Hokousai a écrit :Ad hominem dans la mesure où vous portez des jugements sur mes arguments mais souvent assortis d’ un commentaire sur ma supposée position ( extérieure au texte de Spinoza ou au contexte spinoziste, je serais systématiquement critique à son égard , malintentionné ou cherchant prioritairement à faire valoir mes propres idées philosophiques )
cher Hokousai,
merci d'avoir signalé que l'on pourrait interpréter d'une telle façon ce que j'écris. Dans ce cas je crois que je ne me suis pas très bien expliquée. Tentative d'être plus clair.
Il est vrai que très souvent, j'ajoute des commentaires "méthodologiques" à mes réponses à certains de vos messages. Mais justement, le problème que j'ai c'est un problème qui concerne une certaine méthode en philosophie, une certaine conception de la philosophie. Il me semble (à tort ou à raison) que vous adoptez régulièrement cette méthode. Mon problème n'est pas que VOUS l'adoptez, mon problème concerne la méthode en tant que telle. Je ne vois pas comment avec cette méthode aboutir à un résultat un peu "solide", disons. Du coup, il arrive que je n'ai rien à vous répondre, non pas parce que j'aurais un problème avec vous en tant que personne, mais parce que je ne crois pas en une telle méthode, parce que pour l'instant je ne réussis pas à en comprendre l'intérêt. C'est pourquoi, dans la discussion ci-dessus, je n'ai pas réagi à votre question des pierres qui penseraient, mais uniquement au point auquel je croyais pouvoir répondre. Pour moi le problème est donc entièrement philosophique, et n'a rien de personnel.
D'autre part, dire que je ne crois pas en la méthode des questions générales (donc abstraites, pour moi) et le sens commun comme critère de vérité, cela ne signifie pas que mon problème serait que vous partez d'un point de vue extérieure au spinozisme. D'abord, je n'ai pas du tout l'impression que vous êtes systématiquement critique à l'égard du spinozisme, et même si c'était le cas, comme je viens de le dire ci-dessus, discuter avec quelqu'un qui critique (même violemment) le spinozisme peut avoir un grand intérêt.
Quant à faire valoir ses propres idées philosophiques: si je vous ai bien compris, c'est plutôt ce que j'appelerais ses propres "opinions", mais là aussi, je n'ai rien contre la PERSONNE qui le fait. C'est de nouveau une question de méthode, à mes yeux. La différence principale entre une idée philosophique d'un des participants à ce forum et d'une idée philosophique d'un grand philosophe (n'importe lequel, Berkeley aussi bien que Spinoza etc, bien sûr), c'est que chez un grand philosophe, l'idée ne peut pas être isolée de toute une nouvelle façon de concevoir les choses, du système de penser du philosophe en question. Et c'est de là que vient, à mes yeux, tout son intérêt. Nos propres idées ne sont pas mal, bien sûr, mais cela ne peut pas aller très loin. On a vite l'impression d'être dans des impasses, ou d'avoir tout dit.
Ce qui caractérise donc à mes yeux une "philosophie", c'est le fait d'avoir réussi à construire une pensée qui, elle, se prête à des commentaires et des développements qui continuent génération après génération. C'est là un des points forts de ce qu'on appelle "philosophie", je crois. Une idée d'un "petit" philosophe, en revanche, peut avoir une certaine originalité, mais du fait même qu'elle manque tout un cadre de pensée, elle reste toujours fort limitée, aussi bien dans son contenu que dans sa capacité de pouvoir être développé, de pouvoir donner lieu à un tas d'autres idées. Bien sûr, tous les grands philosophes étaient d'abord des petits philosophes. Il faut donc bien commencer au début, si l'on veut développer sa propre pensée, et donc par quelques idées, pas encore très fécondes en soi. Je ne suis donc pas en train de dévaloriser le "petit philosophe". J'essaie juste de dire que pour moi le "handicap" d'une idée d'un philosophe qui n'a pas encore découvert son système à lui, c'est que souvent on ne sait rien faire avec. C'est tout un art que de construire des questions et des idées qui permettent d'aller loin, il me semble.
