Spinoza et les femmes / le "parallélisme"

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 21 déc. 2007, 12:22

j"aimerais rapprocher ce que vous dîtes """ Le corps sait percevoir des corps extérieurs,"""

de ce que dit Spinoza"" on ne sait pas ce que peut le corps ""

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Louisa
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Messagepar Louisa » 21 déc. 2007, 12:52

En tout cas, c'est Spinoza lui-même qui dit que nous ne PERCEVONS les corps extérieurs qu'à travers les affections de notre corps. Vous voulez dire que selon vous chez Spinoza le corps ne peut PAS percevoir des corps extérieurs? Nos yeux seraient aveugles, pour Spinoza? Si c'est ce que vous voulez dire: comment le fonder dans le texte?

Que nous ne savons pas ce que PEUT un corps ne veut pas du tout dire que nous ne savons RIEN du corps. L'Ethique même contient toute une théorie des corps, puis Spinoza semble avoir une certaine confiance en la médecine (qu'il a étudiée).

Pour rapidement déjà répondre à votre message à Enegoïd: vous concevez le rapport corps-esprit comme un rapport intérieur-extérieur. Ainsi vous spatialisez, comme vous le reconnaissez, ce rapport. Or on sait bien que l'espace est une catégorie propre à l'étendue. Comment définir le rapport Etendue - non Etendue en des termes propres à l'Etendue? Et comment conclure de cela que c'est tout de même le spirituel qui serait en quelque sorte "premier" (puisque vous voulez davantage "être vous-même" en pensant qu'en effectuant un travail corporel), quand pour concevoir ce rapport vous faites exactement l'inverse (primauté de la matière, puisque c'est en ses termes à elle que sera défini le rapport matière-conscience)?
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Messagepar Enegoid » 21 déc. 2007, 18:12

Louisa

Vous voulez dire que selon vous chez Spinoza le corps ne peut PAS percevoir des corps extérieurs? Nos yeux seraient aveugles, pour Spinoza?


A mon avis le corps ne perçoit rien : il se contente de bouger et d'être modifié. Le yeux ne perçoivent rien : ils sont traversés par des rayons lumineux. La pensée est une idée des modifications (mouvements) du corps. Dans le cas de la vue, une idée de transformations neuroniques associées à la vue.

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hokousai
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Messagepar hokousai » 21 déc. 2007, 20:24

Comment définir le rapport Etendue - non Etendue en des termes propres à l'Etendue?


C'est justement ce que je ne peux pas faire et c'est pourquoi votre démonstration en trente secondes est bancale .

........................................

Lorsque je suis fermé à la conscience du monde ( quand je n'ai plus conscience de moi et du monde ) le monde n'est pas plus corps qu'esprit , il est même à vrai dire rien puisque je ne suis pas conscient .
A tout le moins je ne connais pas ce dont je ne suis pas conscient de connaître .
C'est à dire que je n'ai pas la certitude de savoir (ou de connaître ). Cette certitude ne m'apparaît que consciente .(en conscience)
Qu'est ce que serait une certitude inconsciente ?

Ce que j'appelle proprement ma pensée n' est pas étendue et j’ ai le rapport le plus intime à ma pensée (et en ce sens Descartes à raison avec son cogito )
Et puis j’ai un rapport , avec un corps , mais c’est le mien il est relié au cogito et en il en dépend . Mon corps est déjà à une certaine distance de moi- pensant .
Et puis il y a les corps extérieurs encore plus éloignés de moi .

II est de fait que je ne reconnaît pas le monde comme étant moi même .
et pourtant ma pensée va au delà de ce moi -même .
La puissance de me reconnaître moi même dans le monde décroît dans le corps (mon corps ) puis encore plus dans les corps extérieurs au mien .
Les corps sont la pensée faible , plus incertaine , plus confuse .Les choses (étendues ) gardent toujours un mystère alors que moi même je me sais clairement comme moi même .

L’ étendue n’est claire qu’à la pensée claire et théorique mais les corps étendus ne me sont pas si clairement connus que ma pensée . L’attribut étendue est déduit mais les discussions sans fin sur ce que sont les corps sur ce que c’est que la matière montre que nous n’avons pas une connaissance claire de l’Etendue .

Ce que c’est que la pensée nous le savons intimement comme quelque chose de propre à nous même , l’étendue comme secondairement propre à nous même .
Nous pouvons dire que nous habitons notre corps mais nous ne disons pas que nous habitons notre conscience de nous même .
Qui habiterait cette conscience , sinon nous même conscient ?.


hokousai

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Messagepar Louisa » 22 déc. 2007, 00:08

Louisa:
Comment définir le rapport Etendue - non Etendue en des termes propres à l'Etendue?

