non plus qu'elle est différente de soi-même, vu que l'altérité exige également une composition finie.
Par contre, si l'on définit la limitation comme délimitation/détermination, ce problème disparaît. Alors seulement ce qui n'est pas entièrement déterminé, donc ce qui comporte au moins une partie d'indétermination, ne peut ni être dit identique à soi ni être dit différent de soi. Il n'y a plus aucun problème de concevoir des entités infinies et néanmoins identique à soi, car la définition de l'identique à soi ne passe plus par le caractère d'être fini (ni la définition de l'altérité).
Mais c'est alors qu'il faut donc avoir une autre définition de l'identité à soi que celle qui se base sur le fini, si l'on veut affirmer de quelque chose qu'elle soit identique à soi. C'est là qu'apparaît la définition spinoziste de conservation d'essence ou de nature.
Un autre problème encore avec votre thèse, c'est que pour concevoir Dieu comme n'étant pas identique à soi-même sur base du fait qu'il contient des modifications infinies, il faut réintroduire le temps en Dieu lui-même. Car alors il faut concevoir Dieu à un temps x, se définissant par non seulement son essence mais également par toutes les modifications existant à ce moment x dans la durée, puis à un temps x + 1, où Dieu se définit par la même essence mais par des modifications qui sont différentes de celles qui existaient au moment x. Sinon pas moyen de comparer les 'différences' en Dieu, en tant que différences.
Or chez Spinoza le temps n'est que le fruit de notre imagination, donc n'est pertinent que du point de vue, justement, d'une de ces modifications précise, et non pas du point de vue de Dieu, qui est le point de vue de l'éternité. Il faut donc concevoir un Dieu ou une Nature qui s'expliquerait par le temps ou la durée, chose que proposent les sciences chimico-physiques actuelles, mais totalement contraire à la conception galiléenne de l'univers, et rejetée également par Spinoza, pour qui Dieu ne s'explique pas par le temps mais existe de toute éternité. Les modifications de la Substance ne sont donc perçues comme des changements que par les autres modifications (par nous, êtres humains, pe). Elles sont éternelles du point de vue de Dieu.
C'est ce qu'en science on a longtemps appelé la réversibilité de la nature. Le grand astrophysicien Stephen Hawking y croyait encore. C'est l'idée de pouvoir trouver une formule scientifique qui permettrait de déduire de ce qui existe aujourd'hui tous les événements précedents de l'univers, et inversement, le tout n'était que le développement de lois nécessaires, lois elles-mêmes entièrement immuables. Il suffit de connaître la loi sous laquelle tombe un phénomène naturel précis, ensemble avec l'état de chose qui caractérise cet événement à un moment précis, pour pouvoir en déduire tous les événements passés et futurs. C'est cela, des changements constants sur fond d'une immuabilité absolue (du moins est-ce comme ça que je conçois cette idée pour l'instant).
Spinoza se base entièrement sur cette conception scientifique galiléenne de la nature. Il a fallu le Nobel Ilya Prigogine pour créer une rupture, et pour commencer à s'imaginer des lois naturelles qui elles-mêmes changent, et cela selon des lois dont on peut démontrer qu'elles ne soient PAS nécessaires, donc pas immuables, pour pouvoir commencer à s'imaginer un univers dont le temps fait entièrement partie, et n'est plus un genre d'épiphénomène ou apparence, effet perceptible que d'un point de vue partiel. Ici, pour la première fois on a un résultat scientifique qui montre que le point de vue de Dieu, tel que l'a imaginé depuis son début la science moderne, n'est peut-être qu'un être de raison, une fiction humaine, liée à l'idée d'une nécessité ou détermination absolue. Cette idée de nécessité absolue serait alors elle-même 'datée', c'est-à-dire propre à ce que l'entendement humain a d'abord pu comprendre, la compréhension scientifique de phénomènes non absolument nécessaires mais tout de même entièrement 'réels' ne devenant possible qu'à partir du moment où nous disposions d'outils mathématiques adéquats pour pouvoir construire des théories physiques semblables.
