Nepart a écrit :Même en aidant, ceux qui nous ne serrons jamais aussi bon que nous, on réduit l'écart entre nous et les autres, dont on devient moins, plus puissant qu'eux...
On abouti donc au fait que l'on ne peut répondre à ces 2 besoins, et qu'il faut répondre à celui qui nous procurerai le plus de plaisir (je deviens hédoniste ).
aussi longtemps que tu optes pour un hédonisme "sur le long terme", je crois que d'un point de vue spinoziste il n'y a aucun problème, au contraire!
Or justement, ce "hédonisme à long terme" implique nécessairement que tu comprends que "se lier d'amitié" à un maximum de gens, ou, exprimé dans le langage ordinaire, essayer d'aider un maximum de gens, c'est exactement ce qui augmente réellement et maximalement, sur le long terme, ta propre puissance de penser et d'agir. C'est pourquoi les deux besoins (bien compris) ne s'excluent pas mutuellement.
Vouloir avoir une grande puissance est un besoin propre à tout être humain. Mais dès qu'on se penche sur la question de savoir comment l'obtenir, on voit qu'on a vraiment besoin de vivre dans une Cité où les gens soient le plus intelligent possibles, car alors ils vont le plus aider les autres, et ainsi "souder" la communauté constituée par cette Cité. Et plus la Cité est puissante, moins qu'elle court le risque d'être détruite, de l'intérieur ou de l'extérieur. Par conséquent, moins nous courrons nous-mêmes le risque d'être privé de choses essentielles pour notre bonheur.
Autrement dit: c'est parce que l'homme est un "animal social", et partant a besoin d'un environnement cognitif et affectif "constructif", qui lui permet maximalement de s'épanouir soi-même, qu'il doit s'employer lui-même à augmenter la puissance et l'intelligence de ses co-citoyens. Car plus ceux-ci sont heureux, plus ils éprouveront le même désir de se lier d'amitié à un maximum de gens.
Le désir de tout faire pour aider l'autre (aussi appelé "charité", dans le spinozisme) est donc par là inscrite au coeur même de la "béatitude" ou du bonheur suprême qu'un individu peut obtenir. Une fois que l'on a bien compris cela, les deux "besoins" dont tu parles ne s'opposent plus: plus les autres deviennent puissants, au sens spinoziste du terme, plus ils t'aideront à devenir à ton tour plus puissant.
Pour moi, c'est l'essence même du libéralisme économique qui est ainsi sapé de tout fondement: ce n'est PAS la concurrence qui
in fine augmente la puissance d'une société, c'est la collaboration. C'est peut-être assez contre-intuitive, à notre époque, où des l'âge le plus tendre on essaie de nous motiver à travailler en nous promettant une position socialement "meilleure" que les autres (devenir le premier à l'école, par exemple).
Mais pour Spinoza la plus grande motivation se trouve bien plutot dans le fait de ressentir la Joie même de comprendre. Car cela seul peut constituer un "moteur" suffisamment puissant pour que l'enfant apprenne à désirer apprendre toute sa vie. Dans l'autre cas, donc dans le cas où la motivation passe par la comparaison avec les autres, l'enfant voudra simplement obtenir plus tard une position sociale que d'autres "glorifient" maximalement, il voudra simplement être "meilleur" que les autres. Ce qui revient à donner la plus grande importance à ce que Spinoza appelle "l'honneur", celui-ci étant hélas un Bien tout à fait périssable et fort changeant, contrairement au Bien que constitue la Joie de comprendre.
Conclusion: soyons hédonistes en effet, mais alors hédonistes "à fond", c'est-à-dire en tenant compte de ce qui nous procurera le plus de bonheur sur le long terme!