Spinoza et les femmes / le "parallélisme"

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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Louisa
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Messagepar Louisa » 30 déc. 2007, 12:16

d'accord, alors on peut en effet deviner ce qui à vos yeux serait la bonne réponse: il faut garder la tête, ou la fleur de la fleur, parce que vous localisez l'esprit dans la tête (donc symboliquement dans la fleur).

Mais cela, on le savait déjà il y a quelques pages/jours, non ... ?

Ma question était (également depuis quelques jours): POURQUOI vous voulez spatialiser ce qui par essence est non spatial (dans la langue française, je veux dire .. voir le Petit Robert)? Vous pouvez bien sûr proposer l'idée d'un esprit spatial, qui se trouve à un endroit spécifique. Si vous avez fait cette "observation", et si vous nous dites simplement cela, alors je ne peux que vous répondre ce que je dis depuis des pages: sans davantage de précisions de votre part, je n'ai rien à dire à ce sujet, je suis vraiment désolée. Si d'autres ici en pensent quelque chose, ils vous répondront sans doute ... .
Cordialement,
Louisa

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Messagepar Louisa » 30 déc. 2007, 13:50

PS: n'étant pas très satisfaite par mon message précédent ... dernière tentative, tout de même ...

Je suppose que pour vous l'esprit et le moi sont synonymes (puisque dans vos messages précédents vous sautez sans transition de l'un à l'autre). Dans ce cas, vous dire que l'esprit est ce qui est censé être non corporel ne vous aide pas, bien sûr, car vous pouvez toujours définir le moi comme quelque chose de corporel. Et alors la question se pose effectivement de savoir où dans le corps ce 'moi' peut résider (la tête, les mains, les pieds ...).

Alors vous me dites qu'une "observation intime" et indéfinissable vous donne l'impression que le moi se trouve dans la tête. Mais cette idée-là est déjà vieille de quatre siècles ... !! C'est bien Descartes qui a localisé l'esprit dans la tête (la glande pinéale). Depuis lors, cette idée en Occident fait ENTIEREMENT partie du sens commun. N'importe qui dans la rue vous répondra, quand vous lui posez votre question ci-dessus, que son esprit se trouve bien évidemment dans la tête et non pas dans les pieds. Mais pourquoi prendre une idée de philosophe pour une vérité, une évidence "indéfinissable"... ?

Pour moi c'est exactement l'inverse: nos "observations intimes" sont façonnées par des produits culturels, dont notamment les idées des philosophes du passé qui ont eu le plus d'influence sur la mentalité globale des gens.

C'est pourquoi lire des philosophes à mes yeux est intéressant: on découvre (si l'exercice réussit) le fait que ce qui nous semble par "observation intime" être évident peut parfois n'être qu'une simple idée partagée par tous, et non interrogée. La lecture d'autres philosophes peut alors permettre d'entrevoir d'autres idées, et rendre par là possible d'observer réellement autre chose.

Spinoza est pour moi précisément celui qui invite à quitter le cartésianisme qui est devenu le sens commun (vous pouvez bien en faire une "variation", en disant que pour vous esprit et corps sont la même chose, mais dès que vous localisez l'esprit dans la tête, vous êtes en cela cartésien).

Si vous voulez savoir comment penser l'idée que l'esprit n'est PAS localisé dans un point précis dans le corps, mais que esprit et corps SONT une seule et même chose (et non pas deux substances différentes, ni deux partie d'une seule et même substance (l'esprit étant alors une partie du corps, quand vous voulez le localiser, ou le corps étant une partie de l'esprit, quand vous réduisez tout ce qui est corporel à ce qui ne sont que des idées, comme vous l'avez fait ici aussi)), alors je ne peux que vous conseiller la lecture du neurobiologiste Damasio, Spinoza avait raison. Joie et tristesse, le cerveau des émotions.