Ces outils étant totalement absent du temps de Galilée et de Spinoza, il n'est pas étonnant, il me semble, de devoir constater chez Spinoza une substance où tout changement n'est que changement superficiel, permettant tout de même une définition de l'identité à soi qui se base sur une essence immuable. Ce n'est que quand on commence à lier l'idée de changement dans la nature à une idée de changement nécessaire dans l'essence de la nature que cette notion de l'identité à soi devient problématique.
C'est pourquoi je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous le trouvez problématique d'appeler quelque chose qui change constamment tout de même 'identique à soi'. Seulement, chez Spinoza, l'essence de Dieu ne change pas. Ce n'est que quand on conçoit la Nature comme changeant selon l'essence que l'on ne peut plus l'appeler identique à soi. A mon avis cette conception (d'une nature dont l'essence change) commence à s'imposer aujourd'hui, depuis quelques décennies. Mais on ne peut pas la projeter sur le spinozisme, sous peine d'anachronisme et donc de contresens.
Louisa
Hokousai a écrit :Un élément A (quel que soi cet élément A) n’est identique à lui même que s’il est quelque part limité .C’est cette limite qui permet l’identité .
comme je viens de le dire, si vous concevez la limitation comme opposée à l'infinité, vous arrivez à une définition de l'identique à soi qui n'est plus spinoziste car chez Spinoza la Substance a une essence éternelle c'est-à-dire qui ne change pas, qui reste toujours la même, indépendamment du fait d'être composée de manière finie ou infinie.
Mais on pourrait prendre cette limitation également dans un autre sens, celui d'être délimité, ou d'être déterminé (il me semble qu'au XVIIe, les deux significations sont très proches, voire identiques). Dans ce cas vous pouvez même maintenir le critère d'être limité pour définir un concept spinoziste de l'identité à soi, car alors ce ne serait que ce qui est indéterminé qui formerait une entité dont on pourrait difficilement dire qu'elle soit identique à soi-même. Or on sait qu'en Dieu, rien n'est indéterminé. Car une autre façon d'exprimer l'éternité spinoziste, c'est précisément le fait que ce qui est éternel est nécessaire ou déterminé d'agir d'une manière précise. En Dieu, tout est déterminé, tout est nécessaire. Dieu est déterminé d'agir selon la manière précise qui correspond à sa puissance. Celle-ci étant infinie, il est donc déterminé d'agir d'une infinité de manières. Ici aussi, être identique à soi et être infini ne s'oppose pas.
Si donc on comprend par 'être limité' le fait d'être déterminé, l'infinité n'enlève rien à cette détermination. Un ensemble infini mais entièrement déterminé peut toujours être identique à soi. C'est seulement un ensemble infini qui comporte une partie d'indétermination (ou qui serait entièrement indéterminée) qui n'est plus identique à soi, si on veut prendre le critère 'être limité' comme critère d'identité.
Autrement dit: vous semblez exiger un caractère commun à la notion d'identité et la notion d'altérité, celui d'être limité. Or si vous concevez cette limitation dans le sens d'être composé de manière finie, il me semble que ce qui est composé de manière infinie (la Substance spinoziste pe) n'est ni l'un ni l'autre: on ne peut pas dire qu'elle est identique à soi, mais on ne peut pas dire non plus qu'elle est différente de soi-même, vu que l'altérité exige également une composition finie.
Par contre, si l'on définit la limitation comme délimitation/détermination, ce problème disparaît. Alors seulement ce qui n'est pas entièrement déterminé, donc ce qui comporte au moins une partie d'indétermination, ne peut ni être dit identique à soi ni être dit différent de soi. Il n'y a plus aucun problème de concevoir des entités infinies et néanmoins identique à soi, car la définition de l'identique à soi ne passe plus par le caractère d'être fini (ni la définition de l'altérité).
Mais c'est alors qu'il faut donc avoir une autre définition de l'identité à soi que celle qui se base sur le fini, si l'on veut affirmer de quelque chose qu'elle soit identique à soi. C'est là qu'apparaît la définition spinoziste de conservation d'essence ou de nature.