Hokopusai:
C'est justement ce que je ne peux pas faire et c'est pourquoi votre démonstration en trente secondes est bancale .


Il faudrait d'abord me montrer en quoi ma démonstration n'est pas spinoziste (puisque vous semblez la contester). Puis comment conclure de cette démonstration que le rapport Pensée-Etendue y serait formulé en des termes propres à l'Etendue??? Là aussi il faudrait que vous me le montrez avant de pouvoir comprendre ce que vous écrivez ici.

Sinon je rappelle que je vous ai posé la question précisément parce que dans votre dernier message à la page 5 ici, c'est vous qui introduisez la spatialisation pour définir le rapport corps-esprit. Ce que vous répétez en disant:

Hokousai a écrit :Mon corps est déjà à une certaine distance de moi- pensant .


si votre corps est à une certaine DISTANCE de votre esprit, vous définissez le rapport corps-esprit par une DISTANCE, c'est-à-dire par une propriété corporelle. Pour moi, cela revient à réduire l'esprit à quelque chose de corporel. Ce qui est assez contradictoire avec le primat de l'esprit que vous semblez néanmoins vouloir affirmer, non?

Hokousai a écrit :Les corps sont la pensée faible , plus incertaine , plus confuse .


du coup, les corps sont de la pensée ... ? D'abord vous me dites qu'il y a une distance entre corps et esprit ... comme si l'esprit se trouve dans un autre lieu que le corps, et qu'une certaine étendue les sépare (ce qui suppose que l'esprit aussi est de l'ordre de l'étendue), maintenant vous fait du corps une sous-espèce du genre général "pensée" (le corps est encore de la pensée, mais une forme spécifique de pensée: de la pensée faible).
Bref, je crains que je ne vous comprends pas encore très bien. Vous me semblez dire tout et son contraire (l'esprit est de l'ordre de l'étendue, le corps est de l'ordre de la pensée).

Hokousai a écrit :Ce que c’est que la pensée nous le savons intimement comme quelque chose de propre à nous même , l’étendue comme secondairement propre à nous même .


en quoi l'étendue serait-elle secondaire??

Hokousai a écrit :Qu'est ce que serait une certitude inconsciente ?


tout simplement une "évidence", non? Quand par exemple je conduis la voiture et je discute en même temps de philosophie avec celui qui se trouve à côté de moi, c'est bien la certitude inconsciente qui me permet de changer de vitesse, d'arrêter devant les feux rouges, de clignoter etcetera SANS y penser consciemment. Autre exemple: j'ai fait tellement de fois l'escalier qui mène de mon appartement aux toilettes que je sais le faire dans le noir et tout en pensant à autre chose. Je n'ai aucune idée de combien de marches il y a (la preuve: quand je commence à compter, je me trompe à chaque fois), mais je suis absolument certain d'être arrivée à la porte à un certain moment. C'est bien qu'inconsciemment, j'ai acquis une certitude par rapport au nombre de marches de l'escalier, non?
Il en va de même pour les idées que nous trouvons évidentes. Celles-ci se basent sur des automatismes inconscients de l'esprit, qui nous donnent le sentiment de certitude.

Hokousai a écrit :Ce que j'appelle proprement ma pensée n' est pas étendue et j’ ai le rapport le plus intime à ma pensée (et en ce sens Descartes à raison avec son cogito )
Et puis j’ai un rapport , avec un corps , mais c’est le mien il est relié au cogito et en il en dépend .


c'est en effet Descartes qui a lancé cette idée-là. Aujourd'hui en Occident, elle est à mon sens devenue une "évidence", dans la mesure où l'on présuppose toujours déjà que le corps dépend de l'esprit. Mais justement, c'est là que Spinoza nous prévient: attention, nous ne savons pas ce que peut un corps! Quand l'esprit dort, le corps peut se promener sur un toit et autres choses dans ce genre. C'est ce qui prouve, pour lui, que le corps et bel et bien INDEPENDANT de l'esprit, même s'il s'agit d'une seule et même chose.

Donc encore une fois, pour autant que je vous aie compris, j'ai l'impression que vous confondez scission et distinction (Descartes aussi, d'ailleurs). Ce qui est réellement distinct à vos yeux doit être physiquement séparable. Ce n'est pas le cas chez Spinoza (ni chez Leibniz par exemple, pour prendre un autre contemporain). Là il y a des choses distinctes qui néanmoins sont inséparables.

