Conscience et conscience de soi

Questions philosophiques diverses sans rapport direct avec Spinoza. (Note pour les élèves de terminale : on ne fait pas ici vos dissertations).

aldo
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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar aldo » 04 janv. 2016, 22:26

En fait, je vois pas trop que ces textes soient mécanistes. Spinoza semble simplement observer comment les uns et les autres réagiront au même signe. Soit de la psychologie et rien d'autre qui aurait quoi que ce soit d'inéluctable.

Par contre il y a un point sur lequel je ne suis pas du tout d'accord avec lui, c'est quand il semble dire que les enchaînements de la mémoire référeraient aux affects contrairement à ceux de l'entendement.

Alors certes l'enchaînement des idées qui se produit suivant l'ordre de l'entendement nest pas identique chez tous, mais on peut aussi comprendre que "la manière identique" dont il parle soit celle de la logique. Et là ça va.
Maintenant il est clair que passer de la logique des mots - et d'eux seuls - à la (vérité) mathématique est absurde. La logique des mots correspond à la cohérence entre eux et rien d'autre (ils ne font pas contresens, voilà tout). Et si rien ne fait contresens chez Spinoza, si chaque mot est à sa place et en harmonie avec chacun des autres dans une logique sans faille, c'est parfait.
Ceci dit, ce type de cohérence ne suffit pas pour parler de mathématiques. Parce que si les mots étaient inscrits dans le marbre de la vérité, si personne ne contestait leur définition (et donc ne les pensait), la logique pourrait peut-être suffire... sauf que dans ce cas la philosophie n'existerait plus !

Bref la logique des mots, c'est pipeau puisque chacun interprète chaque mot à l'aune de son vécu. Et pire encore, si tout le monde s'entendait un jour sur une espèce de signification absolue de chaque mot, on entrerait dans le cauchemar de Deleuze : une philosophie de la communication, c'est-à-dire basée sur les mots du sens commun.

En l'occurrence on est en plein dedans actuellement avec ce leitmotiv incessant consistant à ne s'intéresser et ne débattre que de mots... et qui plus est en jugeant l'autre toujours à travers ses seuls mots etc
(cauchemar philosophique absolu que l'addition du jugement et de la bêtise :evil: ).

Mais c'est pas tant ça qui m'ennuie dans cette phrase que ce qu'il écrit juste avant, à savoir que la mémoire, en tant que vecteur d'enchaînements d'idées, fonctionnerait sur l'affect. Si c'est ce qu'il veut dire, si c'est de la mémoire qu'il parle (toujours ce... de latin) je trouve ça très mal vu.
La mémoire semble au contraire justement associer les idées à travers la compréhension qu'on en a eu. Sinon comment expliquer que penser à un sujet précis amène comme "naturellement" à retrouver des mots et des idées entières en référence directe avec le thème en question ? Comment expliquer ces mots oubliés qui semblent surgir de nulle part à l'occasion de tel ou tel enchaînement d'idées ? C'est bien que la mémoire s'organise comme une sorte de chemin plus qu'un ensemble de points fixes genre dictionnaire. C'est très étonnant la mémoire.
(je poursuis pas parce qu'il se trouve que j'ai déjà fait un bout sur la mémoire dans le texte à Henrique sur l'autre fil... que je veux relire avant que de l'envoyer)


Cela dit on est assez loin du point de vue de Deleuze et de sa création de concept ... mais moi je pense néanmoins Deleuze a bien senti quelque chose de très important ...il y a une création, la pensée est créatrice.

Ben tiens... et j'en suis la preuve vivante !
(ok je sors)

(ça aussi, j'en cause dans le post à Henrique)

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar hokousai » 05 janv. 2016, 13:41

aldo a écrit :En fait, je vois pas trop que ces textes soient mécanistes.
Ils peuvent être inteprétés comme mécanistes.
Car
Spinoza a écrit :Ceci nous fait comprendre clairement en quoi consiste la mémoire. Elle n'est autre chose, en effet, qu'un certain enchaînement d'idées qui expriment la nature des choses qui existent hors du corps humain, lequel enchaînement se produit dans l'âme suivant l'ordre et l'enchaînement des affections du corps humain. Je dis, premièrement, que la mémoire est l'enchaînement de cette sorte d'idées seulement qui enveloppent la nature des choses qui existent hors du corps humain,.....