Dans ce livre Damasio a pris quelques idées centrales de Spinoza comme "guides" dans sa recherche, notamment celle qui dit que l'esprit et le corps sont une seule et même chose. Et effectivement, en prenant cette idée comme hypothèse de recherche, il a trouvé un tas de choses fort intéressantes, qui à mon sens peuvent vous aider à penser le rapport esprit-corps autrement que ce que vous faites spontanément. Il a en effet découvert qu'en fait, cela ne suffit pas du tout de se limiter au cerveau si l'on veut étudier l'esprit. Il faut étudier TOUT LE CORPS. On ne sait PAS diviser le corps en deux, tel que vous le proposez ici, parce que "l'esprit" a autant besoin de la tête que du reste!!

Si cette découverte est si révolutionnaire, c'est parce que précisément, depuis des siècles en Occident matérialiste on l'a pris pour une évidence que de localiser l'esprit dans la tête (le cerveau) ... ! C'est parce que les découvertes de Damasio vont à l'encontre du sens commun, que sa recherche est si intéressante.

Mais je crois qu'on n'a pas besoin de scientifique pour arrêter de se baser spontanément sur nos évidences (ou "observations intimes"). Il suffit de lire de la philosophie et d'être prêt à SE remettre en question quand on lit un philosophe, au lieu de questionner le philosophe sur base de ses propres évidences.

Si j'ai tellement souligné ce point dans mes messages précédents, c'est parce qu'il me semble que vous êtes un lecteur de philosophie déjà fort "aguerri", vous avez peut-être même lu beaucoup plus de philosophes que moi, qui viens de découvrir la philosophie il y a quelques années seulement. C'est pourquoi je ne peux pas lire vos messages comme les messages d'un "débutant", c'est pourquoi j'ai voulu signaler qu'à mon sens la façon dont vous abordez Spinoza (et donc la philosophie, je suppose) me semble être peu "féconde", au sens où depuis que nous discutons, vous et moi (donc depuis quelques années, je suppose), j'ai toujours très vite la même impression: vous identifiez ce qui vous semble être évident à une communication (pensée?) philosophique.

Je retrouve moi-même cette idée dans beaucoup de philosophie dite "analytique", mais je suis tout à fait d'accord avec Deleuze quand celui-ci dit qu'il ne s'agit de rien d'autre que d'un "assassinat de la philosophie" (ce qui n'est pas du tout un "reproche" par rapport à vous en tant que personne, bien sûr): au lieu d'interroger ses propres évidences en lisant de la philo, on va identifier toute parole philosophique a une parole qui serait par définition "dogmatique", et on va croire que dès que l'on s'en tient à ses propres évidences en se confrontant avec un philosophe, on est en train de "penser par soi-même" et donc en train de philosopher.

On retrouve la même idée dans des manuels "modernes" pour professeurs de philosophie en secondaire: il s'agirait d'apprendre à philosopher par la "discussion", car toute lecture d'un texte philosophique est censée être "démodé", trop "autoritaire" etc. Et donc on laisse tomber toute l'histoire de la philosophie pour proposer aux enfants qu'ils discutent un peu entre eux de telle ou telle notion ou question. Le but c'est qu'ils apprennent à s'exprimer et à "penser par eux-mêmes" c'est-à-dire à faire un peu "d'introspection", à essayer de formuler une opinion (qui donc traduit ce qu'ils ressentent comme étant évident), et à essayer de la défendre par rapport aux opinions des autres. JAMAIS ces enfants sont confronté à un véritable concept philosophique dans ce qu'il a de philosophique (donc dans ce qui oblige de QUITTER ses évidences, et de penser non plus par soi-même c'est-à-dire par ses propres évidences mais de penser par d'AUTRES idées).

Donc voilà pourquoi je n'avais/ai pas envie de rentrer dans votre jeu, voilà pourquoi j'ai essayé de montrer en quoi à mon sens si l'on aborde la philosophie comme ça, on rate des choses essentielles. La philosophie n'est PAS un genre d'introspection, elle invite à PENSER AUTREMENT. Du moins est-ce ma propre conviction, ou plutôt voici la conception de la philosophie dans laquelle je peux m'inscrire et que je veux apprendre à prolonger moi-même.