Un autre problème encore avec votre thèse, c'est que pour concevoir Dieu comme n'étant pas identique à soi-même sur base du fait qu'il contient des modifications infinies, il faut réintroduire le temps en Dieu lui-même. Car alors il faut concevoir Dieu à un temps x, se définissant par non seulement son essence mais également par toutes les modifications existant à ce moment x dans la durée, puis à un temps x + 1, où Dieu se définit par la même essence mais par des modifications qui sont différentes de celles qui existaient au moment x. Sinon pas moyen de comparer les 'différences' en Dieu, en tant que différences.
Or chez Spinoza le temps n'est que le fruit de notre imagination, donc n'est pertinent que du point de vue, justement, d'une de ces modifications précise, et non pas du point de vue de Dieu, qui est le point de vue de l'éternité. Il faut donc concevoir un Dieu ou une Nature qui s'expliquerait par le temps ou la durée, chose que proposent les sciences chimico-physiques actuelles, mais totalement contraire à la conception galiléenne de l'univers, et rejetée également par Spinoza, pour qui Dieu ne s'explique pas par le temps mais existe de toute éternité. Les modifications de la Substance ne sont donc perçues comme des changements que par les autres modifications (par nous, êtres humains, pe). Elles sont éternelles du point de vue de Dieu.
C'est ce qu'en science on a longtemps appelé la réversibilité de la nature. Le grand astrophysicien Stephen Hawking y croyait encore. C'est l'idée de pouvoir trouver une formule scientifique qui permettrait de déduire de ce qui existe aujourd'hui tous les événements précedents de l'univers, et inversement, le tout n'était que le développement de lois nécessaires, lois elles-mêmes entièrement immuables. Il suffit de connaître la loi sous laquelle tombe un phénomène naturel précis, ensemble avec l'état de chose qui caractérise cet événement à un moment précis, pour pouvoir en déduire tous les événements passés et futurs. C'est cela, des changements constants sur fond d'une immuabilité absolue (du moins est-ce comme ça que je conçois cette idée pour l'instant).
Spinoza se base entièrement sur cette conception scientifique galiléenne de la nature. Il a fallu le Nobel Ilya Prigogine pour créer une rupture, et pour commencer à s'imaginer des lois naturelles qui elles-mêmes changent, et cela selon des lois dont on peut démontrer qu'elles ne soient PAS nécessaires, donc pas immuables, pour pouvoir commencer à s'imaginer un univers dont le temps fait entièrement partie, et n'est plus un genre d'épiphénomène ou apparence, effet perceptible que d'un point de vue partiel. Ici, pour la première fois on a un résultat scientifique qui montre que le point de vue de Dieu, tel que l'a imaginé depuis son début la science moderne, n'est peut-être qu'un être de raison, une fiction humaine, liée à l'idée d'une nécessité ou détermination absolue. Cette idée de nécessité absolue serait alors elle-même 'datée', c'est-à-dire propre à ce que l'entendement humain a d'abord pu comprendre, la compréhension scientifique de phénomènes non absolument nécessaires mais tout de même entièrement 'réels' ne devenant possible qu'à partir du moment où nous disposions d'outils mathématiques adéquats pour pouvoir construire des théories physiques semblables.
Ces outils étant totalement absent du temps de Galilée et de Spinoza, il n'est pas étonnant, il me semble, de devoir constater chez Spinoza une substance où tout changement n'est que changement superficiel, permettant tout de même une définition de l'identité à soi qui se base sur une essence immuable. Ce n'est que quand on commence à lier l'idée de changement dans la nature à une idée de changement nécessaire dans l'essence de la nature que cette notion de l'identité à soi devient problématique.
C'est pourquoi je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous le trouvez problématique d'appeler quelque chose qui change constamment tout de même 'identique à soi'. Seulement, chez Spinoza, l'essence de Dieu ne change pas. Ce n'est que quand on conçoit la Nature comme changeant selon l'essence que l'on ne peut plus l'appeler identique à soi. A mon avis cette conception (d'une nature dont l'essence change) commence à s'imposer aujourd'hui, depuis quelques décennies. Mais on ne peut pas la projeter sur le spinozisme, sous peine d'anachronisme et donc de contresens.