Si
la nature des choses qui existent hors du corps humain,..
est une mécanique ce ne serait encore pas rédhibitoire parce que Spinoza pense que ce n'est pas la réalité des choses que nous percevons mais la réalité des affections du corps causée par les choses extérieures .
Donc le corps est- il une mécanique ou pas ?

Or là dessus Spinoza ne se prononce pas vraiment: il dit la phrase (célèbre :!: ) le corps lui même nous ne savons pas ce qu'il peut.

Dans la question de le mémoire s'il y a des règles, des lois, des principes d' organisations, des programmes, enfin tout ce qui relève du mécanisme nous ne les connaissons pas ... disons pas avant de les avoir mis en évidence d'une manière ou d'une autre (scientifiquement ou empiriquement ou psychanalytiquement ou phénoménologiquement ou philosophiquement ...
enfin bref des méthodes possibles.

Néanmoins Spinoza suggère une règle: celle de l'habitude ( ce qui peut paraitre un peu court comme explication)

Spinoza a écrit :si ce n'est que le corps de cet homme a été souvent affecté de ces deux choses, le fruit et le son, c'est-à-dire que l'homme dont je parlé a souvent entendu le mot pomum pendant qu'il voyait le fruit que ce mot désigne ; et c'est ainsi que chacun va d'une pensée à une autre, suivant que l'habitude a arrangé dans son corps les images des choses.

On dit bien usuellement que ce qu'on fait par habitude on le fait mécaniquement .
........................................

aldo a écrit :Alors certes l'enchaînement des idées qui se produit suivant l'ordre de l'entendement n'est pas identique chez tous, mais on peut aussi comprendre que "la manière identique" dont il parle soit celle de la logique. Et là ça va.

Non Spinoza ne parle pas QUE de le logique. Déjà il faudrait prouver que tous les hommes, de tout temps et ne toit lieu ont une logique identique .

Mais Spinoza parle non pas seulement de la manière logique, mais de ce que qui est produit par cette manière et qui sont les causes premières .

Spinoza a écrit :pour le distinguer de cet autre enchaînement des idées qui se produit suivant l'ordre de l'entendement, d'une manière identique pour tous les hommes, et par lequel nous percevons les choses dans leurs causes premières.


SI les causes premières trouvées par l'enchainement logique ce sont les règles de la logique alors on est dans une TAUTOLOGIE. Qui ne sert à rien .
Mais Spinoza parle et pense à autre chose ( à la causa sui, à la substance, à Dieu et a ses attributs.

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar aldo » 07 janv. 2016, 01:33

La mémoire, c'est une boîte où est stocké l'ensemble du matos dont on dispose pour réfléchir, souvenirs, idées, sensations etc... jusqu'aux oublis peut-être, qui pourraient subsister sous forme de traces indicibles. L'inconnue de l'histoire, c'est comment fonctionne la relation entre elle et nous.
Il y a bien aussi une question de fonctionnement interne qui rentre en jeu, mais je ne peux que répéter que ce qui m'épate, c'est son côté "en mouvement", soit comment un mot en sort pour prolonger le mouvement d'une idée (en cours de développement), et comment une idée sort qui répond à un mot. C'est comme si elle fonctionnait en accord avec un mouvement (genre circuit synaptique) plutôt que depuis un endroit (genre entrepôt), ce qui me fait penser qu'il n'y a rien d'étonnant à ce que l'habitude le plus souvent y règne, à force de répéter le même chemin de pensée.

Maintenant de l'habitude au mécanisme, il y a un pas que je ne franchis pas (et que Spinoza ne semble pas non plus franchir je trouve, mais je m'en fiche un peu de Spinoza). C'est-à-dire que s'il peut exister un côté mécanique, c'est sans doute autant dans la relation qu'on a avec elle que dans son fonctionnement interne. Par exemple le chasseur doit souvent interpréter la trace de l'animal alors que le promeneur peut le faire ou pas. Une gazelle se désaltérant laissera sans problème un léopard repu boire un coup auprès d'elle mais s'enfuira quand le même aura faim (un mécanisme la ferait réagir autrement).
Autant dire que bien malin qui peut différencier ce qui serait mécanique ou pas là-dedans.