Or ici je suis en train de défendre une certaine position par rapport à la question de ce que c'est que la philosophie. Il me semble que vous n'êtes pas tout à fait d'accord avec cette position, et cela m'intéresse beaucoup d'en discuter avec vous (mais peut-être dans un autre fil, puisque nous (ou plutôt moi) nous éloignons du sujet; le fil 'antagonisme' éventuellement). Nous l'avons déjà essayé quelques fois, et pour l'instant j'étais dans l'idée que finalement ce genre de discussion ne vous intéresse pas trop. Ce que je respecte, bien sûr. Mais dans ce cas, je ne peux que référer à cette divergence entre nous dès que vous me demandez de répondre à des questions auxquelles, pour les raisons que je viens de mentionner, je ne peux pas répondre. Entre-temps, votre façon de procéder ne me dérange pas du tout, au sens où (comme j'ai déjà dit ailleurs, je crois) cela m'arrive de temps en temps d'être surprise par ce que vous écrivez. Si donci je ne peux pas toujours répondre, cela même (ne pas savoir quoi répondre) souvent m'interpelle, et parfois me fait comprendre soudainement certaines choses auxquelles je n'aurais jamais pensées sans vos idées et questions.
Enfin, vous pouvez être certain que jamais je n'ai eu l'impression que vous êtes "malintentionné". S'il fallait parler "ad hominem", je ne peux que vous dire que de toute manière j'apprécie vos contributions à ce forum, et votre "tranquillité d'âme" quand le ton d'une discussion commence à monter. Et comme je viens de le dire, le fait même que vous semblez opter pour une autre position quant à ce que c'est que philosopher est pour moi plutôt une occasion pour essayer d'expliciter la mienne, voire de l'interroger, que d'être une source d'énervement. Ce qui ne signifie pas que je ne m'énerve jamais ... bien sûr que cela m'arrive aussi. Seulement, je suis d'accord avec Spinoza (si je l'ai bien compris) pour essayer "d'expérimenter" l'idée que tout ce qui est énervement relève d'une impuissance plutôt que d'une puissance. Ces moments d'énervement ne contiennent donc aucun "jugement valide" de mon interlocuteur, mais simplement une mécompréhension de ma part accompagnée d'une Tristesse.
Hokousai a écrit :Or je lis le texte , je pars des textes ,je commente les textes de Spinoza , lesquels provoquent certes des questions qui peuvent vous sembler saugrenues( étranges ), il n’empêche que c’est bien en relation avec le texte de Spinoza que je les pose .( mis à par Berkeley et parfois les thomistes je ne mentionne personne d’autre que Spinoza .Disons que les « autres » interviennent peu dans mes messages. Je ne dis pas que JE n ' y interviens pas , mais comment faire autrement .
je crois que contrairement à certains autres ici, je ne vous ai jamais "reproché" de ne pas lire Spinoza (il est évident, pour moi, que vous lisez Spinoza; et souvent quand on reproche à quelqu'un de "ne pas lire" (voire ne pas savoir lire), on ne dit rien d'autre que de ne pas partager l'interprétation de l'autre et de ne pas disposer des moyens argumentatifs convaincants pour défendre la sienne). Puis certains ici n'ont clairement pas lu Spinoza avant de le critiquer, et cela ne me dérange pas vraiment. Enfin, pour l'instant je connais moins Berkeley ou les thomistes, mais cela n'est pas du tout dû à un choix conscient et actif, c'est plutôt le résultat d'un manque de temps et du fait que je ne m'occupe que depuis assez récemment de la philosophie, Spinoza étant le premier grand auteur que j'approfondis un peu. Je suis tout à fait convaincue de l'idée que le thomisme constitue une pensée tout aussi fascinante à étudier que le spinozisme, et j'espère pouvoir me plonger dedans dans les années qui viennent.