Personnellement, je me retrouve beaucoup plus dans des pensées qui proposent de concevoir une inséparabilité entre le corps et l'esprit que dans celles qui supposent une séparation absolue. Je ne me sens pas du tout davantage "moi-même" en pensant qu'en agissant corporellement. Je ne me reconnais donc guère dans l'idée hégelienne d'une éventuelle "aliénation" par rapport à un "soi", dans l'idée d'une séparation entre le moi et quelque chose qui est censé lui appartenir également mais "moins" (le corps par exemple, ou l'inconscient pour les psychanalystes). Je ne la sens pas, cette aliénation. Ou plutôt, je ne vois pas comment elle pourrait nous aider à résoudre certains problèmes humains. C'est pourquoi j'ai l'impression, comme j'ai déjà dit, qu'il faut déjà PRESUPPOSER une séparation esprit-corps avant de pouvoir "l'expérimenter". Il suffit de ne pas la présupposer pour expérimenter plutôt une unité profonde entre l'esprit et le corps.
Mais sans doute vous ne serez pas d'accord?
Louisa

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Ulis
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Messagepar Ulis » 22 déc. 2007, 09:21

Chers amis,
Et voilà dans quelle bouillie insondable vous êtes (Hokousai et Louisa) à vous égarer dans le parallèlisme.
L'âme, la main et le coeur sont des parties du corps. Il n'empêche qu'ils ont des fonctions radicalement différentes pour assurer notre conservation.
ulis

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Messagepar Pourquoipas » 22 déc. 2007, 13:07

Ulis a écrit :Chers amis,
Et voilà dans quelle bouillie insondable vous êtes (Hokousai et Louisa) à vous égarer dans le parallèlisme.

Traiter de "bouillie insondable" des réflexions, dont on peut discuter mais qui ne sont pas dénuées d'intérêt, c'est aller un peu vite en besogne, cher monsieur.
Ulis a écrit :L'âme, la main et le coeur sont des parties du corps. Il n'empêche qu'ils ont des fonctions radicalement différentes pour assurer notre conservation.
ulis

Un peu d'argumentation philosophique et scientifique ne serait pas de trop, cher monsieur. Car là, question alimentation, ce n'est plus de bouillie qu'il s'agit, mais d'un vieil os sans aucune viande dessus.

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sescho
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Messagepar sescho » 22 déc. 2007, 15:51

Je ne vois plus qu’une explication : le titre du fil est en fait un hommage (mérité) à Louisa…

Quelques réflexions en vrac :

- Sur le parallélisme, finalement je me dis qu’il n’est pas vraiment réfutable, et Spinoza est à son sujet très conséquent : lorsqu’on lui dit que l’âme dirige le corps, quoiqu’il ne l’accorde pas (tout en ayant parfaite conscience de ce qui fait dire cela, cela va sans dire), il dit que de toute façon tout le monde accorde qu’une pensée n’est pas étendue. Et effectivement, comme il a été dit plusieurs fois, suivant la connaissance intuitive, nous n’avons strictement aucune notion de lien entre pensée et étendue. Il a bien été montré dans ce qui précède que ce sont des liens a posteriori qui sont établis par exemple par la neurobiologie, mais qu’aucune pensée n’est, à proprement parler, déduite de mécanismes physiques : elle n’y est que corrélée.

Par ailleurs, quoiqu’il mobilise le peu de savoir mécanique de son époque, soit le principe d’inertie et la conservation de la quantité de mouvement, il a l’intelligence de dire qu’on ne sait pas tout ce que peut le corps. Dans ces conditions, il ne saurait être contredit, je pense : personne, effectivement, ne peut déduire strictement une pensée de phénomènes physiques. Il n’y a pas d’objection a priori à dire que la neurobiologie, par exemple, est parfaitement en accord avec le parallélisme : elle cherche à relier l’enchaînement des phénomènes physiques dans le corps et l’enchaînement des pensées dans un strict parallélisme. Le reste est extrapolation.

- En passant, je continue à dire que selon Spinoza nous ne pouvons avoir d’idée adéquate de chose singulière et je ne vois au contraire nulle trace de l’opposé dans les textes de Spinoza. Un débat ou deux ont déjà eu lieu sur le sujet.

- Je ne crois pas que l’infinité d’attributs vienne de ce qu’il ne peut y avoir qu’un seul attribut, mais de ce que l’on en pose deux. Pour la substance l’alternative est « un seul attribut » (la substance même, auquel cas la notion d’attribut disparaît) ou une infinité. Tout chiffre en dehors de cela sent l’approximation.

