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COURT TRAITÉ
PARTIE II
CHAPITRE XVII
DE LA DIFFÉRENCE
ENTRE LA VOLONTÉ ET LE DÉSIR.
(1) Puisqu'il
est évident que nous n'avons aucun libre arbitre pour l’affirmation
et la négation, nous avons maintenant à chercher la vraie
différence entre la volonté et le désir, en un mot
à déterminer ce qui est, à proprement parler, la
volonté (en latin voluntas).
(2) D'après la définition
d'Aristote, le désir (appétit) semble être un genre
qui comprend deux espèces : car il dit que la volonté est
l'inclination que les hommes ont pour le bien ou l’apparence du bien :
d'où il suit, à ce qu’il me semble, qu'il range sous le
nom d'appétits toutes les inclinations, tout aussi bien les bonnes
que les mauvaises ; mais quand l'inclination a le bien pour objet, ou
que celui qui en est possédé est trompé par l'apparence
du bien, c'est alors ce qu'il nomme voluntas ou bonne volonté.
Si au contraire elle est mauvaise (comme lorsque nous voyons chez un autre
homme une inclination pour un objet réellement mauvais), c'est
ce qu'il nomme alors volupté ou mauvaise volonté : de telle
sorte que l'inclination de l'âme n'est pas une tendance à
affirmer ou à nier, mais un désir d'acquérir quelque
chose, sous l'apparence du bien, ou d'éviter le mal.
(3) Maintenant, il nous reste à
rechercher si ce désir est libre ou n'est pas libre. La conclusion
résulte déjà de ce que nous avons dit, à savoir
que le désir dépend de la représentation, et que
cette représentation doit avoir une cause extérieure ; c'est
ce qui résulte encore de ce que nous avons dit de la volonté
: mais il nous reste à montrer que le désir en lui-même
n'est pas libre.
(4) Quoique la plupart des hommes voient
bien que la connaissance qu'ils ont des choses est un intermédiaire
par lequel leur appétit passe d'un objet à un autre, ils
ne remarquent pas cependant quelle cause détermine ainsi ce changement
d'objet. Mais, pour faire voir que l'inclination en nous n'est pas libre,
et nous mettre devant les yeux d'une manière vive ce que peut être
le penchant qui nous entraîne et nous fait passer d'objet en objet,
représentons-nous un enfant qui, pour la première fois,
est saisi de la perception d'un objet : par exemple, je lui montre une
sonnette qui produit un son agréable à son oreille et lui
inspire le désir de la posséder ; voyez s'il peut s'affranchir
de cette passion et de ce désir ? Si vous dites : Oui, je
vous demande pour quelle cause il le ferait ? Ce n'est pas certainement
pour quelque autre objet qu'il connaisse mieux, puisque c’est encore le
seul qu'il connaisse, puisqu’il n'a en ce moment devant lui aucun autre
objet de perception, et que le plaisir est le plus grand qui s'offre à
lui. Peut-être dira-t-on qu’il a la liberté d'écarter
ce désir, que si le désir à la vérité
commence en nous sans liberté de notre part, nous avons néanmoins
ensuite le pouvoir de nous en dégager ? mais non, une telle liberté
ne peut apporter en sa faveur la moindre preuve. C'est ce que l'on voit
clairement, car quelle serait donc la cause qui pourrait ainsi détruire
le désir ? Serait-ce le désir lui-même ?
Certainement non, car il n’est rien qui par sa nature aspire à
sa propre destruction. Quelle cause donc pourrait supprimer le désir ?
Rien sans doute, si ce n'est que, suivant l'ordre et le cours de la nature,
l’enfant soit affecté par quelque objet qui lui paraîtra
plus agréable que le premier.
(5) C'est pourquoi, de même que
nous avons dit de la volonté qu'elle n'est rien autre chose dans
l'homme que telle et telle volonté particulière, de même
nous dirons ici que le désir n'est rien autre que tel et tel désir,
causé par telle ou telle perception ; le désir pris en général
n'est rien de réel, mais il est abstrait de tel ou tel désir
particulier ; n'étant rien de réel, il ne peut rien causer
réellement. Si donc nous disons que le désir est libre,
c'est comme si nous disions que tel ou tel désir est cause de lui-même,
c'est-à-dire qu’il a été cause de sa propre existence
avant d'exister, ce qui est l'absurdité même et d'une absolue
impossibilité.
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