Mais cela implique également d'accepter d'éventuelles critiques de cette conception de la philosophie, bien sûr. Si donc vous croyez que je me trompe, que ce qui depuis 2500 années relie les philosophes entre eux c'est tout à fait autre chose que ce que je suis en train de défendre ici, je vous écouterez avec plaisir.
louisa

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Messagepar hokousai » 30 déc. 2007, 15:12

à Louisa


Je n’ai fait que relever votre affirmation:
La question de savoir OÙ se trouve l'esprit ou le moi DANS le corps, est selon moi une question qui a peu de sens

Pour vous montrer qu’elle à non seulement un sens mais que de plus elle relève du sens commun (ou du bon sens si vous voulez bien ) ce que vous confirmez .
N’importe qui dans la rue et qui ignore tout de Descartes vous dira qu’il préfère garder sa tête .Et je suppose qu’avant Descartes n’importe qui aurait répondu de même .

Je vous demandais d’interroger une évidence ce qui me semble non seulement le minimum mais le minimum nécessaire ..

………………………………………………………… ;
quand vous réduisez tout ce qui est corporel à ce qui ne sont que des idées, comme vous l'avez fait ici aussi)


Erreur je ne l’ai pas fait .
…………………………………………………………

La philosophie n'est PAS un genre d'introspection, elle invite à PENSER AUTREMENT


Je vous dirai bien qu’avant de penser autrement il faudrait avoir claire conscience de comment vous pensez non-autrement , c’est à dire de comment vous pensez tout court .

En l’occurrence du comment et du pourquoi vous excluez du champ philosophique les idées claires et distinctes pour m’en proposer de moins claires et de moins distinctes.

Comme celle-ci « "" Il a en effet découvert qu'en fait, cela ne suffit pas du tout de se limiter au cerveau si l'on veut étudier l'esprit. Il faut étudier TOUT LE CORPS."" » » ce qui est peu clair pour moi qui n’avait pas déjà pas encore découvert qu 'il fallait se limiter à quoique ce soit donc pas particulièrement au cerveau .

……………………… ...................

Je ne vous ai pas parlé d’introspection mais d’inspection ou d’observation et éventuellement d’expérience de pensée à vous qui me parlez d’expérimenter les concepts mais qui avez butté sur une expérience des plus élémentaires .Car hélas on peut assez bien s’imaginer en France depuis l’invention d’un certain docteur ce que c’est (réellement ) avoir la tête tombée dans le panier .
……………………………………………….

Proposons la lecture de Spinoza à une machine ( J’allais dire à mon chien ) laquelle n’a aucune de mes évidences . Je ne dis pas que la machine ne sortira pas quelque chose , mais qu’en aura-t-elle compris ?
Je vous pose la question : estimez vous qu’une machine puisse comprendre Spinoza ?
Comment se fait- il que vous soyez persuadée que vous , vous comprenez mieux Spinoza qu’une machine ? Après tout vous êtes bien persuadée de le comprendre mieux que moi .

Mais de quoi êtes finalement êtes vous si persuadée ?

hokousai


PS Méfions nous des synonymies . Il y a deux mots "esprit "et "moi" et il y a encore " moi " et " le moi "

Que Deleuze ait senti le sol se dérober sous ses pieds m’est assez indifférent .

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Messagepar Louisa » 30 déc. 2007, 16:18

Hokousai a écrit :Je n’ai fait que relever votre affirmation:
La question de savoir OÙ se trouve l'esprit ou le moi DANS le corps, est selon moi une question qui a peu de sens

Pour vous montrer qu’elle à non seulement un sens mais que de plus elle relève du sens commun (ou du bon sens si vous voulez bien ) ce que vous confirmez .


écoutez Hokousai, nous sommes sur un forum de philosophie, et justement pas dans la rue. Puis l'on sait bien que vous n'êtes pas quelqu'un qui débute en philosophie. Dès lors, quand vous me posez une question, je ne vais pas d'abord vous répondre par le sens commun, je suppose que vous êtes suffisamment équipé pour posséder vous-même ce cher sens commun. D'ailleurs, vous ne m'avez pas non plus demandé ce que le sens commun en pensait, vous avez demandé ce que MOI j'en pensais.

