Salut,
Déjà je propose de laisser Deleuze hors du coup. Il en a été question uniquement parce j'ai pensé que Bardamu me prêtait une allusion à lui que je ne faisais pas. C'est tout. Car si en plus du texte de Spinoza on se met à discuter du texte de Deleuze...On est pas sorti de l'auberge. De toute façon les confusions que l'on fait sur l'auteur cible ont toutes les chances d'être transposées et reconduites dans le texte du commentateur. (Tout particulièrement quand ce commentateur est…. Deleuze

)
Louisa a écrit : Je ne vois pas comment Durtal et Bardamu peuvent penser que l'être du mode n'est rien d'autre que l'être de la substance "en tant que". L'être de la substance ne constitue PAS la forme de l'homme. Ce qui veut dire, dit Spinoza littéralement, que "l'être de la substance enveloppe l'existence nécessaire", tandis que l'existence qui caractérise les modes n'a pas du tout cette caractéristique. Autrement dit, on ne parle PAS de la même "réalité" lorsqu'on parle de la substance ou d'un de ses modes, puisque la substance a une réalité infinie, là où le mode n'a qu'un "degré" (gradus) de réalité.
D'abord Louisa, tout le monde a très bien compris je pense que l'être de la substance ne constitue pas la forme de l'homme mais c'est toi qui manifestement a des difficultés avec la manipulation de cette proposition si tu penses qu'elle entraîne les "conséquences" que tu dis qu'elle entraîne.
Tu nous fais toute une montagne d'une phrase qui dit quoi? Qui dit : "l'homme n'est pas une substance, pour la raison qu'il est un mode". Ce que personne ne conteste. Il a été simplement défendu l'idée que la caractérisation de l'homme comme "mode" avait justement pour conséquence que toute la réalité qu'il pouvait avoir lui venait de la réalité de la substance. Si maintenant tu penses que dire
"l'être du mode c'est l'être de la substance "en tant que" revient à dire la
"substance et le mode sont une seule et même chose" et bien je ne peux guère que t'inviter à relire plus attentivement tant ce que j'ai écris, que ce que Bardamu a écrit, que ce que Sescho a écrit car sais-tu, je n'ai nullement l'intention de me répéter ad libitum.
Entendons nous bien: je ne te demande pas d'être "d'accord", nous mêmes apparemment ne sommes pas d'accord entre nous sur tous les points, mais d'être un peu plus sensible au problème que tu n'as l'air de l'être actuellement.
Il me semble en effet avoir déjà essayé de t'expliquer que la question n'était pas celle de l'identification entre mode et substance. Nous sommes tout aussi capable que toi je pense de saisir la différence, seulement ce n'est pas le fin mot de l'histoire: nous cherchons à travailler sur l'articulation mode/substance, autrement dit sur le
sens précis que revêt cette différence. Dire la réalité du mode n'est pas autre chose que la réalité de la substance "en tant que", est dans ce contexte faire une proposition
banale . C'est simplement dire qu'une chose singulière existant en acte a pour cause Dieu, non en tant qu'il est infini, mais
en tant qu'on le considère modifié par une autre chose singulière existant en acte, modification dont Dieu est également la cause,
en tant qu'on le considère modifié par une autre troisième et ainsi
à l'infini . (tu auras reconnu sans doute E2p9 légèrement modifiée) Je te le donne en mille: cela veut dire que Dieu "se produit"
dans les choses "finies" . Incroyable non?! Le concept de Dieu que développe Spinoza n'est pas transcendant aux choses….Découverte sidérante!
Et ce que tu en dis ("Autrement dit, on ne parle PAS de la même "réalité" lorsqu'on parle de la substance ou d'un de ses modes") est tout simplement farfelu et en contradiction flagrante avec tout ce que Spinoza essaye d'expliquer sur la question:
Ainsi au lieu d'agiter devant nos yeux, comme un totem protecteur, l'assertion selon laquelle l'essence des modes n'enveloppent pas l'existence (ce qui bien entendu est vrai mais n'a été remis en cause par personne) tu devrais te pencher sur le
corollaire de cette proposition, c'est à dire sur l'énoncé par Spinoza de ce qu'elle
implique : Que Dieu est la cause qui fait
qu'elles persévèrent dans l'exister et pas seulement qu'elles ont commencé d'être par lui. Bien sûr! : Car si la cause de leur existence et de leur durée n'est pas dans leur essence, à moins qu'elles n'existent et ne durent sans cause, cette cause ne pourra être que dans l'essence de
Dieu à la nature de qui seul appartient l'existence.
Les modes n'ont pas la "force propre" pour se donner l'existence à eux mêmes, Dieu à la "force propre" pour se donner à lui même l'existence, donc ou bien les modes n'existeront pas, ou bien ce sera par la force de Dieu qu'ils existeront et dureront. On ne peut pas, je crois, faire plus simple.
En résumé, et pour le redire encore, si de nouveau tu opposes à ceci l'idée par ailleurs juste, mais que
personne ne remet en question selon laquelle l'essence de Dieu n'appartient pas à l'essence des choses finies, j'en conclurai ou bien que tu n'as plus rien à ajouter sur le sujet ou bien que tu ne saisis pas réellement de quoi il est question et ce qui est en discussion: A savoir que ce qui fait le fond et l'essence de toute chose finie, ce qui la crée, la fait être, la fait exister, c'est Dieu et nulle autre chose. Et là dessus, je veux dire
étant donné cela , quel est le statut exact de ce que nous appelons la "finitude". Que devons nous dire et pourquoi?
D.