Louisa
- hokousai
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chère Louisa
vous dîtes
Mais c'est ce que je dis .Cela n'a pas de sens ( c'est un non sens ) que l'identité à soi de la substance .
On ne peut pas concevoir qu’une substance se distingue d’une autre .
Si elles ont des attributs différents elles n’ont rien de commun ente elle (ceci par la définition 3 et pas par la 4 def des attributs )
C’est parce que le concept de substance n’ a pas besoin du concept d’autre chose( def d ‘une substance indépendamment des attributs )
Qu’il ne peut y en avoir qu’une seule de concevable .
Mais je dis que cette substance est alors indistingable , ce qui ne signifie pas qu'elle soit inconnaissable . Elle est connaissable parce que nous y introduisons de la distinction . L’esprit humain est fini à tout le moins se connaît comme fini , il peut effectivement penser des stabilités .
Mais demeurant sous ce rapport ( à la finitude ) il ne peut comprendre aisément que l’idée d’identité à soi de la substance est un non sens .
Cette idée du non -sens de l’identité à soi de la substance introduit à l’infinitude .
bienà vous
hokousai
vous dîtes
Ce qui fait que l'expression 'non A' où A est la substance n'a pas de sens chez Spinoza. On ne peut donc construire l'expression 'non non A', car celle-ci demande à s'imaginer le contraire de 'non A', or 'non A' n'a pas de sens. Donc 'non non A' non plus.
Mais c'est ce que je dis .Cela n'a pas de sens ( c'est un non sens ) que l'identité à soi de la substance .
On ne peut pas concevoir qu’une substance se distingue d’une autre .
Si elles ont des attributs différents elles n’ont rien de commun ente elle (ceci par la définition 3 et pas par la 4 def des attributs )
C’est parce que le concept de substance n’ a pas besoin du concept d’autre chose( def d ‘une substance indépendamment des attributs )
Qu’il ne peut y en avoir qu’une seule de concevable .
Mais je dis que cette substance est alors indistingable , ce qui ne signifie pas qu'elle soit inconnaissable . Elle est connaissable parce que nous y introduisons de la distinction . L’esprit humain est fini à tout le moins se connaît comme fini , il peut effectivement penser des stabilités .
Mais demeurant sous ce rapport ( à la finitude ) il ne peut comprendre aisément que l’idée d’identité à soi de la substance est un non sens .
Cette idée du non -sens de l’identité à soi de la substance introduit à l’infinitude .
bienà vous
hokousai
Salut Miam,
je suis en train de lire l'intro d'Alain de Libera au De ente et essentia de Dietrich, et j'ai l'impression que quand Dietrich refuse la distinction réelle entre être et essence que propose Thomas, c'est parce que pour lui, toute essence est une essence en acte. L'être étant apparemment traditionnellement assimilé à la forme et à ce qui actualise la matière, Thomas veut respecter l'idée chrétienne d'une création du monde en liant l'actualisation d'une essence à l'acte propre de l'être. Dieu est alors celui qui décide d'ajouter à un moment x de l'être à une essence, soit d'informer la matière. Tandis que Dietrich suppose que l'on reste plus fidèle à Aristote en liant les notions de forme et d'essence, c'est-à-dire d'être et d'essence, l'être d'une essence d'une chose étant seulement différent de l'essence de cette chose par le fait de concevoir la chose d'une autre manière (l'essence de la chose signifiant la chose dans sa 'qualité', tandis que l'être de la chose signifie l'être-en-acte de son essence). Donc pour Dietrich toute essence est une essence en acte, et possède inévitablement déjà l'être.
Or quand je disais dans mon message précédent que Spinoza opère dans ce sens peut-être une synthèse entre Dietrich et Thomas, je ne voulais pas dire que le spinozisme résulterait dans sa globalité d'une synthèse entre ces deux doctrines, mais seulement que sur le point précis qui concerne la notion de l'existence, Spinoza semble proposer une théorie qui combine dans un certain sens les deux conceptions, celle de Dietrich et celle de Thomas.