Sinon effectivement, il me semble que dans vos messages le "je" interviens assez souvent. Pour l'instant, je crois que c'est dû au fait que vous vous basez souvent sur le "bon sens", qui revient facilement à des idées subjectives, individuelles. Pour faire autrement, il faut justement abandonner, ou du moins mettre en question le bon sens, je crois, au lieu de le prendre comme base de toute vérité. Bref, si je voulais parler de méthode, c'est aussi parce que je n'ai pas du tout le sentiment que vous ne parlez que de votre personne (c'est pourquoi à mes yeux ce n'était pas un argument ad hominem; je ne vous ressens pas du tout comme quelqu'un qui veut s'imposer ici "personnellement"), mais parce que je crois que SI l'on adopte une telle conception de la philosophie, on est bien obligé de se reférer souvent à ses propres opinions (non pas par "trait de caractère" personnel mais comme conséquence logique et inévitable d'une méthode). Pour moi, c'est une méthode fort utilisée en philosophie, depuis que la philosophie analytique existe. C'est avec cette méthode, en général, que j'ai un problème. A mes yeux cela n'a rien à voir avec vous en tant que personne. Les gens qui adoptent cette méthode peuvent être des personnes fort aimables et respectables, l'un (la méthode qu'on privilégie) n'a rien à voir avec l'autre (la personne), ou du moins pas dans ce que je veux critiquer moi-même.
Hokousai a écrit :Pour répondre à votre réponse je vais me citer
Pour Spinoza l’intellect de Dieu embrase l’idée d’une table. Le fait que l’intellect de Dieu embrasse suffit-il à estimer que les tables pensent ? C’est toute la question .
c'est une question difficile en effet. Pour l'instant je dirais que cela ne suffit pas. Il faut déjà avoir établi préalablement que Dieu, ce n'est rien d'autre que la Nature, et que l'intellect de Dieu n'est rien d'autre que toutes les idées qui existent. Mais alors on peut se demander pourquoi il existerait une idée d'une table. Une fois qu'on pose l'existence d'un attribut de la Pensée qui produit des idées de chaque mode étendue, on est obligé de supposer qu'il existe une idée de toute chose, idée qui ne flotte pas quelque part dans le ciel mais qui EST la chose elle-même. Et alors la question devient: pourquoi poserait-on l'existence d'un tel attribut? Je crois que là, il faut retourner à la définition de Dieu: un étant qui contient une infinité d'attributs. Bref, il me semble que pour répondre à cette question, il faut reprendre tout ce qui précède l'E2P13 (et cela plus en détail que ce que je viens de faire, bien sûr).
Hokousai a écrit :Répondre positivement implique que les choses étendues (toutes les choses étendues ) sont aussi (parallèlement ) une expression et une modification de l’attribut pensée et alors des l’infinité des autres attributs .
en effet
Hokousai a écrit :Ce que je conteste ( personnellement )
d'accord, mais ne faut-il pas dès lors contester la définition de Dieu? Autrement dit: ne faut-il pas partir d'AUTRES définitions que celles de Spinoza pour pouvoir contester cela? Si oui, la question est: quelles seraient ces autres définitions, et pourquoi vaudrait-il mieux partir d'elles que de celles de l'Ethique?
Hokousai a écrit :Spinoza n’est pas assez clair sur ce point .
Estimez vous que Spinoza est assez clair sur ce point ?
j'ai l'impression que c'est trop tôt pour moi pour pouvoir répondre à de telles questions. Je suis encore en pleine étude du système spinoziste. Dès lors, quand je ne comprends pas, je suppose que le fait que ce n'est pas clair pour moi n'implique en rien que ce n'était pas clair en soi. Je continue donc à chercher, tout simplement (tout en ne posant pas d'office que tout peut être clarifié).
Bien à vous,
louisa