J'ai fait ce qui me semble être le plus approprié sur un forum de discussion philosophique, je vous ai directement donné le début d'une mise en question de ce sens commun: si l'on définit l'esprit par ce qui est non corporel, alors la question (qui a un sens pour le sens commun) perd son sens. Si donc vous voulez non pas juste rappeler le sens commun mais interroger celui-ci, je vous ai donné un moyen pour le faire. Vous pouvez le faire bien sûr d'un tas d'autres façons, comme vous voulez. Mais pour l'instant je n'ai encore rien vu. Vous ne faites que répéter la question, tout simplement. Vous ne proposez aucune manière alternative de concevoir cette évidence. C'est pourquoi je ne comprends pas le sens de ce que vous êtes en train d'entreprendre ici.

N’importe qui dans la rue et qui ignore tout de Descartes vous dira qu’il préfère garder sa tête .Et je suppose qu’avant Descartes n’importe qui aurait répondu de même .


mais non, c'est bien ça le problème: pour moi vous attachez trop d'importance à ce sens commun. Vous croyez que tout le monde de tout temps a pensé comme ça (d'ailleurs vous semblez dire longtemps ici que vous-même, vous pensez comme ça), et encore une fois, pour l'instant vous ne donnez vous-même aucune alternative (vous refusez même de réfléchir à celle que donne Spinoza, dans cette discussion).

Alors je vous l'ai déjà dit: en Occident les juifs situent l'esprit dans le coeur, et pendant des siècles (avant Descartes, justement) l'esprit en tant que principe de vie était identifié à un souffle. Vous pouvez aussi poser la question à un Africain non occidentalisé et il vous répondra que l'esprit ça n'existe pas, c'est une invention occidentale, donc forcément cet esprit pour lui ne réside pas dans sa tête, ni ailleurs (pour les Africains un Djinn est le principe de vie, et ce Djinn prend possession du corps (tout le corps) de l'homme aussi longtemps que celui-ci est en vie).

Bref, il y a déjà mille façon différentes de penser le rapport corps-esprit, comme ça dans le monde. Puis beaucoup de philosophes en ont entre-temps créé de nouveaux concepts. Si l'on veut contribuer à ces pensées, ne faudrait-il pas proposer l'une ou l'autre idée, au lieu de simplement s'en tenir à notre sens commun d'ici et maintenant?
louisa

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Messagepar Louisa » 30 déc. 2007, 16:46

Ps: je suppose que vous voulez dire qu'avant de pouvoir philosopher, il faut d'abord se rendre compte qu'on a des opinions. Un peu comme Socrate a commencé à s'adresser à ceux qui avaient la réputation d'être courageux pour les interroger sur l'essence du courage. Seulement, déjà Socrate ne s'en tenait pas à cela ... souvent les gens SAVENT qu'ils ont une opinion. Ils ne sont pas si cons que ça. Ce que Socrate a fait (et cela, c'est déjà tout un travail pre-philosophique), c'est de leur faire comprendre que ces opinions ne sont PAS suffisamment solides. C'est exactement pour la même raison que je vous ai répondu que l'on peut vite démonter l'idée commune qui situe l'esprit dans la tête. Il suffit de rappeler que l'esprit est en principe considéré comme étant quelque chose d'incorporel, et de penser au fait que ce qui est incorporel n'a pas de lieu. A partir de là, une NECESSITE de recommencer à penser peut se faire sentir.

C'est cela, ce que moi j'ai voulu faire avec ma réponse ici: vous me dites dès le début que vous situez l'esprit dans la tête, je vous réponds immédiatement en vous signalant que les choses ne sont peut-être pas si simples que ça.