Quand donc tu écris:
j'ai l'impression que tu ne réfères qu'à un seul 'mode d'existence' mentionné par Spinoza. Or dans le scolie de 5.29, il ajoute à cette existence temporelle (dans la durée) un autre type d'existence, celui d'exister de toute éternité dans les attributs de Dieu. Ce qui finalement n'est qu'une reprise du scolie de la 2.8, où il fait exactement la même distinction.
C'est pourquoi j'ai l'impression que quelque part Spinoza garde les deux types de concevoir l'existence, celle proposée par Dietrich et celle proposée par Thomas:
1) l'existence dans la durée = celle d'exister dans ce monde-ci = l'existence ou l'être tel que le conçoit Thomas (l'existence de la chose créée; seulement pour Spinoza la cause de ce type d'existence n'est pas Dieu, comme chez Thomas, mais un autre mode fini; d'où absence de création à proprement parler chez Spinoza)
2) l'existence en Dieu = celle de l'essence dans les attributs de Dieu = existence éternelle, autrement dit un type d'existence qui est toujours inévitablement lié à l'essence, tel que le propose Dietrich (seulement, contrairement à Dietrich l'essence ici n'enveloppe pas l'existence, car Dieu est cause aussi bien de l'existence que de l'essence des choses; mais si on tient compte du fait que chez Dietrich, l'identification être-essence ne vaut que pour les substances (les êtres/entia) et non pas pour les accidents (les 'de entis', ceux qui sont en autre chose, en des entia), il suffit de penser au fait que pour Spinoza seul Dieu est substance, et toutes les choses singulières sont des 'accidents' de la substance pour que cette différence s'efface, essence et existence s'identifiant également pour Spinoza dans la Substance).
Du premier type d'existence, Dieu n'est pas cause proprement dite, chez Spinoza. Ce qui cause un tel type d'existence, c'est un autre mode fini, qui est cause efficiente.
Du deuxième type d'existence, Dieu est cause immanente, tout comme il est cause immanente de l'essence de la chose.
On pourrait alors associer ceci à la 1.24. Que Dieu est cause du fait que les choses commencent à exister, ce pourrait alors être le Dieu cause de l'essence de la chose (ou de l'existence de l'essence en Dieu), tandis que le Dieu 'causa essendi' c'est le Dieu cause de l'existence dans le sens commun traditionnel, c'est-à-dire dans le sens de durer (ce qui au sens scolastique était désigné par le terme 'esse/être'). Car il y dit littéralement: "in existendo perseverent, sive (...) causam essendi".
Si en plus on sait que Spinoza définit l'essence d'une chose par l'effort de perséverer 'in suo esse', on obtient à nouveau le lien existence temporel - esse (dans le sens traditionnel d'exister dans la durée). Et en effet, on pourrait se demander ce que serait un 'perséverer' hors temps. Le conatus serait dès lors une définition de l'essence EN TANT QUE celle-ci peut être conçue comme existant dans le temps. Tandis que la définition de l'essence comme un degré de puissance serait une définition de l'essence EN TANT QUE celle-ci participe à l'essence de Dieu (1.34: La puissance de Dieu est son essence même), ayant une existence dans le deuxième sens (exister en Dieu).
Or qui dit puissance dit agir, qui dit agir dit acte, qui dit acte dit, traditionnellement, être. On sait que l'être de la Substance enveloppe l'existence nécessaire (2.10). Et c'est parce que cet être de la Substance enveloppe l'existence nécessaire tandis que l'essence de l'homme non, que l'être de la Substance n'appartient pas à l'essence de l'homme (démo cor 2.10). Cela ne serait alors qu'une autre façon de formuler que la puissance de Dieu est infinie, tandis que celle des modes finis n'en est qu'un degré. Autrement dit, ce n'est pas la puissance infinie qui appartient à l'essence de l'homme, l'essence de l'homme se définit précisément par le fait d'être un DEGRÉ de puissance, une puissance finie.
Conclusion: l'existence du mode fini est effectivement l'essence en tant qu'elle dure, mais comme ce type d'existence ou ce type de concevoir l'essence d'un mode fini est causé non pas par Dieu mais par un autre mode fini, j'ai l'impression que ce type d'existence s'approche de l'existence ou de l'être tel que le conçoit Thomas, dans le sens où il s'agit bien de l'existence dans ce monde, existence à laquelle tout mode tend (par son conatus), mais qui n'est pas enveloppée dans son essence (et en est donc dans ce sens 'séparé').