J'essaie d'avancer sans savoir où cette idée me mène plus que ça. Mais au fait, peut-être là du coup : d'où m'est (re)venue cette histoire de gazelle ? Bon, ça colle bien dans le sens de mon texte, la gazelle et le léopard... mais comment j'ai repensé à ça, d'où c'est venu ? En tous cas, si un type comprend où est le mécanisme là-dedans, je lui tire mon chapeau !

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar aldo » 07 janv. 2016, 03:24

Spinoza a écrit :pour le distinguer de cet autre enchaînement des idées qui se produit suivant l'ordre de l'entendement, d'une manière identique pour tous les hommes, et par lequel nous percevons les choses dans leurs causes premières.

Je sais pas si on se comprend...
Moi je dis que Spinoza peut vouloir dire que ce qui est logique (la manière identique), c'est l'ordre de l'entendement.
... mais ordre ne veut pas dire chronologie.
Chaque compréhension suit donc sa logique propre, mais tout enchaînement de l'entendement ne peut qu'être logique.

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar hokousai » 07 janv. 2016, 15:21

aldo a écrit :mais tout enchaînement de l'entendement ne peut qu'être logique.


L'ordre de l'entendement logique est certainement logique ... mais pas l'ordre de l'entendement illogique.

Mais que penser de l'ordre logique de l'entendement de pratiquement tous les philosophes, lesquels se targuent de penser sans contradictions et qui néanmoins n' en arrivent pas du tout aux mêmes conclusions sur les cause premières ?

Grosse contradiction!! Logiquement une suite de raisonnements sans failles de logique devrait aboutir aux mêmes conclusions ?

A moins que la base de départ ne soit pas la même.

Mais comment fonder logiquement la base de départ ?


1) la logique n' a pas de fondement ailleurs qu'en elle même
2) elle travaille sur des bases (axiomes) qui sont non fondés logiquement.

Et on me demande d'accorder un blanc- seing à certains enchainements logiques plus qu'à mon intuition.

Pire, si je ne marche pas dans l'affaire, je suis exclu de la communauté des philosophes.(ce dont je me contrefiche d'ailleurs) :D

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar aldo » 07 janv. 2016, 18:37

hokousai a écrit :
aldo a écrit :mais tout enchaînement de l'entendement ne peut qu'être logique.


L'ordre de l'entendement logique est certainement logique ... mais pas l'ordre de l'entendement illogique.

On y est presque :D !
C'est-à-dire que tout le monde se prétend capable de logique... et DONC comprend ce qui fait qu'un raisonnement est logique, et donc le concept de logique si tu veux. Personne ne conteste que la logique existe !


A moins que la base de départ ne soit pas la même.
Mais comment fonder logiquement la base de départ ?

Ben justement, c'est le problème des présupposés...
1) la logique n' a pas de fondement ailleurs qu'en elle même
2) elle travaille sur des bases (axiomes) qui sont non fondés logiquement.

C'est en science qu'elle peut travailler sur des axiomes.
Pas en philo puisque comprendre consiste théoriquement à tout questionner, à ne pas laisser sans le questionner le moindre doute. Et donc tout commencement éventuel ne peut que poser problème et doit être pensé.
Deleuze prend lui les problèmes par le milieu (à hauteur d'homme, et là où ca lui pose problème) et les pense un par un, sans chercher à les raccorder à une cohérence quelconque (sans non plus si possible éviter les interactions). Enfin c'est ce qu'il essaie de faire en tous cas... et aboutit à des concepts, indépendamment du plan d'immanence qui est si l'on peut dire "une autre affaire".


Et on me demande d'accorder un blanc- seing à certains enchainements logiques plus qu'à mon intuition.

Ah ça je m'en fous bien de ce que les types racontent (merde alors, j'ai payé assez cher). J'ai toujours fonctionné au feeling, y compris dans les moments où ma croyance envers tel ou tel baratin mien était la plus prégnante.
Je garde mon baril d'intuition et ils vont se faire foutre avec leur savoir !