Alors vous me répondez qu'il s'agit en fait de quelque chose dont on ne peut avoir une idée par la "théorie", qu'il faut une "observation intime" (vous en faites donc une affaire subjective, personnelle, l'inverse de ce qu'est un concept). Bon. D'accord. Comme vous voulez. Mais SI vous voulez prétendre qu'en répondant cela à quelqu'un, vous êtes en train de faire de la philosophie, je n'ai pas compris ce que c'est que la philosophie pour vous, vous voyez? Car alors vous me dites tout simplement: écoutez, moi j'ai fait un peu d'introspection, et voici ce que je vois, ce que vous-même apparemment vous ne voyez pas. Bien sûr que moi je ne le vois pas, car j'ai lu Spinoza. Je sais donc qu'il existe déjà depuis longtemps d'AUTRES façons de penser le rapport corps-esprit. Je ne peux plus regarder mes propres évidences comme étant les seules possibles. Donc forcément, on voit autre chose que seulement le sens commun, à partir de ce moment-là.

Plus même, je suis d'accord avec ces philosophes (Platon notamment, c'est pourquoi j'ai tendance à croire que cela pourrait bien être la seule conception de la philosophie qui permet en même temps de renouer avec la tradition tout en l'innovant) qui prétendent que RIEN n'est mieux, pour faire accèder à la philosophie (et donc pour mettre les évidences du sens commun en question) que le contact approfondi avec une pensée d'un grand philosophe elle-même, SI l'on a acquis la méthode philosophique de lire un texte philosophique.

C'est pourquoi je ne crois pas à la possibilité de philosopher juste par le biais de discussions d'opinions. Pour vraiment sentir en quoi les opinions (nos opinions) du sens commun ne sont au fond pas DU TOUT évidentes, il faut non pas nous poser des questions auxquelles ce sens commun semble facilement pouvoir donner des réponses (telle que celle que vous avez soulevé), il faut se confronter à un produit créé par un "professionnel de la création de concept". Sinon impossible de ressentir en quoi une opinion est une opinion et quel est le pouvoir des concepts.
Mais bon ...
louisa

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Messagepar Louisa » 30 déc. 2007, 17:12


Que Deleuze ait senti le sol se dérober sous ses pieds m’est assez indifférent .


Deleuze ne parlait pas de SA philosophie, il parlait de LA philosophie. Il ne signale pas un problème personnel, subjectif, il signale un problème technique, qui concerne la possibilité même de faire de la philosophie.

Dès qu'on ne sait plus distinguer la discussion de café de commerce d'une pratique philosophique, on court se risque. Tout un pan de la philosophie analytique a proposé une toute nouvelle conception de la philosophie, qui croyait qu'il suffisait de se poser des questions et de répondre en se basant sur les évidences du sens commun pour déjà faire de la philosophie (de façon tout à fait logique, ces "diplômés en philosophie" proposaient effectivement que l'on pouvait jeter tout le corpus de l'histoire de la philosophie, il n'avait à leurs yeux plus aucun sens).

Alors là on n'a pas la mise à mort de la philosophie telle que Platon l'a inventée et que l'on l'a pratiquée pendant 2500 ans, car aucune "force extérieure" ne s'est abattue sur elle. Il s'agit d'un véritable assassinat, au sens où ce sont des philosophes eux-même qui commencent à défendre les opinions et le sens commun. Pour eux il suffit d'un peu de logique, d'un peu de définitions et d'un langage aussi univoque possible pour faire d'un débat d'opinions une pratique philosophique. C'est cela ce que Deleuze voulait signaler quand il parlait d'assassinant: non pas que personne ne s'intéressait à sa philosophie à lui, mais qu'une des plus grandes traditions philosophiques du monde (l'anglo-américaine) était en train de lancer un mouvement de destruction systématique de 2500 années de philosophie.

Alors vous semblez vous-même plutôt préférer le style "suggestif" que d'être tenté par l'idée de formuler vos idées clairement - comme vous l'avez dit ici - mais le fait même que vous en restez au niveau du sens commun et y retournez à chaque fois qu'au début de la discussion nous essayons de mieux comprendre Spinoza, est pour moi très semblable (à tort ou à raison) à cette entreprise de mise entre parenthèse de la philosophie elle-même.