Or Spinoza se distancierait alors de Thomas d'abord en proposant de ne pas concevoir Dieu comme cause de ce type d'existence, mais un autre mode fini.
Puis sur ce même point de l'existence, Spinoza se distancierait également de Thomas de deux autres manières, tout en se rapprochant ici de Dietrich:
1) l'existence dans la durée n'est pas enveloppée dans l'essence du mode fini, mais n'en est pas 'réellement' séparée non plus: ce n'est qu'un 'modus significandi' du terme 'essence', autrement dit une façon de concevoir l'essence (l'essence 'en tant que existant dans la durée'). Chez Spinoza il ne peut s'agir d'une distinction réelle (donc entre existence dans la durée de l'essence et essence), vu que le temps n'est que le fruit de notre imagination, et qu'en Dieu donc en réalité toute essence est éternelle.
2) toute essence a également un autre mode d'existence, qui lui ne dépend pas de la présence d'un autre mode comme cause efficiente, mais qui a Dieu comme cause immanente, Dieu contenant et causant 'simultanément' l'existence de l'essence du mode fini et son essence elle-même. Ce type d'existence est 'toujours déjà' lié à l'essence, et ne peut en être séparé.
La définition de l'essence comme effort pour perséverer dans son être serait alors une manière très habile de lier indissociablement les deux types d'existence: l'essence elle-même comporte ici une dimension temporelle. Le seul 'acte' de l'essence, c'est alors celui de tendre à une continuation de l'existence dans la durée (en fonction de la puissance d'agir qui définit cette essence), mais cet acte lui-même existe de toute éternité, en Dieu, et a Dieu comme cause immanente. Tandis que le commencement et la continuation dans le temps dépendent avant tout des 'chocs' avec les autres modes finis.
Bref, voici quelques impressions que j'ai pour l'instant, et par rapport auxquelles cela m'intéresserait bien d'entendre ton avis. Je sais bien que dans tout ceci je m'écarte probablement de ta propre conception de l'être chez Spinoza, que je n'ai pas encore très bien comprise (j'ai compris que tu veux traduire 'causa essendi' par 'cause de l'essence', or ici j'aboutis plutôt à un raisonnement qui justifie la traduction de 'cause de l'être', voire 'cause de l'existence'), mais c'est justement pour ça que tes objections éventuelles m'intéressent, si tu en as le temps.
Sinon quand tu dis que tu conçois l'être et l'existence comme étant différent chez Spinoza: en quoi consisterait pour toi cette différence ? Comme Dieu est indivisible, je suppose qu'il doive de toute façon s'agir d'une distinction non pas réelle mais 'selon le mode de signifier'. L'être de la chose serait alors la chose en tant que x, l'existence de la chose la chose en tant que y. Mais je n'ai pas d'idée de ce que ce x ou y pourraient être.
Bien à toi,
Louisa
Miam a écrit :
3. Quant à Dietrich, on ne peut dire cela non plus parce que, contrairement à Spinoza, il assimile l'être et l'existence, tandis que pour Spinoza, l'existence d'un mode fini, c'est l'essence en tant qu'elle dure. Ce qui leur est commun, c'est de concevoir l'existant (= un être pour Spinoza) comme une essence bien formée.
je suis en train de lire l'intro d'Alain de Libera au De ente et essentia de Dietrich, et j'ai l'impression que quand Dietrich refuse la distinction réelle entre être et essence que propose Thomas, c'est parce que pour lui, toute essence est une essence en acte. L'être étant apparemment traditionnellement assimilé à la forme et à ce qui actualise la matière, Thomas veut respecter l'idée chrétienne d'une création du monde en liant l'actualisation d'une essence à l'acte propre de l'être. Dieu est alors celui qui décide d'ajouter à un moment x de l'être à une essence, soit d'informer la matière. Tandis que Dietrich suppose que l'on reste plus fidèle à Aristote en liant les notions de forme et d'essence, c'est-à-dire d'être et d'essence, l'être d'une essence d'une chose étant seulement différent de l'essence de cette chose par le fait de concevoir la chose d'une autre manière (l'essence de la chose signifiant la chose dans sa 'qualité', tandis que l'être de la chose signifie l'être-en-acte de son essence). Donc pour Dietrich toute essence est une essence en acte, et possède inévitablement déjà l'être.