L’alternative est donc la suivante : 1) La substance est Penmat (Pensée-Matière) et ce sont nos limites (difficilement contestables, autrement dit le Mystère) qui nous obligent à les distinguer. 2) Il y a une infinité d’attributs dont nous ne connaissons que deux, ceux-ci – âmes différentes par ailleurs – ou le tout en parallèle.

Je penche nettement pour la première (plus économique) mais, cela étant posé, les remarques précédentes s’appliquent : nous ne pouvons rien en faire, et parvenons donc rapidement au même point.

- Sur la relation entre corps et mental, la première question à se poser me semble-t-il est : comment pouvons nous penser les corps. Spinoza répond logiquement : parce que nous sommes l’idée (et pas : nous avons l’idée) d’un certain corps, qui est affecté par les autres. Ce sont ces idées d’affections du corps qui nous donnent la pensée du corps, des corps extérieurs et de la pensée même. Il n’y a plus d’objections je pense, une fois ceci acquis, à déduire des propriétés de l’esprit des propriétés des corps ; simplement nous ne sommes plus dans le parallélisme, qui ne concerne que les choses singulières et leurs affections, mais dans l’ordre des idées adéquates, qui voient l’essence de Dieu.

- Pour ce qui concerne l’hypothèse Penmat, une de ses conséquences est de ne pas fonder la pensée – et en particulier la vérité – en Dieu. Elle sent alors beaucoup plus la synthèse kantienne (pour autant que je puisse en juger) entre empirisme et Raison.

Dans ce cadre, qui touche au fondement même : la vérité, je crois qu’on peut dire qu’une des bases de la philosophie telle qu’exposée par Spinoza, et qui pourrait être le premier axiome de l’Ethique est exprimé (même si ce n’est certes pas la place normale d’un axiome) à la fin de E2P43S :

Spinoza, Ethique, traduit par E. Saisset, a écrit :E1A6 : Une idée vraie doit s’accorder avec son objet .

E2D4. Par idée adéquate j’entends une idée qui, considérée en soi et sans regard à son objet, a toutes les propriétés, toutes les dénominations intrinsèques d’une idée vraie.

E2P34 : Toute idée, qui est complète en nous, c’est-à-dire adéquate et parfaite, est une idée vraie.

Démonstration : Quand nous disons qu’il y a en nous une idée adéquate et parfaite, c’est comme si nous disions (par le Corollaire de la Propos. 11) qu’elle est en Dieu adéquate et parfaite, en tant qu’il constitue l’essence de notre âme ; par conséquent, c’est comme si nous disions (par la Propos. 32, partie 2) qu’une telle idée est vraie.

E2P43 : Celui qui a une idée vraie sait, en même temps, qu’il a cette idée et ne peut douter de la vérité de la chose qu’elle représente.

Démonstration : Une idée vraie dans l’âme humaine, c’est une idée qui est en Dieu d’une manière adéquate en tant que sa nature est exprimée par la nature humaine (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2). Supposons donc en Dieu, en tant qu’il est exprimé par la nature de l’âme humaine, l’idée adéquate A. Il doit y avoir également en Dieu l’idée A, laquelle a le même rapport avec Dieu que A elle-même (par la Propos. 20, partie 2, dont la démonstration est générale). Or, l’idée A se rapporte, par l’hypothèse, à Dieu en tant qu’il est exprimé par la nature de l’âme humaine. Donc l’idée de A aura avec Dieu le même rapport, c’est-à-dire (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2) que cette idée adéquate de l’idée A sera aussi dans cette âme qui possède déjà l’idée A ; par conséquent, celui qui a une idée adéquate, en d’autres termes (par la Propos. 34, part. 2), celui qui connaît une chose selon sa vraie nature, doit avoir en même temps de sa connaissance une idée adéquate, c’est-à-dire une connaissance vraie, et par une suite évidente posséder la certitude. C. Q. F. D.