Pire, si je ne marche pas dans l'affaire, je suis exclu de la communauté des philosophes.(ce dont je me contrefiche d'ailleurs) :D

C'est bon signe camarade, tous les grands exclus de la philosophie sont aujourd'hui ceux qui font penser les types intelligents (Spinoza, Nietzsche, Bergson, Deleuze et Foucauld, et d'autres j'imagine).

Le problème, c'est que malgré la beauté de nos échanges ici comme ailleurs, il n'est pas impossible que l'Histoire nous oublie et nous considère comme des philosophes mineurs.

... oui je sais, ça m'emmerde aussi :evil:

Mais d'un autre côté, remarque :ange:


PS : sinon je suis sur le point de faire des révélations fracassantes qui vont bouleverser l'histoire de la philosophie...
Modifié en dernier par aldo le 08 janv. 2016, 23:58, modifié 1 fois.

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar hokousai » 07 janv. 2016, 19:40

à aldo

J'aimais bien discuter avec toi, ce fut d'ailleurs le seul et unique motif de ma persistance sur ce forum.
Mais là je commence a avoir un peu honte de m'être laissé convaincre d'y persister.

Parce que là je sers la soupe à des gens avec lesquels je n'ai rien à voir.
Pas toi évidemment .... :D
Mais ceux à qui je sers la soupe en essayant vainement de faire vivre des fils de discussion où l'on s'aperçoit très vite qu'il n'y a rien a discuter (la messe y est dite d'emblée).

Ce sont de gens qui ont des pensées joyeuses... :amen:
et puis maintenant attention... ils ont lu des livres (De Leibniz... un peu, peut-être) donc maintenant ils savent coller des étiquettes.

Conclusion?
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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar aldo » 07 janv. 2016, 20:54

Bé non, sors pas ! :cry:

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar NaOh » 08 janv. 2016, 09:30

hokousai a écrit :Mais ceux à qui je sers la soupe en essayant vainement de faire vivre des fils de discussion où l'on s'aperçoit très vite qu'il n'y a rien a discuter (la messe y est dite d'emblée).


Comme le dit le proverbe : "Les cimetières sont remplis de gens indispensables"

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Re: Conscience et conscience de soi

Messagepar aldo » 09 janv. 2016, 04:05

Paraît que c'est l'ouverture de la pêche à l'anguille 8-) ?
Bon.

En lisant un article (par ailleurs fumeux) sur les théories d’un nommé Quentin Meillassoux, je suis tombé sur un truc qui pourrait t’intéresser quand tu refuses qu’on réponde hasard à certaines de tes questions.
Voilà de quoi il est question :

Si l’on pense au fait que le soleil se lève tous les jours, on est enclin à envisager l’hypothèse de lois du genre "éternelles" (qui donc ne devraient rien au hasard). Or c’est par rapport à ce type d’hypothèse que ne peut que s’inscrire l’idée de hasard. Le hasard ne vaut que par rapport à l’idée de lois éternelles...
(sinon, il n’y a que de l’aléatoire)

Le hasard ne serait donc qu’une façon de raisonner à partir de l’idée d’un tout des probabilités (qui n’a aucun sens).
(ce qui m’évoque une idée bizarrement simple, que chacun se pose en fait, comme quoi au millième tirage à pile ou face, la probabilité est toujours de une sur deux)

DONC le type qui te répond "hasard" ne fait que rentrer dans le même système que celui qui amène à l’éternité (ou presque) des lois éternelles, et donc ne répond rien avec ses probabilités a deux balles.

C’est ce que j’ai compris.
(bon enfin, si ça fait progresser les amateurs de progrès métaphysique, ça fera de la compagnie à Neo :fou: )


PS : Meillassoux en déduirait que les lois ne peuvent que varier (ce serait ça, le progrès ?) : un truc comme ça.
Est-ce une seule figure de style ou plus : mystère et boule de gomme. Par contre, son truc semblerait répondre à l’idée que les lois se stabiliseraient (donnant cette idée de lois éternelles etc).


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