Or quand je disais dans mon message précédent que Spinoza opère dans ce sens peut-être une synthèse entre Dietrich et Thomas, je ne voulais pas dire que le spinozisme résulterait dans sa globalité d'une synthèse entre ces deux doctrines, mais seulement que sur le point précis qui concerne la notion de l'existence, Spinoza semble proposer une théorie qui combine dans un certain sens les deux conceptions, celle de Dietrich et celle de Thomas.
Quand donc tu écris:
Miam a écrit : pour Spinoza, l'existence d'un mode fini, c'est l'essence en tant qu'elle dure.
j'ai l'impression que tu ne réfères qu'à un seul 'mode d'existence' mentionné par Spinoza. Or dans le scolie de 5.29, il ajoute à cette existence temporelle (dans la durée) un autre type d'existence, celui d'exister de toute éternité dans les attributs de Dieu. Ce qui finalement n'est qu'une reprise du scolie de la 2.8, où il fait exactement la même distinction.
C'est pourquoi j'ai l'impression que quelque part Spinoza garde les deux types de concevoir l'existence, celle proposée par Dietrich et celle proposée par Thomas:
1) l'existence dans la durée = celle d'exister dans ce monde-ci = l'existence ou l'être tel que le conçoit Thomas (l'existence de la chose créée; seulement pour Spinoza la cause de ce type d'existence n'est pas Dieu, comme chez Thomas, mais un autre mode fini; d'où absence de création à proprement parler chez Spinoza)
2) l'existence en Dieu = celle de l'essence dans les attributs de Dieu = existence éternelle, autrement dit un type d'existence qui est toujours inévitablement lié à l'essence, tel que le propose Dietrich (seulement, contrairement à Dietrich l'essence ici n'enveloppe pas l'existence, car Dieu est cause aussi bien de l'existence que de l'essence des choses; mais si on tient compte du fait que chez Dietrich, l'identification être-essence ne vaut que pour les substances (les êtres/entia) et non pas pour les accidents (les 'de entis', ceux qui sont en autre chose, en des entia), il suffit de penser au fait que pour Spinoza seul Dieu est substance, et toutes les choses singulières sont des 'accidents' de la substance pour que cette différence s'efface, essence et existence s'identifiant également pour Spinoza dans la Substance).
Du premier type d'existence, Dieu n'est pas cause proprement dite, chez Spinoza. Ce qui cause un tel type d'existence, c'est un autre mode fini, qui est cause efficiente.
Du deuxième type d'existence, Dieu est cause immanente, tout comme il est cause immanente de l'essence de la chose.
On pourrait alors associer ceci à la 1.24. Que Dieu est cause du fait que les choses commencent à exister, ce pourrait alors être le Dieu cause de l'essence de la chose (ou de l'existence de l'essence en Dieu), tandis que le Dieu 'causa essendi' c'est le Dieu cause de l'existence dans le sens commun traditionnel, c'est-à-dire dans le sens de durer (ce qui au sens scolastique était désigné par le terme 'esse/être'). Car il y dit littéralement: "in existendo perseverent, sive (...) causam essendi".
Si en plus on sait que Spinoza définit l'essence d'une chose par l'effort de perséverer 'in suo esse', on obtient à nouveau le lien existence temporel - esse (dans le sens traditionnel d'exister dans la durée). Et en effet, on pourrait se demander ce que serait un 'perséverer' hors temps. Le conatus serait dès lors une définition de l'essence EN TANT QUE celle-ci peut être conçue comme existant dans le temps. Tandis que la définition de l'essence comme un degré de puissance serait une définition de l'essence EN TANT QUE celle-ci participe à l'essence de Dieu (1.34: La puissance de Dieu est son essence même), ayant une existence dans le deuxième sens (exister en Dieu).
