Bonjour Spinoza_Powa,
merci de ta question! Dans l'espoir que d'autres participants au forum vont te répondre, voici une première tentative.
Comme tu es visiblement en train d'"expérimenter" le spinozisme (ce qui est une excellente idée!!) je te réponds seulement à partir du point de vue de Spinoza (ou de ce que je crois avoir compris pour l'instant de Spinoza ... à toi de vérifier).
Première chose: tu dis avoir "honte" de ce message puisqu'il montre clairement que tu éprouves de la Haine et que donc tu es soumis aux causes extérieures et n'agis pas entièrement sous la conduite de la raison. En effet, c'est bien ce qu'on peut (notamment) lire dans ce que tu écris. Mais n'oublie pas que la Honte aussi est ... une idée inadéquate! Comme Spinoza le dit dans le splendide chapitre XXXI de l'Ethique 3: "
La Honte est une Tristesse qu'accompagne l'idée d'une action dont nous imaginons que d'autres la blâment". Or je ne vois pas QUI, ici sur ce forum, te blâmerait du fait même que tu nous soumets ce problème, au contraire ... ! Tu poses une question intéressante, donc on va plutôt t'apprécier au lieu de te blâmer.
Puis n'oublie pas la proposition 4 de l'Ethique 4 (E4P4): "
Il ne peut pas se faire que l'homme ne soit pas une partie de la Nature, et puisse ne pâtir d'autres changements que ceux qui peuvent se comprendre par sa seule nature, et dont il est cause adéquate". Dès lors, il est tout à fait normal que toi aussi, comme n'importe quelle autre partie de la Nature, tu es soumis de temps en temps aux Affects-passions. Rien d'étonnant ou de scandaleux là-dedans!
Spinoza_Powa a écrit :Je suis actuellement en lecture de Machiavel, je vous le conseil vivement, je tiens à lire ce livre avant de commencer la liste que Louisa m'a passée.
Machiavel est un excellent choix (il s'agit sans doute d'un de ces auteurs qui auraient dû figurer dans la liste provisoire que j'ai faite)!! D'ailleurs, quand tu liras le
Traité Théologico-Politique de Spinoza, tu verras en quoi celui-ci est d'accord avec Machiavel (auteur très important pour Spinoza) et en quoi il croit pouvoir lui-même aller plus loin encore.
Spinoza_Powa a écrit :Je suis donc dans une phase où tout ce que tout le monde dit me paraît absolument ridicule, je ne pourrais vous faire de citations précises mais vous savez de quoi je parle, les pseudos-philosophe qui se croient si supérieur aux autres être humains. Je ne peux m'empêcher de les remettre à leur places, mais c'est là que 3 problème se posent :
- Du haut de mes 13 ans, absolument personne ne me prend au sérieux dans mes propos, à croire que tout ces débiles pensants que l'intelligence vient avec les expérience de la vie, ce qui est en partie vrai je vous l'accorde ! Mais est-ce une raison pour ne pas m'écouter dans quoi que je dise ? Moi homme guider par la raison m'enfin je ne les déteste pas puisqu'ils suivent de la nature de dieu.
il est évident que ce n'est pas parce que tu n'as que 13 ans qu'on ne doit pas te prendre au sérieux. A 13 ans, dans d'autres cultures que la culture occidentale, on est censé être un adulte et on est traité ainsi! Or pour autant que je l'aie compris, tu vis dans une culture occidentale. Alors hélas, on a tendance, effectivement, à ne pas trop prendre au sérieux les jeunes hommes de 13 ans.
Or du coup ... ces gens dont tu parles ne sont peut-être pas si stupides que ça ... ? Car on pourrait s'imaginer que dans une culture où des garçons de 13 ans en règle générale ne sont pas pris aux sérieux mais considérés comme des "enfants", on traite ces jeunes hommes effectivement ainsi. Or souviens-toi que Spinoza dit (Ethique 4) que l'homme est un "animal social". Et partant, quand on dit sans cesse à des enfants de 13 ans qu'ils ne sont "que" des enfants, ceux-ci souvent n'ont pas beaucoup de choix, ils vont se comporter ainsi! Par conséquent, il est tout à fait VRAI qu'en régle générale, quelqu'un qui a 13 ans n'a pas encore grand-chose à dire, puisqu'il se conforme, bien sûr, à ce que les adultes attendent de lui.
Bref, que les gens aient tendance à ne pas trop te prendre au sérieux, c'est peut-être tout à fait normal, au sens où cela ne dit rien de toi en tant que personne, mais montre seulement en quoi ces gens appartiennent bel et bien à la culture occidentale, culture qui a de très grands avantages mais aussi quelques désavantages ... ?