Et justement, quand je dis cela il ne s'agit pas du tout d'une (volonté de) mise en cause de qui vous êtes, de votre personne, de vos opinions et idées, mais de la façon dont vous semblez concevoir la philosophie, donc d'une conception de la philosophie en tant que telle. C'est là que pour l'instant nous sommes dans un désaccord assez total, je crois. Ce qui ne veut pas dire que je ne crois pas à la possibilité de modifier cette situation de désaccord (peut-être que vous allez me faire comprendre en quoi je me trompe en concevant la philosophie autrement que vous ... ?), sinon je ne continuerais pas cette discussion.
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Messagepar hokousai » 30 déc. 2007, 19:32

si l'on définit l'esprit par ce qui est non corporel,

Nous concevons le monde soit sous un attribut soit sous un autre . Et à theoriquement parler toutes les choses du monde sont compréhensibles sous l'un ou l'autre attribut (donc sous l' attribut de l'étendue) .

Pourquoi alors vous semble- t- il ridicule que nous concevions l' esprit humain sous l'attribut de l'étendue ?

..............................................

ces "diplômés en philosophie" proposaient effectivement que l'on pouvait jeter tout le corpus de l'histoire de la philosophie, il n'avait à leurs yeux plus aucun sens).


c'est selon ,Wittgenstein nétait pas "diplomé de philosophie" en revanche Austin et Ryle l'étaient


je cite """"Ryle poursuit l’analyse des confusions conceptuelles dans la Notion d’esprit (The Concept of Mind, 1949 ; traduit la même année). Il y dénonce ce qu’il appelle le « fantôme dans la machine », qui consiste à confondre le « savoir-comment » et le « savoir-que », c’est-à-dire à poser qu’une connaissance théorique précède toujours la pratique qui ne fait qu’appliquer cette connaissance. Ryle identifie ce dogme au dualisme cartésien (l’esprit est une entité au même titre que les corps matériels). Il soutient au contraire que l’on doit expliquer tous les phénomènes mentaux en termes d’activités observables, dispositionnelles ou comportementales.""""""""

Je connais moins bien Ryle que Wittgenstein mais on le dit proche de Wittgenstein .

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Messagepar Louisa » 30 déc. 2007, 19:45

Louisa:
si l'on définit l'esprit par ce qui est non corporel,

Hokousai:
Nous concevons le monde soit sous un attribut soit sous un autre . Et à theoriquement parler toutes les choses du monde sont compréhensibles sous l'un ou l'autre attribut (donc sous l' attribut de l'étendue) .

Pourquoi alors vous semble- t- il ridicule que nous concevions l' esprit humain sous l'attribut de l'étendue ?


il ne s'agit pas de ridicule, il s'agit de logique. "L'esprit" est le mot (l'étiquette, si vous voulez) qui depuis des siècles, en Occident, signifie le principe non matériel de vie, propre à l'homme. C'est donc simplement logiquement contraire au contenu de ce mot que d'aller chercher dans quel lieu matériel il pourrait se trouver.

A partir de ce constat, deux choses sont possibles: ou bien on trouve que ce serait intéressant de créer une conception tout à fait matérielle du principe de vie humain, et alors on peut choisir de maintenir le mot classique "esprit", mais il faut à chaque fois spécifier qu'on va l'utiliser dans un nouveau sens, tout à fait contraire au sens habituel de ce mot (et alors il faut bien sûr également CONSTRUIRE cette conception, car juste la poser comme ça ne donne pas encore grand-chose).

Ou bien on trouve qu'il est intéressant de maintenir l'idée d'un principe de vie incorporel, mais alors il faut changer l'évidence propre au sens commun d'ici et maintenant et qui a tendance à localiser l'esprit dans la tête. Il faut donc dans ce cas créer un autre rapport esprit-corps que celui qui le localise quelque part. C'est ce qu'a fait notamment Spinoza.