Or qui dit puissance dit agir, qui dit agir dit acte, qui dit acte dit, traditionnellement, être. On sait que l'être de la Substance enveloppe l'existence nécessaire (2.10). Et c'est parce que cet être de la Substance enveloppe l'existence nécessaire tandis que l'essence de l'homme non, que l'être de la Substance n'appartient pas à l'essence de l'homme (démo cor 2.10). Cela ne serait alors qu'une autre façon de formuler que la puissance de Dieu est infinie, tandis que celle des modes finis n'en est qu'un degré. Autrement dit, ce n'est pas la puissance infinie qui appartient à l'essence de l'homme, l'essence de l'homme se définit précisément par le fait d'être un DEGRÉ de puissance, une puissance finie.
Conclusion: l'existence du mode fini est effectivement l'essence en tant qu'elle dure, mais comme ce type d'existence ou ce type de concevoir l'essence d'un mode fini est causé non pas par Dieu mais par un autre mode fini, j'ai l'impression que ce type d'existence s'approche de l'existence ou de l'être tel que le conçoit Thomas, dans le sens où il s'agit bien de l'existence dans ce monde, existence à laquelle tout mode tend (par son conatus), mais qui n'est pas enveloppée dans son essence (et en est donc dans ce sens 'séparé').
Or Spinoza se distancierait alors de Thomas d'abord en proposant de ne pas concevoir Dieu comme cause de ce type d'existence, mais un autre mode fini.
Puis sur ce même point de l'existence, Spinoza se distancierait également de Thomas de deux autres manières, tout en se rapprochant ici de Dietrich:
1) l'existence dans la durée n'est pas enveloppée dans l'essence du mode fini, mais n'en est pas 'réellement' séparée non plus: ce n'est qu'un 'modus significandi' du terme 'essence', autrement dit une façon de concevoir l'essence (l'essence 'en tant que existant dans la durée'). Chez Spinoza il ne peut s'agir d'une distinction réelle (donc entre existence dans la durée de l'essence et essence), vu que le temps n'est que le fruit de notre imagination, et qu'en Dieu donc en réalité toute essence est éternelle.
2) toute essence a également un autre mode d'existence, qui lui ne dépend pas de la présence d'un autre mode comme cause efficiente, mais qui a Dieu comme cause immanente, Dieu contenant et causant 'simultanément' l'existence de l'essence du mode fini et son essence elle-même. Ce type d'existence est 'toujours déjà' lié à l'essence, et ne peut en être séparé.
La définition de l'essence comme effort pour perséverer dans son être serait alors une manière très habile de lier indissociablement les deux types d'existence: l'essence elle-même comporte ici une dimension temporelle. Le seul 'acte' de l'essence, c'est alors celui de tendre à une continuation de l'existence dans la durée (en fonction de la puissance d'agir qui définit cette essence), mais cet acte lui-même existe de toute éternité, en Dieu, et a Dieu comme cause immanente. Tandis que le commencement et la continuation dans le temps dépendent avant tout des 'chocs' avec les autres modes finis.
Bref, voici quelques impressions que j'ai pour l'instant, et par rapport auxquelles cela m'intéresserait bien d'entendre ton avis. Je sais bien que dans tout ceci je m'écarte probablement de ta propre conception de l'être chez Spinoza, que je n'ai pas encore très bien comprise (j'ai compris que tu veux traduire 'causa essendi' par 'cause de l'essence', or ici j'aboutis plutôt à un raisonnement qui justifie la traduction de 'cause de l'être', voire 'cause de l'existence'), mais c'est justement pour ça que tes objections éventuelles m'intéressent, si tu en as le temps.
Sinon quand tu dis que tu conçois l'être et l'existence comme étant différent chez Spinoza: en quoi consisterait pour toi cette différence ? Comme Dieu est indivisible, je suppose qu'il doive de toute façon s'agir d'une distinction non pas réelle mais 'selon le mode de signifier'. L'être de la chose serait alors la chose en tant que x, l'existence de la chose la chose en tant que y. Mais je n'ai pas d'idée de ce que ce x ou y pourraient être.
Bien à toi,
Louisa
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