Spinoza_Powa a écrit :- Malgré le fait que personne ne me prenne au sérieux, je ne peux absolument pas m'empêcher d'essayer de remettre tout le monde à sa place ! Et c'est difficile car il faut traité de la nature des sentiments et tout ça ce qui est hyper dur mais pourtant je n'arrête pas de me lancer dans ce genre de combats verbaux !
- Et de ce fait, je passe soit pour un monstre sans cœur et sans aucune conscience ( quand je dit qu'il faut agir avec raison et non avec ses sentiments ), sois pour quelqu'un qui fait partie d'une secte ( quand je parle de la nature divine, et de mes penchants panthéistes et tout ça )
Peut-être que ce serait intéressant de davantage méditer l'E4P7? Cette proposition explique que "
Un affect ne peut être contrarié ni supprimé que par un affect contraire et plus fort que l'affect à contrarier". Cela signifie que malheureusement, il ne suffit pas de dire aux gens ce que l'on croit être vrai, car alors on espère traiter par le biais d'un peu de "raison" ce qui est avant tout de l'ordre des affects. Or en réalité, on ne peut contrarier un affect, un sentiment, que .. par un autre affect!
C'est pourquoi toute la difficulté (mais aussi tout le plaisir!) consiste non pas à "raisonner" les gens, mais à trouver un moyen pour les AFFECTER d'une telle façon que ce que tu crois être vrai, les touche vraiment. Il faut donc essayer d'augmenter leur JOIE, au lieu de leur dire qu'ils ont tout mal compris et que toi tu vas les expliquer comment les choses sont en réalité. Car si tu fais cela, tu les obliges à contempler leur "impuissance", c'est-à-dire tu les affectes de Tristesse, comme le dit l'E3P55. Et par là même, tu DIMINUES leur puissance d'agir et de penser, tandis que justement, en leur expliquant ce que tu crois être vrai, tu espères que cela va AUGMENTER leur puissance de penser.
Autrement dit: on ne peut pas se contenter d'expliquer simplement aux gens ce qu'on croit être vrai. On doit avant tout se demander QUI ils sont, POURQUOI ils pensent ce qu'ils pensent (c'est-à-dire: pourquoi ils ont de bonnes raisons pour adhérer à l'idée qu'ils défendent), puis chercher à RENFORCER leur puissance en les affectant de Joie, au lieu de juste leur dire qu'on croit qu'ils se trompent!
Spinoza_Powa a écrit :Et oui, passer pour un monstre et un sectaire devant des personnes " idiotes " ( je sais pas si c'est très intelligent de traiter les autre d'idiot mais bon ) c'est très embêtant, donc je voulais savoir, vous Spinozistes confirmés qui avait l'habitude de voir des attardés mentaux, ( j'emploie ce terme pour souligner le manque d'intelligence de 90% des êtres humains. ) que faites vous ?
comme tu l'as déjà compris toi-même: ce n'est en effet pas très intelligent de traiter les autres d'idiots ...

.
Si tu trouves que ton interlocuteur manque d'intelligence quand il n'est pas d'accord avec toi, tu ne fais rien d'autre, d'un point de vue spinoziste, que de le "mépriser", c'est-à-dire de "faire" de lui, "par Haine, moins d'état qu'il n'est juste" (E3 Déf. des Affects XXII). Car alors tu présupposes que ce qui est la cause de ton idée à toi, c'est "l'intelligence" , tandis que ce qui serait la cause de l'idée de l'autre, ce serait le "manque de connaissance". Le problème, c'est que RIEN ne permet de savoir cela AVANT d'avoir BIEN réfléchi aux raisons que l'autre a pour croire en l'idée qu'il te propose. Et pour pouvoir connaître ces raisons, il faut vraiment ... d'abord prendre l'autre au sérieux, c'est-à-dire réellement essayer de bien bien comprendre les raisons qu'il a pour défendre telle ou telle idée (et donc réellement présupposer que peut-être il a raison!!). Souvent, on constate qu'ayant fait un effort pour comprendre cela, on comprend aussi comment c'est bel et bien très intelligent de l'autre de penser ainsi. Puis cela permet aussi de mieux interroger et/ou expliciter les raisons qu'on a nous-mêmes pour croire en les idées qu'on défend (voire pour détecter quelques erreurs, car étant nous aussi une partie de la Nature, on ne peut qu'avoir quelques idées inadéquates nous aussi!).
Enfin, dernier avantage d'une telle approche: en prenant l'autre au sérieux, il se sentira moins méprisé, voire même apprécié par toi. Tu l'affecteras donc de Joie, précisément ce qu'il faut pour qu'il puisse éventuellement réellement comprendre en quoi tu as raison, ou, le cas échéant ... te montrer en quoi tu te trompes réellement, ce qui est tout aussi intéressant à savoir, non?
Bien cordialement,
L.