Louisa:
ces "diplômés en philosophie" proposaient effectivement que l'on pouvait jeter tout le corpus de l'histoire de la philosophie, il n'avait à leurs yeux plus aucun sens).

Hokousai:
c'est selon ,Wittgenstein nétait pas "diplomé de philosophie" en revanche Austin et Ryle l'étaient


oui oui en effet, je ne parlais qu'en général.

je cite """"Ryle poursuit l’analyse des confusions conceptuelles dans la Notion d’esprit (The Concept of Mind, 1949 ; traduit la même année). Il y dénonce ce qu’il appelle le « fantôme dans la machine », qui consiste à confondre le « savoir-comment » et le « savoir-que », c’est-à-dire à poser qu’une connaissance théorique précède toujours la pratique qui ne fait qu’appliquer cette connaissance. Ryle identifie ce dogme au dualisme cartésien (l’esprit est une entité au même titre que les corps matériels). Il soutient au contraire que l’on doit expliquer tous les phénomènes mentaux en termes d’activités observables, dispositionnelles ou comportementales.""""""""

Je connais moins bien Ryle que Wittgenstein mais on le dit proche de Wittgenstein .


oui, je sais bien que vous connaissez ces auteurs mieux que moi. C'est pourquoi je suis assez convaincue que vous êtes tout à fait capable de développer la question du rapport corps-esprit autrement que le fait Spinoza, si vous n'avez pas envie de discuter de celle de Spinoza. Or moi pas (je veux dire, je ne les connais pas assez pour présenter leurs idées ici). Donc voilà, si vous avez envie de discuter de ce sujet et de présenter autre chose que le sens commun ou que Spinoza, pourquoi ne pas nous expliquer comment à vos yeux ces penseurs-là proposent de le concevoir? En tout cas, moi ça m'intéresse. Au cas où vous aviez vous-même une idée intéressante là-dessus, cela m'intéresse aussi. La seule chose qui me semble être dépourvu de sens, c'est de juste répéter ce qu'en dit le sens commun, sans plus.
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Corps et mental dans la philosophie de Spinoza

Messagepar philonomad » 30 déc. 2007, 20:02

deux livres

Robert misrahi Le corps et l'esprit dans la philosophie de Spinoza

et comme dit Louisa l'excellent
Damasio, Spinoza avait raison. Joie et tristesse, le cerveau des émotions.

pour ma part, il me semble que l'homme pense par tout son corps et qu'il ne faut pas suivre l'illusion centrale donnée par le cerveau (ou la vue) mais bien au contraire redonner à l'ensemble des parties constitutives du corps leur rôle et leur fonction, que l'on en soit conscient ou pas.
l'originalité de la philosophie de Spinoza consiste précisément à se garder du dualisme pour comprendre la dualité expressive d'une seule réalité, le mental et le corps d'un homme donné pendant le temps et dans l'espace qu'il lui est donné d'expérimenter, comme sa puissance individuelle d'agir. expérimenter cette duelle unité est tout ce qu'on peut, et c'est déja tant !

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Messagepar hokousai » 30 déc. 2007, 20:02

je cite un message précédent

Vous ne faites que répéter la question, tout simplement.

Pas du tout . A une affirmation qui me semblait contestable , j'ai proposé de répondre à une question .

Cela n'a rien à voir avec répéter la question ( qui n'en était d' aileurs pas une ,cétait une affirmation )

..................................

Sur le dernier message

Voila que maintenant vous me proposez [b] le sens ordinaire d' esprit {/b](non matériel )
Je ne vous ai jamais dit que ce sens là , je le partageai. Je ne pars pas d'une définition .
Vous me placez dans l'alternative dualiste , il faut opter entre la matérialité ou l'immatérialité .

Vous semblez opter ( dans ce cadre conceptuel antinomique )pour la matérialité, ce qui est un réductionisme à la matérialité .

Je ne m'inscris pas du tout dans ce dilemme .(et Ryle non plus d' ailleurs )

Mon problème avec vous est que je ne pense pas que Spinoza s'inscrive non plus dans ce dilemme .

hokousai


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