
Par "Dieu se pense lui-même" (entre guillemets) je voulais montrer que:
-comme l'entendement infini de Dieu est un mode (infini immédiat) de l'attribut "pensée"
- comme l'idée de Dieu constitue l'essence objective (le contenu si on veut) de ce même entendement
- comme l'idée de Dieu est, comme le dit Spinoza lui-même, l'idée de la substance et de ses affections (par d'internet chez moi donc pas de références exactes sauf de mémoire, désolé)
- il s'ensuit que l'idée qui a comme contenu la substance et ses affections, (cad tout le schmilblick) "contient" également l'entendement infini comme mode de l'attribut "pensée"...etc...
- c'est pourquoi l'attribut pensée possède une sorte de suprématie sur les autres puisque à chaque mode de chaque attribut correspond une idée. C'est ce que Deleuze nomme le "parallélisme ontologique" par opposition au "parallélisme épistémologique" qui concerne les deux seuls attributs que nous connaissons.
En ce sens "Dieu se pense lui-même". Je garde les guillemets parce que Dieu n'est pas le sujet de la pensée mais la pensée elle-même.
En ce sens également, comme les "anciens Hébreux" que loue Spinoza l'ont compris, Dieu et l'entendement de Dieu, c'est la même chose.
Cela me semble issu d'Aristote pour lequel l'intelligent (nouus), l'intellection (noésis) et l'intelligible (noentov ou quelque chose comme ça) sont une seule et même chose. Et c'est pourquoi, chez Aristote, Dieu constitue l'objet de connaissance suprème de sorte que connaître Dieu, c'est également se connaître soi-même et connaître tout le reste.
Voilà qui nous ramène à la réflexivité puisque, dans l'Ethique la "connaissance de soi" (sui conscius) est tributaire de la connaissance de Dieu dans la cinquième partie de l'ouvrage. Et c'est pourquoi je nie qu'ily ait réflexivité avant le troisième genre de connaissance, du moins au sens moderne de conscience de soi quin'apparaît qu'avec Descartes (selon Lewis, et Locke selon Balibar) dans son "je me représente à moi-même". Selon moi, cette réflexivité au sens moderne (que par ailleurs Husserl postule sans plus) est un effet de langage et, plus précisément d'un retour sur le signe au moyen d'une sorte de signifiant flottant (le "mana" de Lévy-Strauss) qui, en philosophie prend la forme du "quelque chose" en général et indéterminé. Cela pour montrer ma réflexion générale. Je préciserai en temps utile.
Enfin, si la réflexivité (en ce sens) est l'apanage de la substance - comme le montre aussi l'autoconstitution infinitaire de la substance (là où les attributs constituent et en même temps expriment tandis qu'au niveau de la nature naturée le mode exprime ce qui le constitue ("constare" ou "constituere") - elle n'est plus l'apanage immédiat de l'homme individuel (chez Descartes) ou d'une quelconque "conscience transcendantale. La réflexivité est nécessaire à la connaissance, mais précisément la réflexivité de la substance et sa constitution infinitaire : condition de possibilité de la connaissance. Et non une faculté qui est postulée chez l'homme (et de plus uniquement chez lui). Comme disait Nietzsche : "comment un estomac pourrait-il se digérer lui-même ?". Par contre, chez Nietzsche aussi, le monde se digère lui-même, se produit lui-même de toute éternité (autoconstitution) ("un monstre de forces,dur comme l'airain, ... qui se dévore lui-même", etc... dans les "Posthumes").
Voilà ma conception. Et voilà Spinoza comme machine de guerre contre la prétention de l'Homme qui diminue l'homme.
Cela a mettre en rapport avec :
- les paradoxes logiques de la réflexivité
- les paradoxes mathématique de l'infini
- la sémantique et la théorie du langage
Et enfin la notion moderne de conscience qui n'existe pas avant Descartes et ne me paraît pas correspondre au "conscius" de Spinoza... voir mon prochain message dans "idée de l'idée,..." dans "lecture cursive du TRE".
En gros,pour montrer où je veux en venir. Mais cela ne m'éclaire toujours pas sur le statut précis de l'entendement fini, sinon qu'ilest l'effet (et juste l'effet) de cette "réflexivité divine".