Scholie : J’ai expliqué (dans le Schol. de la Propos. 21, part. 2) en quoi consiste l’idée d’une idée. Mais il faut remarquer que la précédente proposition est, de soi, assez évidente. Il n’est personne, en effet, qui, ayant une idée vraie, ignore qu’une idée vraie enveloppe la certitude ; car qu’est-ce qu’avoir une idée vraie ? c’est connaître parfaitement, ou aussi bien que possible, une chose. On ne peut donc nous contredire ici, à moins de s’imaginer qu’une idée est une chose muette et inanimée, comme une peinture, et non un mode de la pensée, et l’acte même du penser. D’ailleurs, je le demande, qui peut savoir qu’il comprend une certaine chose, si déjà il ne l’a comprise ? En d’autres termes, si déjà vous n’êtes certain d’une chose, comment pouvez-vous savoir que vous en êtes certain ? Et puis, quelle règle de vérité trouvera-t-on plus claire et plus certaine qu’une idée vrai ? Certes, de même que la lumière se montre soi-même et avec soi montre les ténèbres, ainsi la vérité est à elle-même son criterium et elle est aussi celui de l’erreur.
Cela suffit, à mon avis, pour répondre à tout cet ordre de questions. Si, en effet, une idée vraie ne se distingue d’une idée fausse que par sa convenance avec son objet, il en résulte donc qu’une idée vraie ne surpasse pas une idée fausse en réalité et en perfection (du moins quand on ne considère que leurs dénominations intrinsèques), et il y a la même égalité de perfection entre un homme qui a des idées vraies et celui qui en a de fausses. De plus, d’où vient que les hommes ont des idées fausses ? Enfin, comment un homme saura-t-il qu’il a des idées qui sont d’accord avec leurs objets ? Pour moi, je répète que je crois avoir déjà répondu à ces questions ; car, pour ce qui est de la différence entre une idée vraie et une idée fausse, il résulte de la Propos. 35, partie 2, que celle-là est par rapport à celle-ci comme l’être au non-être. Quant aux causes de la fausseté des idées, je les ai expliquées (depuis la Propos. l9 jusqu’à la Propos. 35 avec son Scholie), et cela de la manière la plus claire. On voit aussi par ces principes la différence qui sépare l’homme qui a des idées vraies et celui qui n’a que des idées fausses. Reste le dernier point que j’ai touché : comment un homme pourra-t-il savoir qu’il a une idée vraie, laquelle s’accorde avec son objet ? Or, j’ai expliqué plus que suffisamment tout à l’heure que l’on devra savoir qu’on a une telle idée par cela seul qu’on aura cette même idée, la vérité étant d’elle-même son propre signe. Ajoutez à cela que notre âme, en tant qu’elle perçoit les choses suivant leur vraie nature, est une partie de l’entendement infini de Dieu (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2) ; par conséquent, il est nécessaire que les idées claires et distinctes de notre âme soient vraies comme celles de Dieu même.


Serge
Modifié en dernier par sescho le 23 déc. 2007, 11:10, modifié 2 fois.
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Messagepar Ulis » 22 déc. 2007, 21:28

à Pourquoipas
" à l'os" comme en sport, c'est un objectif !
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Messagepar hokousai » 23 déc. 2007, 01:26

chère Louisa

Il faudrait d'abord me montrer en quoi ma démonstration n'est pas spinoziste (puisque vous semblez la contester).
je vous cite
DEMO.
Les corps singuliers, autrement dit tel et tel corps, sont des manières, qui expriment la nature de Dieu de manièr précise et déterminée (par le corollaire d'E1P25: "Les choses particulières ne sont rien que des affections des attributs de Dieu, autrement dit des manières par lesquelles les attributs de Dieu s'expriment de manière précise et déterminée"). Appartient donc à Dieu (par la définition 5 p.1) un attribut, dont tous les corps singuliers enveloppent le concept, et par lequel aussi ils se conçoivent. Donc l'Etendue est un parmi l'infinité des attributs de Dieu, qui exprime l'essence éternelle et infinie de Dieu (voir la définition 6 p.1), autrement dit, Dieu est chose étendue. CQFD.



Ce que vous démontrez est que parce que nous concevons des choses étendues alors l’étendue peut être conçue ..Ce n’est pas l’étendue qui est démontrée mais que nous pouvons la concevoir ( on est d’accord nous pouvons la concevoir )

Quand Spinoza démontre l’ attribut pensée il conclut à un attribut par lequel elles se conçoivent . vous faites exactement la même chose mais pour des corps .
Ou bien on ne peut pas démontrer comme pour la pensée( et en terme de corps ) ou bien les corps sont des pensées .

vous définissez le rapport corps-esprit par une DISTANCE, c'est-à-dire par une propriété corporelle.


Ah mais non . C’est la distance qui définit l’espace et non l’espace qui définit la distance. La distance est une impuissance (je ne suis pas au-delà d’une certaine puissance d être moi-même ) et au-delà je pâtis ( je suis passif , je subis , je n’ y suis pas libre et puissant comme dans mon empire )
Mon corps est ce sur quoi j’agis , il est déjà à distance de moi-même pensant et les corps extérieurs sont plus ou moins étrangers à ma puissance d’agir .L’ étendue ( et je suis d’accord avec Bergson ) est issue de mon activité .
Il n’est pas exclus d’ ailleurs que la difficulté de penser n’introduise pas une certaine idée d’espace mental dans lequel se meuvent les idées .)

Hokousai


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